Interview. Solaris, l’outsider qui monte !

Interview. Solaris, l’outsider qui monte !

Le constructeur polonais Solaris Bus & Coach, filiale de CAF, et qui ne produit à ce jour que des véhicules destinés aux réseaux de transports publics urbains, est omniprésent sur le marché européen des autobus. Un peu moins représenté dans les réseaux français, il escompte bien remédier à cet état de fait dans les mois et années à venir. Entretien avec Brice Bonavia, gérant de Solaris France.

 

Car & Bus News : Pouvez-vous, en quelques phrases, présenter Solaris Bus & Coach ?

Brice Bonavia : Solaris est un constructeur polonais, filiale du spécialiste espagnol du ferroviaire CAF. Nous produisons quelque 1500 véhicules chaque année, ce qui représente 27% du chiffre d’affaire réalisé par le groupe CAF. Nous sommes le troisième acteur européen sur les marchés des bus urbains, avec tous les types de motorisation disponibles. Nous sommes aussi le premier producteur européen de véhicules zéro émission. A titre indicatif, nous avons aujourd’hui dans nos carnets de commandes, à l’échelle du groupe, rien moins que 600 véhicules fonctionnant à l’hydrogène, en 12 et 18 m. Enfin, nous travaillons actuellement pour que notre usine de Poznan puisse atteindre une capacité de production de 2000 unités à l’horizon 2027.

 

CBN : Quels sont les marchés européens sur lesquels Solaris est aujourd’hui le mieux placé ?

BB : En Europe, nous sommes aujourd’hui leaders sur les marchés polonais, espagnols et bientôt italiens, où nous avons enregistré rien moins que 1200 commandes à ce jour.

 

CBN : Comment expliquez-vous la position relativement modeste de Solaris Bus sur le marché français ?
BB :
Dans l’Hexagone, nous n’avons effectivement pas la place qui devrait être la nôtre. Notre objectif est donc d’atteindre et de pérenniser à termes quelque 150 immatriculations chaque année. Nous appuyons notre démarche sur la fiabilité de nos autobus, déjà reconnue un peu partout, et sur un accompagnement permanent de nos clients, notamment à travers les contrats de « full maintenance » qui sont désormais presque devenus la norme dans les pays où nous sommes bien implantés. Par ailleurs, nous sommes désormais référencés à l’UGAP, à la CATP, qui représentent à elles deux pas moins de 85% du marché, et auprès des grands groupes de transport de France, qui commandent en direct entre 150 et 200 autobus chaque année. Un ensemble de référencements qui devrait fort logiquement nous ouvrir des marchés.

 

CBN : Vous venez d’ailleurs d’être sélectionnés par Ile-de-France-Mobilité pour une commande importante. Un premier pas vers votre objectif?

BB : En effet, nous avons remporté récemment un marché portant sur 22 autobus Urbino 12 hydrogène, livrables en 2025 pour une mise en exploitation en septembre, avec une option complémentaire de 25 bus pour 2026. Il est évident que ces véhicules seront pour nous une vitrine de notre savoir-faire, d’autant que nous voulons clairement nous inscrire avec IDFM dans la durée.

 

Retrouvez en VIDEO notre entretien complet avec Brice Bonavia, sur Car & Bus News TV !

Gares routières : les changements attendus

Gares routières : les changements attendus

Alors que les cars express ont le vent en poupe et que les cars « Macron » sont bien installés dans le paysage, qu’en est-il des gares routières ? Car & Bus News se penche sur cet important aspect des services d’autocars.

 

Pour pouvoir utiliser un réseau, il faut un point d’accès au dit réseau. Les autocars n’échappent pas à la règle, et pour pouvoir accueillir et laisser leurs voyageurs, ils s’arrêtent dans des gares routières. Selon les derniers chiffres de l’Autorité de Régulation des Transports (ART), le régulateur du secteur, en 2021, 230 aménagements qualifiés de gares routières sont desservis par les six acteurs des autocars en Service Librement Organisés (SLO). Le leader de ce marché, Flixbus, dessert quant à lui 250 destinations en 2023, représentant autant de gares routières.

 

Gare routière de La Défense.

 

Leur typologie s’étend de la gare routière autonome et dédiée (telle celles de Bercy et La Défense) au bout de trottoir situé « au milieu de nulle part » en passant par un quai dédié dans une gare routière accolée à une gare ferroviaire, faisant de l’ensemble un Pôle d’Echanges Multimodal (PEM).

