par Pierre Cossard | Juin 14, 2024 | Autobus, Autocar, Entreprise, Les dossiers, Réseau
Alors que les initiatives en faveur de l’hydrogène dans les transports se multiplient, l’UGAP accompagne les acteurs publics dans cette transition. Décryptage avec Olivier Rougetet, chef de département marketing véhicules UGAP.
Quels sont les enjeux de l’hydrogène en matière de mobilité pour les acteurs publics ?
La décarbonation des flottes de véhicules en général, et du transport en commun en particulier, est l’un des forts enjeux des lois votées en la matière ces dernières années : transition énergétique pour une croissance verte (2015), orientation des mobilités (2019) et climat et résilience (2021). Ainsi, à compter du 1er janvier 2025, l’intégralité des véhicules de transport en commun renouvelés dans le cadre des flottes supérieures à 20 véhicules devra être à faibles émissions. La technologie hydrogène fait partie du mix énergétique retenu par le législateur, au même titre que l’électrique et le gaz, et a donc un rôle important à jouer. Cette technologie possède en effet des atouts de fonctionnement importants vis-à-vis des autres technologies : temps de recharge réduit, autonomie importante, aucune émission de CO2 en utilisation et une source de production vertueuse en ce qui concerne l’hydrogène vert qui est appelé à fortement se développer. Tout l’enjeu pour les collectivités publiques réside donc dans la création d’un écosystème vertueux incluant une flotte de véhicules dédiés, un réseau de recharge local optimisé et un sourcing d’approvisionnement vertueux.

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En quoi la nouvelle offre d’autobus de l’UGAP répond à ces enjeux ?
À l’issue de son appel d’offres du début d’année, l’UGAP a sélectionné plusieurs constructeurs et technologies en matière d’hydrogène, du prolongateur d’autonomie au 100 % hydrogène, du 12 au 18 mètres sur plusieurs longueurs de véhicules. Cette toute nouvelle offre – avec nos 3 titulaires de marchés Daimer Bus, Iveco Bus et Solaris – est disponible depuis le mois d’avril, et permet d’enrichir le catalogue existant, très complet et composé de nombreuses typologies de véhicules, du minibus aux autobus articulés, avec des motorisations thermiques, hybrides, électriques ou hydrogène.
Quelle est la plus-value de l’UGAP ?
La stratégie de l’UGAP vise à aider les collectivités territoriales à atteindre leurs objectifs de verdissement de leurs flottes. Ainsi, l’établissement est impliqué depuis de nombreuses années dans le domaine de l’électromobilité, notamment hydrogène, via la publication dès 2020 d’un appel d’offres pionnier concernant cette technologie, mais aussi par l’accompagnement dans leur développement des entreprises innovantes identifiées. Notre rôle est donc de proposer le catalogue de véhicules le plus adapté aux besoins des collectivités au regard de l’offre industrielle existante. Pour cela, nous jouons un rôle de facilitateur entre une filière industrielle qui s’interroge sur les besoins futurs des collectivités et des autorités organisatrices de mobilité qui doivent disposer de l’offre la plus à jour et la plus compétitive possible. Nos équipes achats entretiennent donc un dialogue constant avec les acteurs industriels, afin de mettre à jour régulièrement notre catalogue avec les dernières technologies à faibles émissions, tandis que nos équipes commerciales en région conseillent nos clients dans la définition de leurs besoins, la sélection du matériel le plus adapté, et les accompagnent durant la commande et la livraison.
par Olivier Meyer - transbus.org | Juin 10, 2024 | Autobus, Autocar, Les dossiers
Encore confidentielle, la part de marché des autobus et autocars à hydrogène a vocation à progresser dans les années à venir sous l’impulsion des aides publiques dans les écosystèmes locaux visant à décarboner la mobilité lourde. L’hydrogène permet la conception de véhicules électriques ayant une autonomie supérieure à ceux équipés de batteries.
Deux solutions techniques pour les bus et cars existent : pile à combustible alimentée avec de l’hydrogène produisant de l’électricité ou moteur thermique à combustion d’hydrogène.
