Van Hool, anatomie d’une chute

par | 31 Mar, 2024 | Autobus, Autocar, Entreprise, Les dossiers

Selon toute vraisemblance, le constructeur belge Van Hool, qui avait introduit mi-mars une requête auprès du tribunal pour ouvrir une procédure judiciaire en vue de se protéger de ses créanciers, devrait être placé sous le régime des faillites, sans doute d’ici huit jours.

 

Le temps était compté depuis les dernières annonces du 11 mars, mais, selon la presse belge, le plan de relance qui devait être adopté avant la date butoir du 31 mars se serait heurté au mur d’une querelle familiale vieille de 50 ans. Petit rappel.

 

La société Van Hool a été fondée en 1947 par Bernard Van Hool. Au fil des années, ses huit fils (Alfons, Denis, Jos, Paul, Leopold, Herman, Marcel et Leon) seront impliqués dans le fonctionnement de l’entreprise. En revanche, ses deux filles (Simone et Ingrid) n’y auront pas leur place. Après la mort de Bernard Van Hool, en 1974, Leon et Carl se succéderont à la tête de l’entreprise.

 

Les vraies difficultés apparaîtront avec la troisième génération. En 1999, certains membres proposent de professionnaliser et de simplifier le conseil d’administration. Les descendants de trois des huit fils choisissent alors de se retirer et vendent leurs parts.

 

Van Hool se trouve obligé de les racheter, tandis que quatre des cinq successeurs potentiels quittent progressivement l’entreprise, laissant seul Filip Van Hool à sa tête à partir de 2013.

 

Parallèlement, les deux filles du fondateur, qui n’ont jamais reçu d’actions, se sentent toujours lésées et attaquent en justice. Cette procédure judiciaire, toujours en cours, aboutira en 2008, au placement sous séquestre des deux tiers des actions du constructeur, empêchant semble-t-il toute évolution majeure de la société.

 

Un contexte familial toujours explosif donc, qui explique sans doute pourquoi la famille Van Hool n’a pu s’entendre récemment sur une stratégie de relance, même face à l’urgence. Une situation qui semble aussi avoir bloqué les velléités d’investissements de repreneurs éventuels, peu désireux d’assumer les quelque 300 M€ de dette du constructeur, mais aussi inquiets à l’idée de se retrouver au cœur d’une procédure judiciaire quasi inextricable.

 

Paradoxalement, c’est peut-être donc bien la mise en faillite de Van Hool qui pourrait permettre à l’industriel de sortir de l’ornière dans laquelle il se trouve aujourd’hui.

 

Un outil industriel de grande valeur

 

Outre la valeur symbolique négative que représenterait la disparition d’un industriel comme Van Hool pour la Belgique, ce constructeur dispose en effet de nombreux points forts.

 

Son centre de recherches et développements installé à Koningshooikt en fait partie, au même titre que la division des véhicules industriels, qui fabrique des remorques classiques (semi-remorques), et des semi-remorques-citernes spécialisées dans le transport des produits chimiques, les gaz ou l’alimentation. Une branche qui se trouve être particulièrement rentable.

  

Dans le secteur des cars et bus, Van Hool a par ailleurs ouvert il y a dix ans une usine en Macédoine du Nord à Skopje. S’il s’agit là d’une filiale contrôlée par la holding familiale Immoroc et non pas directement par Van Hool, elle représente un outil industriel de valeur. Grâce à une main-d’œuvre semble-t-il 80 à 90% moins chère qu’en Belgique, Van Hool pourrait s’appuyer sur elle pour une reconquête de sa place de constructeur reconnu, dans un contexte de concurrence sévère entre les différents acteurs présents sur le marché européen.

 

Autre atout pour Van Hool, son implantation aux USA, avec sa division américaine, qui possède par exemple une participation de 38% dans le distributeur ABC Bus Companies et un carnet de commandes comprenant notamment des clients comme Apple, Google ou Facebook.

 

Des atouts qui n’ont pas manqué d’intéresser plusieurs repreneurs potentiels, qui se seraient d’ailleurs déjà fait connaitre. Selon le journal belge Standaard, le fabricant allemand de remorques Schmitz Cargobull serait ainsi intéressé par la division véhicules industriels, tandis que le néerlandais VDL souhaiterait se porter acquéreur de la division cars et bus. Les deux candidats seraient par ailleurs en concurrence avec l’entrepreneur flamand Guido Dumarey, qui avait déjà fait part de son intérêt pour Van Hool dans la presse belge. Un quatrième candidat, dont l’identité n’a pas été révélée, aurait même été évoqué le 29 mars dans la presse économique belge.

 

En revanche, de l’avis général, et quel que soit le, ou les repreneurs, Van Hool ne pourra plus économiquement supporter la stratégie qui a fait sa réputation au fil du temps dans, notamment, le milieu des autocaristes, à savoir celle qui a souvent privilégier le sur-mesure désiré par la clientèle.

 

Selon Marc Zwaaneveld, gestionnaire de crise de Van Hool et actuel co-CEO, l’industriel devrait limiter à termes le nombre d’options à un maximum de trois, tout en abandonnant le marché des autobus.

 

Quelles que soient les évolutions à venir concernant l’industriel, pour le marché français, deux contrats majeurs seront en tous cas à suivre attentivement, celui de Pau, mais aussi et surtout celui du TZen4 (et TZen5 ultérieurement) en Ile-de-France, même si les collectivités concernées se veulent pour l’instant rassurantes.

 

 

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