 

Le modèle économique des gares routières

 

La propriété de ces installations est très variable. Elles peuvent appartenir à des municipalités, des opérateurs gestionnaires de parkings ou des filiales de gestionnaires d’infrastructures (notamment SNCF Gares & Connexions ou dans les aéroports). Dans tous les cas, les opérateurs doivent payer un péage à chaque « toucher de quai ». En l’absence de grille étatique de normalisation, les montants payés sont très variables et dépendent de chaque gestionnaire de site, amenant à un prix variable pour chaque arrêt. Selon des chiffres publiés par l’ART dans son rapport d’activité 2020, sur un échantillon de 43 gares, les tarifs des touchers de quais sont compris dans une fourchette de prix s’étendant de 0,60€ à 13,24€. Flixbus complète en indiquant que la fourchette de toucher de quais qu’il doit payer s’étend de 0€ à 15€. A noter que les aménagements exploités par SNCF Gares & Connexions sont désormais accessibles gratuitement et sans réservation, à l’exception de quelques gares.

 

Gare routière de Moulins sur Allier.

 

En tant que régulateur du secteur, l’ART suit ce sujet avec attention. Elle a établi depuis 2016 le registre public des gares routières, qui comporte 336 équipements. Les exploitants des gares desservies par les SLO doivent notifier dans ce registre leur équipement. Seuls ceux « exclusivement réservés aux transports scolaires et ceux consistant en un ou plusieurs emplacements d’arrêt sur la chaussée, et/ou en évitement et destinés aux seuls services de transport conventionnés urbains ou scolaires en application d’un arrêté de police de la circulation et du stationnement » sont exemptés de ce registre.

 

Outre la localisation proprement dite, un exploitant doit être mentionné, et les règles d’utilisation doivent être mentionnées, notamment sur les modalités d’accès à l’équipement et les tarifs des touchers de quais. Celles-ci doivent être objectives (les tarifs devant refléter les coûts du service fourni), transparentes et non discriminatoires. Les dernières données disponibles (1er janvier 2023) indiquent que sur les 128 règles d’accès qui avaient été notifiées à l’ART, plus de 80% ont été jugées conformes à ces principes. L’ART organise régulièrement les Rencontres des gares routières (la dernière ayant eu lieu en 2022) et exerce de façon répétée des contrôles sur la soutenabilité des tarifs.

 

En 2019, l’ART avait notamment réglé le différend entre Flixbus et Transdev Mont-St-Michel sur le prix de l’accès à la poche P7 du parking du Mont-St-Michel. Le tarif était de 23€ TTC en basse saison et de 30€ TTC en haute saison. Après étude, l’ART a enjoint l’opérateur de fixer le tarif du toucher de quai à 11,44€. Un second exemple concerne l’aéroport de Paris-Beauvais. Les investigations des services de l’ART ont conduit celle-ci l’exploitant de la gare routière à baisser le niveau du tarif du toucher de quai (accès au quai de dépose et de prise en charge des voyageurs sur une durée prédéfinie). De 50 euros, le gestionnaire de l’aéroport a établi, dans ses nouvelles règles d’accès, un toucher de quai à 19,90€, soit une diminution du prix de près de 50%.

 

Les attentes envers les gares routières

 

L’ensemble des acteurs a cependant de fortes attentes concernant les gares routières. L’ART, qui a déjà publié un guide pédagogique à l’attention des exploitants d’un aménagement de transport routier indique que « des publications sont à venir », sans en dire plus. Flixbus a également de fortes attentes. L’opérateur rappelle qu’en fin d’année 2023, il a cosigné une tribune avec plusieurs acteurs du marché appelant à la mise en œuvre d’un plan national ambitieux en faveur des gares routières. Les acteurs (dont Flixbus) réclament ainsi que les gares routières situées dans les villes importantes soient bien situées et facilement accessibles, pour offrir une bonne intermodalité.

 

La qualité de service doit aussi pouvoir être garantie, avec les services minimums que les voyageurs attendent : abris de quais (pour éviter d’attendre sous la pluie), des services tels que des sanitaires, des espaces d’attente sécurisés, des systèmes d’information voyageurs indiquant le quai de départ ou d’arrivée, les retards pouvant survenir sur les courses ainsi que des espaces de restauration. D’une manière générale, Flixbus attend que les clients soient accueillis dans de bonnes conditions, mais aussi les équipes d’exploitation.