Tous les constructeurs n’ont pas encore d’offre hydrogène et ceux qui proposent des véhicules à hydrogène ne le font pas sur tous les gabarits. Par ailleurs, quelques industriels permettent de convertir des véhicules diesel vers l’hydrogène. Leurs kits de rétrofit sont un vrai complément d’offre face à des gammes encore réduites de véhicules neufs.
Enfin, le développement de ces véhicules est conditionné à la présence d’une station d’hydrogène. Le ravitaillement en hydrogène, décarboné de préférence, s’effectue en moins de quinze minutes.

Autobus à hydrogène : une offre qui s’étoffe
Les constructeurs peuvent faire des choix techniques différents pour développer leurs bus à hydrogène équipés d’une pile à combustible :
– batterie de petite capacité permettant de stocker temporairement l’énergie produite par la pile
– batterie de grande capacité rechargeable au dépôt : dans ce cas la pile à combustible vient augmenter l’autonomie du bus (technologie dite « REX », range extender).
Le plus petit bus à hydrogène du marché est le midibus Hydron (8 mètres de long) du constructeur italien Rampini. L’hydrogène est stocké à 350 bars dans 3 réservoirs et alimente une pile à combustible de 30 kW. Le bus embarque également une batterie LFP de 175 kWh. Son autonomie annoncée est de plus de 450 kilomètres.
Le constructeur portugais CaetanoBus produit l’autobus H2.CityGold offrant 450 kilomètres d’autonomie avec une pile à combustible Toyota de 70 kW pour les modèles à venir. Ce bus a été en démonstration dans plusieurs villes d’Europe. Quatre bus de ce type circulent en Vendée, deux à La Roche-sur-Yon et deux aux Sables-d’Olonne.
Daimler Buses commercialise son bus électrique Mercedes-Benz eCitaro FC, un véhicule à batteries avec une pile à combustible Toyota Motor Europe (TME) de 60 kW et des réservoirs d’hydrogène à 350 bars. L’hydrogène est utilisé pour augmenter l’autonomie du véhicule. Ce bus existe en deux longueurs : 12 mètres (batterie de 294 kWh) et 18 mètres (batterie de 392 kWh).
Iveco Bus a présenté l’autobus E-Way H2 en octobre 2023. Ce bus est équipé d’une pile à combustible HTWO du groupe coréen Hyundai Motor Company et d’une batterie FPT Industrial NMC de 69 kWh. La chaîne de traction est signée Siemens (ELFA 3 de 310 kW). Ce véhicule est conçu sur la même base que l’autobus électrique GX 337 E. Le E-Way H2 est référencé par l’UGAP depuis avril 2024.

Le Karsan e-ATA Hydrogen.
Karsan, distribué en France par HCI, propose son e-ATA en version hydrogène. Ce véhicule est proposé avec une pile à combustible développant 70 kW, couplée à des batteries à haute tension type LTO de 30 kWh et des moteurs électriques dans les moyeux de roue d’une puissance maximum de 250 kW. Les réservoirs d’hydrogène ont une contenance de 1560 l, ce qui lui donnerait 500 km d’autonomie.
Otokar propose lui dans son catalogue le Kent C en version hydrogène. Développé sur une base à plancher bas et doté d’une capacité d’emport allant jusqu’à 82 passagers, le Kent C à hydrogène est donné avec une autonomie de 500 km. Les 5 réservoirs sont placés en toiture et alimentent une pile à combustible complétée par 140 kWh de batteries réparties sur deux packs. L’ensemble alimente un moteur électrique Voith de 410 kW.
La société française Safra débute l’industrialisation de son autobus Hycity 12 dans ses ateliers d’Albi (Occitanie). Ce véhicule à hydrogène est le successeur du Businova. Sa fiche technique a été publiée en juin 2022 : pile à combustible Symbio de 45 kW (30 kW utiles), batteries Microvast NMC de 130 kWh et essieu motorisé ZF AVE 130. L’autonomie annoncée est de 350 km. La présentation du prototype a eu lieu en octobre 2023. Les premiers exemplaires devraient être livrés d’ici la fin de cette année.

Le Solaris Urbino 12 H2.
