Daimler Buses France était en 2023, avec ses marques Mercedes-Benz et Setra, deuxième sur le podium des constructeurs de cars et bus en volume d’immatriculations. Quelle vision d’avenir l’industriel développe-t-il en ce début de printemps 2024 ? Entretien croisé avec Henri Paccalin, CEO de Daimler Buses France ; Malina Marjanovic, directrice commerciale Autocars-Minicars Mercedes-Benz et Setra ; et Matthieu Beyt, directeur commercial Autobus-Grands Comptes Mercedes-Benz et Setra.
Car & Bus News : Concernant le marché des autocars, en quoi les résultats de l’année 2023 éclairent-ils les perspectives 2024 pour vos marques ?
Malina Marjanovic : Le marché français des véhicules de tourisme a été de l’ordre de 600 immatriculations l’année passée, et nous nous attendons à un retour à la normale dès cette année, avec, pour nous, une part de marché de l’ordre de 30%. Dans ce cadre, nous constatons aujourd’hui un regain d’intérêt pour les modèles Premium, car le tourisme de groupe retrouve des couleurs et beaucoup de nos clients n’arrivent pas aujourd’hui à répondre à toutes les sollicitations. C’est dans cette logique que nous constatons une remontée des immatriculations de notre marque Setra avec une soixantaine d’immatriculations de véhicules qui sont tous désormais, rappelons-le, des autocars purement dédiés au tourisme. Enfin, cette année, nous devrions aussi bénéficier d’une forte demande de renouvellement, liée par exemple aux Jeux Olympiques, et nous en sommes même à espérer le niveau de vente pré-Covid.
CBN : Quels sont les modèles les plus demandés ?
Malina Marjanovic : Notre modèle le plus vendu est le Tourismo 13m en trois essieux, suivi du petit Setra S 511. Nous notons aussi un retour en grâce des double-étages, avec tout de même une quinzaine de commandes à ce jour.
CBN : Quelle est votre position sur le marché des autocars interurbains ?
Matthieu Beyt : Le marché français des autocars interurbains s’est montré remarquablement stable avec quelque 3000 véhicules vendus en 2023, et il devrait le rester cette année. Si nous constatons une pénétration du GNV dans ce secteur avec quelque 20% des ventes en 2023 (une motorisation qui n’est pas dans la gamme Daimler, NDLR), nous concernant, les ventes et commandes d’Intouro se répartissent très équitablement entre les modèles diesel et hybrides. Face à la vive concurrence sur ce marché, notre véhicule reste relativement cher, mais possède de nombreux arguments comme le fait que notre motorisation diesel accepte tous les carburants alternatifs, ou que la carte grise hybride permet aux opérateurs de faire valoir leur engagement dans la transition écologique.
CBN : En matière de plan-produits, à quelles nouveautés la clientèle de Daimler peut-elle s’attendre dans les années qui viennent pour le marché des autocars ?
Malina Marjanovic : Nous sommes bien entendu fin prêts pour la mise en œuvre prochaine de la réglementation européenne GSR 2 dès juillet 2024. Ensuite, nous présenterons courant 2025 un autocar interurbain électrique à batteries, un « e-Intouro », dont les premières livraisons devraient avoir lieu en 2026.
CBN : Dernier point peut-être concernant le secteur des autocars, qu’en est-il du marché des véhicules d’occasion ?
Malina Marjanovic : Concernant le marché des VO, il est clairement tendu, car la demande est aujourd’hui exponentielle. Nous sommes donc plutôt en recherche de véhicules, et nos parcs VO sont effectivement peu fournis.
CBN : Enfin, avez-vous constaté des difficultés de financement chez vos clients, comme certains pouvaient le craindre après la crise Covid ?
Henri Paccalin : Nous n’avons pas rencontré une telle problématique, notamment au niveau de notre filiale de financement, qui ne travaille, rappelons-le, que sur les véhicules neufs. Par ailleurs, en tant que président de la CIAM, je viens d’apprendre que le gouvernement venait de décider de maintenir l’enveloppe de 130 M€ promise fin 2023, avec le maintien de l’appel à projets afférant et le retour du bonus pour l’électrification.
CBN : Concernant le marché urbain, quel constat tirez-vous des résultats 2023 ?
Matthieu Beyt : Ce marché s’est montré l’an dernier lui aussi particulièrement stable avec environ 1600 véhicules immatriculés. En revanche, nous avons constaté que 55% des imatriculations en question a concerné des autobus fonctionnant au GNV, une motorisation que nous ne possédons pas dans notre gamme. Pour le reste donc, Mercedes-Benz a vendu 237 véhicules, dont 30 e-Citaro. On peut donc dire que deux autobus diesel vendus en France en 2023 ont été des Citaro. Concernant 2024, nous estimons que le marché devrait conserver cette stabilité, avec toutefois un léger rattrapage en matière d’immatriculations d’autobus électriques, rattrapage qui viendra compenser un certain nombre de retards de livraisons accumulés chez la plupart des industriels. Quoi qu’il en soit, nous pensons aussi que le marché français de l’urbain à venir restera encore marqué par la présence du GNV.
CBN : Quelle est la position de Mercedes-Benz sur le marché de l’hydrogène, puisque vous avez désormais un e-Citaro H2 dans votre catalogue ?
Matthieu Beyt : L’hydrogène reste à ce jour soumis à des coûts encore prohibitifs. Concernant notre e-Citaro H2, nous étions confrontés à un cas d’usage qui demandait une amélioration d’autonomie, d’où notre choix d’un prolongateur. Quant au surcoût d’un tel modèle, il est encore difficile de le déterminer, même si, sur d’autres marchés européens, nous sommes ressortis un peu moins chers certains de nos concurrents. Reste que ce marché est pour l’essentiel le fruit d’une volonté politique et que de nombreuses questions se posent encore.
CBN : Pour le marché urbain, quel sera votre plan-produits pour les années à venir, et Mercedes-Benz est-il référencé par les centrales d’achats ?
Matthieu Beyt : Concernant nos véhicules électriques à batteries, nous introduirons en 2026 les packs NMC de 4e génération, qui apportent des gains de densité et donc d’autonomie. Enfin, nous sommes actuellement référencés par l’UGAP pour nos modèles diesel, hydrogène et pour le e-Citaro de 18 m. Par ailleurs, nous répondons actuellement à l’appel d’offres lancé par la CATP concernant l’électrique.
CBN : Dernier point, votre usine française de Ligny-en-Barrois devrait occuper une place plus importante dans la stratégie de production de Daimler Buses, qu’en est-il exactement ?
Henri Paccalin : Pour rappel, notre usine de la Meuse emploie aujourd’hui quelque 1200 personnes et a produit 1845 véhicules en 2023. Elle fait l’objet d’un programme d’extension qui court sur la période 2024-2026 afin qu’elle devienne la première d’Europe consacrée à la production de véhicules électriques, en l’occurrence le e-Citaro. Nous devrions pouvoir dépasser les 2000 véhicules produits dans les prochains mois.