 

L’ART a également dressé le constat que la qualité de service dans les gares est de moindre qualité que dans les pays voisins, en comparant les gares de Paris-Bercy (dont on rappelle qu’elle sera fermée par son exploitant la Ville de Paris à l’automne 2024) aux gares de Victoria Coach station (à Londres) et Estacio Sud (à Madrid). Ces deux dernières gares sont bien mieux connectées et offrent une multitude de services comparé à la gare routière de Bercy. Quoi qu’il en soit, les auteurs de la tribune estiment que le plan proposé pourrait être financé en partie par l’enveloppe prévue pour les nouveaux projets routiers, soit 600 à 700 M€, qui seraient ainsidévolue au futur plan gares routières.

 

Une gare routière typiquement couplée à la gare SNCF locale.

 

Les gares doivent être adapté à l’accueil des véhicules dans de bonnes conditions et répondre aux contraintes de la profession. Des gares avec suffisamment de quais, de points de remisage et équipées d’installations de dépotage (notamment pour la vidange des toilettes et l’entretien des moteurs) doivent être présentes. En sus, des zones de repos pour les conducteurs entre deux courses doivent également être intégrées.

 

Flixbus déplore par exemple que lorsque le point d’arrêt est situé sur un bout de trottoir peu adapté aux contraintes d’exploitation et non encadré, il est de fait non sécurisé. Lors du chargement des bagages, les conducteurs ouvrent généralement les soutes des deux côtés du car. A cette occasion, des individus malfaisants peuvent en profiter pour dérober les bagages des voyageurs… Afin de rassurer les voyageurs, Flixbus a donc dû donner consigne à ses conducteurs de n’ouvrir que du côté d’embarquement des passagers. Des gares routières sécurisés sont de fait, et dans un premier temps, une attente forte de l’ensemble des acteurs.

 

Quoi qu’il en soit, cette thématique des gares routières est un item majeur de l’activité des autocars, notamment pour les services librement organisés, qui va encore connaître des évolutions. Affaire à suivre…

 

 

L’Anateep se penche sur les incivilités dans les transports scolaires

L’Anateep se penche sur les incivilités dans les transports scolaires

L’Association nationale pour les transports éducatifs de l’enseignement public (Anateep) a organisé le 25 janvier à Paris, son Séminaire national consacré cette année au sujet suivant : « Incivilités, conflits, harcèlement dans les transports de scolaires : que peut-on faire ? ».

 

Alors que la lutte contre le harcèlement scolaire est devenue une des priorités gouvernementales, l’Anateep a donc tenté, lors de son Séminaire national, de cerner la problématique de ce phénomène dans les transports scolaires.

 

Trois ateliers ont permis à différents acteurs ou experts de présenter leur expérience en la matière, l’idée étant d’en retirer une éventuelle ligne de conduite pour l’ensemble du secteur. Premier constat, de taille, tous les intervenants conviennent manquer de données fiables.

 

Selon Nadia Smondel, directrice Marketing, Etudes et QS, RATP Dev, « il est très complexe de détecter le harcèlement dans les transports, ne serait-ce que parce que le conducteur, seul adulte à bord, est de fait concentré sur sa conduite ». La responsable estime toutefois que, même si seulement une victime sur dix fait un signalement, il y aurait trois fois plus d’intimidations verbales que d’actes violents, et ce le plus souvent à l’arrêt.

 

Selon Nadia Smondel, le sentiment de harcèlement serait partagé par environ 20% des élèves transportés. Un chiffre non négligeable, et bien plus important que celui annoncé par Jean-Pierre Félix, Mission « Prévention des violences en milieu scolaire », DGESCO, Ministère de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports, qui l’estime à plus ou moins 7%.

 

Pour faire face, RATP Dev a mis en œuvre un module de formation pour ses agents, une campagne de sensibilisation des élèves de CM2, etc.

 

Pour Noémie Loureiro, directrice de Transdev Marne et Ourcq, à Meaux (un secteur plutôt urbanisé), passé un travail de sensibilisation auprès des élèves sur l’ensemble du territoire concerné, le recours à un programme de formation mis en place avec les formateurs de la Police Nationale porte ses fruits. « La présence de l’uniforme joue son rôle », explique-t-elle.

 

Concrètement, les conducteurs reçoivent une formation aux droits et devoirs de leur poste dans les locaux de la Police, un cours de self-défense et procèdent à des exercices dans les véhicules et les dépôts.

 

Tous les intervenants militent aussi pour le développement de la vidéo-surveillance qui, lorsqu’elle est mise en œuvre, représente un véritable facteur d’apaisement.