Le polonais Solaris, filiale du groupe CAF est le leader de ce marché. L’autobus Urbino à hydrogène existe en deux longueurs (12 et 18 mètres). Un exemplaire d’Urbino 12 hydrogen a été livré en août 2022 au Sytral pour le réseau TCL (Lyon). La pile à combustible est d’une puissance de 70 kW. En mars 2023, Île-de-France Mobilités a commandé 22 bus Solaris Urbino 12 hydrogen. Cette commande est assortie d’une option de 25 bus pour 2026.
La version articulée, Urbino 18 hydrogen, a été présentée en septembre 2022. Ce bus est équipé d’une pile à combustible développant 100 kWh.
Le constructeur belge Van Hool produisait une version hydrogène de sa nouvelle gamme d’autobus : A12 LF FC (pile Ballard FCMove HD 70kW et batterie Actia de 24 kWh) et A18 LF FC (pile Ballard FCMove HD+ 100kW et batterie Akasol de 132 kWh). La faillite de cet industriel ne permet pas à ce jour de connaître l’avenir de cette gamme. Des exemplaires de 12 mètres sont en circulation à Belfort, Pau et Rouen.

Le Van Hool A12LF FC fonctionnant à l’hydrogène sur le réseau Fébus de Pau.
Pour faciliter l’acquisition d’autobus à hydrogène par les collectivités et opérateurs publics, les centrales d’achat CATP (AGIR Transport) et UGAP référencent des bus à hydrogène.
Autocars à hydrogène : le retrofit se développe
Il n’existe pas d’autocars neufs de ce type à ce jour. Néanmoins, CaetanoBus (siège au Portugal) et Temsa (siège en Turquie) collaborent pour développer un autocar de tourisme électrique à hydrogène équipé d’une pile à combustible. Ce véhicule embarque 72,8 kg d’hydrogène pour alimenter une pile à combustible Toyota et une batterie de 160 kWh. L’autonomie avec un plein d’hydrogène devrait atteindre 1 000 km, la distance entre Bruxelles et Milan. Cet autocar à deux essieux est une adaptation du Temsa HD12. La production en série du modèle à hydrogène devrait débuter en 2025.

L’autocar hydrogène CaetanoBus-Temsa.
En attendant la production d’autocars neufs à hydrogène par les constructeurs, il est possible d’opter pour la transformation d’autocars diesel en autocars fonctionnant à l’hydrogène. Quelques industriels proposent des kits de rérofit.
La société albigeoise Safra a développé le kit H2-Pack permettant de transformer les autocars Mercedes-Benz Intouro diesel en autocars à hydrogène. Ce kit comprend un moteur électrique Dana TM4 de 350 kW, une batterie Microvast NMC de 71 kWh, une pile à combustible (100 kW mais 70 kW utiles) et six réservoirs d’hydrogène fournis par Plastic Omnium. L’autonomie peut atteindre 500 kilomètres entre deux pleins d’hydrogène (35 kg à 350 bars). Safra propose deux versions de son kit : une avec le stockage de l’hydrogène en toiture et une avec les réservoirs dans l’habitacle, à l’arrière de l’autocar. Cette dernière version nécessite la neutralisation de 9 places assises à l’arrière de l’autocar pour positionner les bouteilles d’hydrogène comprimé. 15 autocars diesel Mercedes Intouro ME de 2012, appartenant à la région Occitanie, sont en cours de transformation. Les deux premiers autocars ont été inaugurés le 17 avril 2024 à Albi. Ils vont circuler sur des lignes régulières liO de la région Occitanie.

L’autocar Intouro rétrofité par Safra avec son pack H2.
Green Corp Konnection (GCK) propose le rétrofit d’autobus et d’autocars avec des piles à combustible Symbio ou Toyota. Les premiers véhicules transformés sont des autocars Iveco Crossway. Le moteur thermique et son réservoir de gazole sont remplacés par un moteur électrique de 295 kW alimenté par une pile à combustible d’une puissance maxi de 150 kW. Une batterie sert à stocker de manière temporaire l’énergie. Ces autocars sont équipés de deux StackPack comprenant chacun une pile à combustible Symbio de 75 kW. Le véhicule devrait pouvoir parcourir 500 km avec 50 kg d’hydrogène comprimé à 700 bars.
