Le 20 avril 2019 entrait en vigueur le Grand Paris des Bus, la plus vaste réorganisation du réseau depuis plus de sept décennies. Cette opération était l’aboutissement d’une grande concertation entre les parties prenantes : Ville de Paris, Mairies d’arrondissement, Préfecture de Police, Ile de France Mobilités, RATP, villes limitrophes de la première couronne, et citoyens, usagers ou non du bus.
Cinq ans se sont écoulés et l’Association des Usagers des Transports (AUT) dresse aujourd’hui un bilan loin d’être positif sur l’évolution du réseau de bus parisien.
Selon l’association, « le réseau a traversé au moins deux crises majeures : baisse drastique du trafic due à l’épidémie de Covid et difficultés de recrutement de conducteurs. Ces dernières, conjuguées à la multiplicité des travaux sur voirie, ont provoqué une dégradation importante de la qualité de service conduisant à des temps d’attente et à une irrégularité insupportable pour les voyageurs.
L’image du bus s’est ainsi sérieusement dégradée et les médias se sont emparés du sujet de la baisse constante de la vitesse commerciale, inférieure à 10km/h, et de la chute de la fréquentation de plus de 20% ».
L’AUT, très active dès l’élaboration du projet, a formulé de nombreuses critiques qui, selon elle, se sont malheureusement vérifiées au cours de ces cinq années :
- Amélioration très faible de la lisibilité du réseau, due, entre autres, à la réticence à réassocier les tracés allers-retours de lignes voire à en dissocier en créant ou rallongeant des contre-sens sur des voies larges, (Boulevard Saint-Germain, Boulevard de Sébastopol, Grand Boulevards, entre autres), voire en supprimant des double-sens, sur la rue de Rivoli, par exemple,
- Conséquences néfastes du souhait d’éviter les « trains de bus » sur certaines voies (rue Lafayette, entre autres) se traduisant par l’adoption de tracés tortueux pour certaines lignes,
- Création de longues lignes dont la régularité est difficile à assurer (lignes 20 Levallois – Porte des Lilas, 71 Porte de la Villette- Bibliothèque François Mitterrand, par exemple) et nécessite la création de services partiels, dont la disparition avait pourtant été annoncée lors de la présentation du projet. Le bus 91,dit « bus des gares », reliant les Gares Montparnasse et du Nord via la Place de la Bastille, reste, à cet égard, l’erreur emblématique de ce nouveau réseau,
- Déception liée à l’absence de desserte de certains sites (l’Hôpital Percy à Clamart, par exemple),
- Création de cinq lignes nouvelles qui n’ont pas toutes trouvé leur public,
- Absence de volonté politique de faciliter la traversée des carrefours (vidéoverbalisation, priorité des bus aux feux, présence de la Police municipale),
- Difficultés accrues de circulation.
L’AUT pointe aussi du doigt les diverses opérations menées par la Ville de Paris (création de pistes cyclables, rues aux écoles) qui ont également contribué à dégrader le réseau.
Dans cette logique l’association s’étonne qu’aucun bilan et aucun retour d’expérience n’aient été fait sous l’égide d’IDFM mais qu’au contraire, les statistiques de trafic, qui permettraient de rendre le réseau plus efficace, « restent des secrets jalousement gardés aussi bien par IDFM que par la RATP, voire par la Ville de Paris ».
« En définitive, explique encore l’AUT, notre crainte initiale que ce vaste projet, dans lequel IDFM a investi 40 M€ par an en fonctionnement et, avec la Ville de Paris, 14,5 M€ en aménagements, ne provoque pas de report modal (notamment de la part des automobilistes) s’est concrétisée ».
Un paradoxe, alors que les thèmes de l’accessibilité et de l’inclusion sont des axes majeurs de la communication municipale…