 

Du côté des autorités organisatrices, Michel Sauvage, directeur du transport routier de voyageurs de la Région Grand Est, met en avant la mise en place dans sa région (qui transporte chaque jour 186 700 élèves) du dispositif pHARe.

 

Celui-ci s’appuie sur un triptyque : la formation du personnel, la formation d’élèves « ambassadeurs » et la création de protocoles dans chaque établissement.

 

Parallèlement, la région lancera dès avril une campagne de communication autour d’un numéro d’appel dédié au harcèlement dans les transports scolaires. En substance, ce dernier sera affiché dans les autocars, sur les fiches horaires et sur la carte de transport individuelle des élèves.

 

Par ailleurs, un concours baptisé « non au harcèlement » sera organisé auprès des lycéens et collégiens, qui devront réaliser un clip sur le sujet.

 

Michel Sauvage conclura toutefois sur une vision de bon sens : « attention toutefois de ne pas stigmatiser l’autocar scolaire comme un lieu de harcèlement… ».

Transports collectifs, quel bilan pour 2023 ?

Transports collectifs, quel bilan pour 2023 ?

De quoi cette année 2023 qui se termine sera-t-elle synonyme dans l’esprit des différents acteurs du transport collectif ? Pas simple de dresser un bilan pour ce secteur complexe. Plusieurs indicateurs et témoignages peuvent cependant permettre de dresser un tableau intéressant des évolutions de cette activité.

 

Premier indicateur peut-être, qui se doit d’être mis en lumière, celui du parc de véhicules en exploitation, généralement révélateur de la bonne santé d’un secteur. Le service statistique des ministères en charge du logement, des transports, de l’énergie, de l’environnement, du climat et du développement durable (SDES) vient justement de publier les dernières données connues concernant le parc des autocars et autobus en circulation sur le territoire français. Si ces données désormais disponibles ne datent que du 1er janvier 2023, elles fournissent tout de même un tableau révélateur.

A cette date, 66 200 autocars et 27 800 autobus sont donc en circulation en France. La quasi-totalité des autocars, soit 96,8%, disposent d’une motorisation diesel thermique. Le GNV arrive en deuxième position des motorisations utilisées avec 2,8% des immatriculations, l’électrique (toujours très peu présent dans les catalogues des industriels) ne représentant que 132 unités répertoriées.

 

 

Même si la motorisation diesel reste encore largement majoritaire pour les autobus (65,3%), la progression des motorisations alternatives, au gaz, électrique ou avec une bi-motorisation électrique, est significative. Selon le SDES, la part du diesel thermique a reculé de 4,9 points entre le 1ᵉʳ janvier 2022 et le 1ᵉʳ janvier 2023, essentiellement au profit des véhicules au gaz (+2,2 points) et électriques (+1,8 point). Autre point significatif, cette fois quant à l’âge moyen du parc, le SDES relève que la norme d’émissions de polluants Euro VI, mise en place en janvier 2014, est désormais la plus répandue au sein du parc des autocars (60,7%) et des autobus (56,3%). Toutefois, 15,3% des autocars en circulation et 17,5% des autobus répondent encore à une norme d’émissions inférieure ou égale à 4. Dernier fait révélateur issu de ces statistiques en matière d’immatriculations, depuis 2011, le parc total des autobus s’est accru de 39,6% tandis que celui des autocars n’a progressé que de 4,3%.

Pour cette année 2023 qui s’achève et donne une tendance, les chiffres d’immatriculations récemment publiés révèlent que 5 200 véhicules de transport de personnes ont été enregistrés à fin novembre, soit une hausse de 6,2% par rapport à la même période en 2022.

Concernant les marques, assez classiquement, Iveco Bus reste leader du marché français avec 2 631 immatriculés en comptant Heuliez Bus, Daimler Bus arrive en deuxième position avec 1093 véhicules (1 057 Mercedes, 36 Setra), et MAN est troisième avec 502 véhicules. Viennent ensuite Temsa (185), Otokar (157) et Scania (132).