Dans une logique d’expérimentation, la région Normandie et Transdev ont lancé en juin 2021 le projet Nomad Car Hydrogène (NCH2) pour convertir un autocar Irisbus Crossway (Euro 5) de 2011 en autocar fonctionnant à l’hydrogène. La transformation a été effectuée par la société IBF H2. Le kit de rétrofit a été produit aux normes européennes en Asie. Il comprend un moteur électrique Siemens, une pile à combustible Ballard, des réservoirs à hydrogène Plastic Omnium et des batteries CATL. Les réservoirs d’hydrogène sont positionnés dans un rack sur le pavillon. Cet autocar circule sur la ligne régulière NOMAD 216 entre Rouen et Evreux depuis fin avril 2024.

Le NOMAD CAR H2.
Deux projets de retrofit avec un moteur à combustion interne d’hydrogène sont en cours ; ils associent chacun un industriel et un exploitant.
Transdev et EHM – Efficient Hydrogen Motors (siège dans le Finistère) ont signé un partenariat pour transformer d’ici 2025 un autocar Iveco Crossway à moteur diesel en autocar équipé d’un moteur à combustion hydrogène à haut rendement. Sa puissance est de 265 kW. La consommation d’hydrogène est estimée à 6 kg/100 km.
Les groupes GCK et Keolis ont annoncé un partenariat pour expérimenter un autocar Iveco Crossway dont le moteur diesel FPT Cursor 9 sera transformé pour fonctionner à l’hydrogène. Ces travaux seront menés par deux filiales de GCK : la transformation du moteur sera réalisée par Solution F et celle du véhicule par GCK Mobility. Les essais du véhicule sont prévus pour le premier trimestre 2025.
La filière n’en est encore qu’à ces débuts. Les constructeurs vont développer leurs offres de bus et cars à hydrogène. En attendant, le retrofit est une option qui permet d’accélérer le déploiement de véhicules à hydrogène.
par La rédaction | Juin 7, 2024 | Autobus, Autocar, Equipement, Les dossiers
La 10e édition de Busworld Türkiye, qui s’est tenue à Istanbul Fuar Merkezi du 29 au 31 mai derniers, a réuni 159 exposants de 16 pays et reçu 12 366 visiteurs, dont 1 881 participants internationaux de 96 pays.
L’exposition couvrait une superficie de 9 975 m², présentant 56 bus et autocars, ainsi qu’une variété de mini et midi bus et de nombreux fournisseurs de composants, d’accessoires et de services.
– Anadolu Isuzu : le constructeur présentait quatre modèles, le Cityport 12 Diesel Euro 6, le Novociti Volt, le Novo Volt et le Grand Toro.
– BMC présentait ses deux gammes Procity et Neocity. Procity comprend des bus 100% électriques de 12 mètres avec une carrosserie entièrement renouvelée, tandis que Neocity comporte des midibus électriques destinés aux trajets aéroportuaires et urbains.
– Bozankaya a présenté un bus électrique à plancher surbaissé de 12 mètres, doté d’une conception avancée et d’une technologie de batterie de troisième génération, offrant une autonomie de plus de 300 km et un temps de charge d’environ 2 heures.
– CRRC MNG a présenté son nouveau véhicule électrique.
– HABAŞ présentait son bus à pile à combustible Comfort City H2 avec une autonomie de 800 km, et l’autocar Alfa Lux-e entièrement électrique avec une autonomie donnée jusqu’à 400 km.
– Karsan présentait une gamme complète entièrement électrique et zéro émission, comprenant le bus à hydrogène e-Ata 12, le midibus urbain autonome e-Atak et le minibus eJest.
– Otokar présentaitquatre modèles dont le midibus Sultan Giga, les bus urbains Centro en versions diesel et électrique, et le bus électrique e-Kent C.
– Iveco Bus présentait l’E-way, le Crossway et le Daily, avec des motorisations diesel, biométhane ou électriques, ainsi que les Evadys.
Concernant le secteur des mini (bus autant que car), les industriels présents étaient aussi fort nombreux : AYB, Aktepe, Başer Otomotiv, Bur-Can, Emir VIP, Erduman, Mercus-Bus, Öncü Luxury Car Design, Palmiye Design, Stylebus-Gürsözler, Yüksel et Uğur Karoser.
par Jean-François Pech, PDG de MyMobility | Juin 6, 2024 | Autobus, Entreprise, Les dossiers
« Jamais auparavant, il n’y avait eu autant d’enfants handicapés à l’école ». Lors de la dernière Conférence nationale du handicap, le Président de la République a milité en faveur d’une école pour tous en rappelant des chiffres qui devraient nous réjouir : 430 000 élèves en situation de handicap sont scolarisés en milieu ordinaire. Entre 2017 et 2021, le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire a même augmenté de 24%.
La loi handicap de 2005, première et dernière loi structurante sur le sujet, a permis un changement de paradigme et a posé le principe de l’accessibilité à toutes et tous aux transports pour en faire un des moteurs essentiels de l’inclusion. Elle est, vingt ans après, encore citée en exemple. Si l’accessibilité pleine et entière aux transports pour les personnes en situation de handicap est encore loin d’être résolue, cette loi a permis à un pan du secteur de la mobilité de se structurer et de s’autonomiser. Des entreprises spécialisées se sont engagées à offrir des services de qualité en permettant aux élèves en situation de handicap de se rendre à l’école dans des conditions optimales et sont devenues un rouage essentiel de l’école inclusive.
On pourrait imaginer que conduire un enfant en situation de handicap de son domicile à son école est une chose simple : il n’en est rien. Ces acteurs ont investi dans des véhicules adaptés, formé des conducteurs également accompagnateurs qualifiés pour être capables de réagir selon les différents handicaps rencontrés… Ils ont grandement contribué à rendre le transport scolaire d’enfants en situation de handicap plus fiable, sûr et efficace. Avec des milliers d’élèves en situation de handicap accompagnés chaque jour, ces prestations revêtent une utilité sociale indéniable : elles sont un des maillons de l’école pour tous que les pouvoirs publics appellent de leurs vœux, déchargent les parents, qui sont parfois davantage des aidants et, comme tout service public, permettent un accès à des services pour celles et ceux qui n’en ont pas les moyens. Le transport scolaire d’enfants en situation de handicap prend ici toute sa part dans la réduction des inégalités : sans transport, pas d’école !
Une inclusion prônée et pourtant, un service de transport ubérisé et des exigences… abaissées ?
Ces missions sont déléguées le plus souvent par les Conseils départementaux qui demeurent l’autorité compétente pour le transport des élèves handicapés vers les établissements scolaires. Les marchés publics de transport de personnes handicapées, qui permettent aux collectivités de transférer cette activité à des acteurs privés, sont l’un des rares secteurs où les entreprises n’ont pas l’obligation de démontrer leurs capacités à accomplir les tâches confiées. A travers cette faille, le secteur assiste ces dernières années à une offensive alarmante qui doit nous faire réfléchir collectivement aux véritables ressources mises à disposition pour que la France et ses collectivités se donnent – enfin – les moyens des ambitions affichées.
De plus en plus d’acteurs proposent des prix anormalement attractifs et cassent le marché aux dépens de la qualité et, plus grave encore, de la continuité du service public. En n’étant pas rattachés à la convention collective qui régit le secteur, ces nouveaux entrants rompent la logique sociale et sociétale vertueuse qui plaçait jusqu’ici les enfants en priorité et préservait les emplois. Le marché changeait de prestataire ? L’enfant accompagné pouvait toujours garder le même conducteur puisque la convention oblige à transférer les salariés d’une entité à l’autre.
En privilégiant les offres financièrement moins-disantes, les donneurs d’ordre mettent à mal la pérennité des acteurs de la profession qui s’y investissent et, surtout, la dignité de celles et ceux à qui l’on promet depuis bien trop longtemps de ne plus être traités comme des citoyens de seconde zone. Des centaines de familles ont pu se retrouver sans solution de transport, livrées à elles-mêmes en devant trouver des
solutions par leur propre moyen. Au nom de la sacrosainte rationalité économique, devons-nous désormais accepter que le transport scolaire d’enfants en situation de handicap soit, à son tour, l’objet d’appétits financiers d’acteurs opportunistes ? Des enfants en situation de handicap doivent-il être mis sur le même plan qu’une pizza déposée en bas de chez soi, ou un shampoing commandé et livré en moins de 15 minutes ? Ne sommes-nous finalement pas en train d’assister à une régression sociale, le tout sous le regard, au mieux, méconnaissant de la réalité du terrain, au pire, complice, des autorités ?
De l’école pour tous à la société inclusive… un accès à la mobilité voué à être à deux vitesses ?
La crise qui couve doit être une opportunité de renforcer et garantir la qualité de nos services publics qui doivent être les fers de lance de la mobilité inclusive. Dans les prochaines années, le vieillissement de la population sera l’un des grands défis du XXIe siècle aux côtés de la cause environnementale : d’ici 2070, la part des 75 ans et plus devrait croître de 5,7 millions de personnes. Questionner la place du transport pour une école plus inclusive, c’est poser les jalons d’une réflexion plus large sur la manière dont notre société souhaite traiter ses plus fragiles et aborder la question de la dépendance.
Il est impératif que les pouvoirs publics prennent la hauteur de l’urgence, anticipent et saisissent à bras le corps cette problématique en accompagnant le développement de services de qualité pour toutes et tous, en phase avec les dernières annonces. Le transport scolaire d’enfants en situation de handicap doit prendre toute sa place dans les politiques publiques. En dépit de quoi, nous assisterons à un nivellement par le bas et un retour en arrière spectaculaire des efforts déployés durant tant années aboutissant, finalement, à une rupture avec l’idéal républicain d’égalité.

Jean-François Pech, PDG de MyMobility.
par Pierre Cossard | Avr 20, 2024 | Autobus, Entreprise, Les dossiers, Réseau
Le constructeur polonais Solaris Bus & Coach, filiale de CAF, et qui ne produit à ce jour que des véhicules destinés aux réseaux de transports publics urbains, est omniprésent sur le marché européen des autobus. Un peu moins représenté dans les réseaux français, il escompte bien remédier à cet état de fait dans les mois et années à venir. Entretien avec Brice Bonavia, gérant de Solaris France.
Car & Bus News : Pouvez-vous, en quelques phrases, présenter Solaris Bus & Coach ?
Brice Bonavia : Solaris est un constructeur polonais, filiale du spécialiste espagnol du ferroviaire CAF. Nous produisons quelque 1500 véhicules chaque année, ce qui représente 27% du chiffre d’affaire réalisé par le groupe CAF. Nous sommes le troisième acteur européen sur les marchés des bus urbains, avec tous les types de motorisation disponibles. Nous sommes aussi le premier producteur européen de véhicules zéro émission. A titre indicatif, nous avons aujourd’hui dans nos carnets de commandes, à l’échelle du groupe, rien moins que 600 véhicules fonctionnant à l’hydrogène, en 12 et 18 m. Enfin, nous travaillons actuellement pour que notre usine de Poznan puisse atteindre une capacité de production de 2000 unités à l’horizon 2027.
CBN : Quels sont les marchés européens sur lesquels Solaris est aujourd’hui le mieux placé ?
BB : En Europe, nous sommes aujourd’hui leaders sur les marchés polonais, espagnols et bientôt italiens, où nous avons enregistré rien moins que 1200 commandes à ce jour.
CBN : Comment expliquez-vous la position relativement modeste de Solaris Bus sur le marché français ?
BB : Dans l’Hexagone, nous n’avons effectivement pas la place qui devrait être la nôtre. Notre objectif est donc d’atteindre et de pérenniser à termes quelque 150 immatriculations chaque année. Nous appuyons notre démarche sur la fiabilité de nos autobus, déjà reconnue un peu partout, et sur un accompagnement permanent de nos clients, notamment à travers les contrats de « full maintenance » qui sont désormais presque devenus la norme dans les pays où nous sommes bien implantés. Par ailleurs, nous sommes désormais référencés à l’UGAP, à la CATP, qui représentent à elles deux pas moins de 85% du marché, et auprès des grands groupes de transport de France, qui commandent en direct entre 150 et 200 autobus chaque année. Un ensemble de référencements qui devrait fort logiquement nous ouvrir des marchés.
CBN : Vous venez d’ailleurs d’être sélectionnés par Ile-de-France-Mobilité pour une commande importante. Un premier pas vers votre objectif?
BB : En effet, nous avons remporté récemment un marché portant sur 22 autobus Urbino 12 hydrogène, livrables en 2025 pour une mise en exploitation en septembre, avec une option complémentaire de 25 bus pour 2026. Il est évident que ces véhicules seront pour nous une vitrine de notre savoir-faire, d’autant que nous voulons clairement nous inscrire avec IDFM dans la durée.
Retrouvez en VIDEO notre entretien complet avec Brice Bonavia, sur Car & Bus News TV !
par Pierre Cossard | Avr 18, 2024 | Autobus, Autocar, Entreprise, Les dossiers
Daimler Buses France était en 2023, avec ses marques Mercedes-Benz et Setra, deuxième sur le podium des constructeurs de cars et bus en volume d’immatriculations. Quelle vision d’avenir l’industriel développe-t-il en ce début de printemps 2024 ? Entretien croisé avec Henri Paccalin, CEO de Daimler Buses France ; Malina Marjanovic, directrice commerciale Autocars-Minicars Mercedes-Benz et Setra ; et Matthieu Beyt, directeur commercial Autobus-Grands Comptes Mercedes-Benz et Setra.
Car & Bus News : Concernant le marché des autocars, en quoi les résultats de l’année 2023 éclairent-ils les perspectives 2024 pour vos marques ?
Malina Marjanovic : Le marché français des véhicules de tourisme a été de l’ordre de 600 immatriculations l’année passée, et nous nous attendons à un retour à la normale dès cette année, avec, pour nous, une part de marché de l’ordre de 30%. Dans ce cadre, nous constatons aujourd’hui un regain d’intérêt pour les modèles Premium, car le tourisme de groupe retrouve des couleurs et beaucoup de nos clients n’arrivent pas aujourd’hui à répondre à toutes les sollicitations. C’est dans cette logique que nous constatons une remontée des immatriculations de notre marque Setra avec une soixantaine d’immatriculations de véhicules qui sont tous désormais, rappelons-le, des autocars purement dédiés au tourisme. Enfin, cette année, nous devrions aussi bénéficier d’une forte demande de renouvellement, liée par exemple aux Jeux Olympiques, et nous en sommes même à espérer le niveau de vente pré-Covid.

Malina Marjanovic, directrice commerciale Autocars-Minicars Mercedes-Benz et Setra.
CBN : Quels sont les modèles les plus demandés ?
Malina Marjanovic : Notre modèle le plus vendu est le Tourismo 13m en trois essieux, suivi du petit Setra S 511. Nous notons aussi un retour en grâce des double-étages, avec tout de même une quinzaine de commandes à ce jour.
CBN : Quelle est votre position sur le marché des autocars interurbains ?
Matthieu Beyt : Le marché français des autocars interurbains s’est montré remarquablement stable avec quelque 3000 véhicules vendus en 2023, et il devrait le rester cette année. Si nous constatons une pénétration du GNV dans ce secteur avec quelque 20% des ventes en 2023 (une motorisation qui n’est pas dans la gamme Daimler, NDLR), nous concernant, les ventes et commandes d’Intouro se répartissent très équitablement entre les modèles diesel et hybrides. Face à la vive concurrence sur ce marché, notre véhicule reste relativement cher, mais possède de nombreux arguments comme le fait que notre motorisation diesel accepte tous les carburants alternatifs, ou que la carte grise hybride permet aux opérateurs de faire valoir leur engagement dans la transition écologique.
CBN : En matière de plan-produits, à quelles nouveautés la clientèle de Daimler peut-elle s’attendre dans les années qui viennent pour le marché des autocars ?
Malina Marjanovic : Nous sommes bien entendu fin prêts pour la mise en œuvre prochaine de la réglementation européenne GSR 2 dès juillet 2024. Ensuite, nous présenterons courant 2025 un autocar interurbain électrique à batteries, un « e-Intouro », dont les premières livraisons devraient avoir lieu en 2026.
CBN : Dernier point peut-être concernant le secteur des autocars, qu’en est-il du marché des véhicules d’occasion ?
Malina Marjanovic : Concernant le marché des VO, il est clairement tendu, car la demande est aujourd’hui exponentielle. Nous sommes donc plutôt en recherche de véhicules, et nos parcs VO sont effectivement peu fournis.
CBN : Enfin, avez-vous constaté des difficultés de financement chez vos clients, comme certains pouvaient le craindre après la crise Covid ?
Henri Paccalin : Nous n’avons pas rencontré une telle problématique, notamment au niveau de notre filiale de financement, qui ne travaille, rappelons-le, que sur les véhicules neufs. Par ailleurs, en tant que président de la CIAM, je viens d’apprendre que le gouvernement venait de décider de maintenir l’enveloppe de 130 M€ promise fin 2023, avec le maintien de l’appel à projets afférant et le retour du bonus pour l’électrification.

Matthieu Beyt, directeur commercial Autobus-Grands Comptes Mercedes-Benz et Setra.
CBN : Concernant le marché urbain, quel constat tirez-vous des résultats 2023 ?
Matthieu Beyt : Ce marché s’est montré l’an dernier lui aussi particulièrement stable avec environ 1600 véhicules immatriculés. En revanche, nous avons constaté que 55% des imatriculations en question a concerné des autobus fonctionnant au GNV, une motorisation que nous ne possédons pas dans notre gamme. Pour le reste donc, Mercedes-Benz a vendu 237 véhicules, dont 30 e-Citaro. On peut donc dire que deux autobus diesel vendus en France en 2023 ont été des Citaro. Concernant 2024, nous estimons que le marché devrait conserver cette stabilité, avec toutefois un léger rattrapage en matière d’immatriculations d’autobus électriques, rattrapage qui viendra compenser un certain nombre de retards de livraisons accumulés chez la plupart des industriels. Quoi qu’il en soit, nous pensons aussi que le marché français de l’urbain à venir restera encore marqué par la présence du GNV.
CBN : Quelle est la position de Mercedes-Benz sur le marché de l’hydrogène, puisque vous avez désormais un e-Citaro H2 dans votre catalogue ?
Matthieu Beyt : L’hydrogène reste à ce jour soumis à des coûts encore prohibitifs. Concernant notre e-Citaro H2, nous étions confrontés à un cas d’usage qui demandait une amélioration d’autonomie, d’où notre choix d’un prolongateur. Quant au surcoût d’un tel modèle, il est encore difficile de le déterminer, même si, sur d’autres marchés européens, nous sommes ressortis un peu moins chers certains de nos concurrents. Reste que ce marché est pour l’essentiel le fruit d’une volonté politique et que de nombreuses questions se posent encore.
CBN : Pour le marché urbain, quel sera votre plan-produits pour les années à venir, et Mercedes-Benz est-il référencé par les centrales d’achats ?
Matthieu Beyt : Concernant nos véhicules électriques à batteries, nous introduirons en 2026 les packs NMC de 4e génération, qui apportent des gains de densité et donc d’autonomie. Enfin, nous sommes actuellement référencés par l’UGAP pour nos modèles diesel, hydrogène et pour le e-Citaro de 18 m. Par ailleurs, nous répondons actuellement à l’appel d’offres lancé par la CATP concernant l’électrique.
CBN : Dernier point, votre usine française de Ligny-en-Barrois devrait occuper une place plus importante dans la stratégie de production de Daimler Buses, qu’en est-il exactement ?
Henri Paccalin : Pour rappel, notre usine de la Meuse emploie aujourd’hui quelque 1200 personnes et a produit 1845 véhicules en 2023. Elle fait l’objet d’un programme d’extension qui court sur la période 2024-2026 afin qu’elle devienne la première d’Europe consacrée à la production de véhicules électriques, en l’occurrence le e-Citaro. Nous devrions pouvoir dépasser les 2000 véhicules produits dans les prochains mois.