 

Activité en hausse pour le bus, pas vraiment pour l’autocar

 

Toujours selon les données du SDES, les distances parcourues par les transports en commun de personnes sont en hausse de 9,9% en 2022. Le parcours annuel moyen des autobus est resté stable à 39 000 km/an, tandis que celui des autocars a progressé de 14,9% en un an, s’établissant à 28 800 km/an. Ainsi, de 2011 à 2022, les distances parcourues par les véhicules de transport de voyageurs augmentent-elles globalement de 6,4%, tirées par la progression de celles des autobus (+36,8%). Malgré une tendance à la hausse jusqu’en 2019, les distances parcourues par les autocars, plus fortement et durablement affectés par les restrictions de déplacement pendant la crise sanitaire, diminuent de 5,5% sur la même période. En 2022, elles n’ont toujours pas retrouvé leur niveau d’avant-crise (-7% par rapport à 2019), preuve sans doute, qu’à cette date, le tourisme en autocar notamment, n’avait pas retrouvé ses couleurs, ou/et que la crise de recrutement des conducteurs vécue par ce métier impacte le volume des services réellement effectués, notamment en transport scolaire. Les distances parcourues par les autobus dépassent, quant à elles, de 8,6% leur niveau d’avant-crise, preuve cette fois des efforts consentis par les autorités organisatrices de mobilités (et des réseaux) pour augmenter l’offre de transports collectifs, peut-être dans le cadre d’une stratégie assumée de renforcement du report modale.

 

L’autocar, entre chaud et froid…

 

Au chapitre des bonnes nouvelles de l’année concernant le secteur des transports routiers de voyageurs, l’observateur attentif aura remarqué une baisse de la pression des problèmes de recrutement sur l’activité. A la dernière rentrée scolaire, il ne manquait « que » 4000 conducteurs dans ce secteur, une amélioration par rapport à 2022, où l’on notait 2000 absents de plus. Pour autant, de nombreux services scolaires ont été réduits ou n’ont pu être effectués cette année et, l’an prochain, il sera sans doute nécessaire de poursuivre les efforts avec, toutefois quelques raisons d’être optimistes. D’un côté, toutes les entreprises se mobilisent à grande échelle (avec les coûts afférents à ces politiques de recrutement…), l’AFTRAL forme de plus en plus, l’âge d’obtention du permis a été abaissé, et de l’autre, des discussions se sont ouvertes avec l’Education Nationale pour réfléchir aux principes de ré-enchaînement des services, etc. Restera à régler le problème des délais d’obtention des documents administratifs, toujours trop longs. Un sujet largement évoqué lors du congrès de la FNTV du 15 novembre dernier.

 

Satra, marque emblématique du groupe Daimler dans l’univers de l’autocar de tourisme, revient dans le tableau des immatriculations, après de longs mois de vaches maigres à la suite de la crise Covid.

 

Autre point positif pour le secteur du transport routier de voyageurs, la bonne santé des services librement organisés (SLO), relevée par le dernier rapport de l’Observatoire Prospectif des métiers et des qualifications dans les Transports et la Logistique (OPTL), présenté le 18 décembre dernier, et portant sur l’année 2022 lui aussi.

Selon l’OPTL donc, après deux années marquées par la crise sanitaire liée à la pandémie, la reprise débutée en 2021 s’est intensifiée en 2022. Le trafic en autocars augmente de 77% en un an, mais n’a toutefois pas encore complètement retrouvé son niveau de 2019. Du fait d’une demande dynamique, en dépit d’une reprise timide de l’offre, le taux d’occupation a atteint un niveau supérieur à celui d’avant la crise (66 à 75% au troisième trimestre contre 63 à 72% en 2019), permettant au chiffre d’affaires du SLO de se situer au moins au même niveau qu’en 2019 (entre 130 et 155 M€ en 2022 contre 132 à 147 M€ en 2019).

Enfin, autre raison de voir l’avenir avec une certaine sérénité lorsqu’on est autocariste : le retour du tourisme en autocar. A condition toutefois que les entreprises aient conservé cette activité dans leur portefeuille pendant la crise Covid. Selon les observateurs les mieux placés, la tendance à la hausse de l’activité touristique varie selon les régions entre 15 et 30% par rapport à l’année de référence qu’aura été 2019. Une tendance à la hausse donc, qui se caractérise toutefois par l’e développement remarqué de ce que d’aucuns nomment le transport occasionnel, à contrario des séjours (longue distance notamment) qui n’ont pas encore retrouvé leur niveau d’antan.

« Les séjours linguistiques ou la réception des touristes asiatiques sont par exemple en diminution, constate ainsi Alexandre Delvallez, directeur général de Réunir. En revanche, nous avons pu constater cette année un retour des touristes américains et européens ». Dans cette logique de retour de la croissance, les entreprises concernées, de fait moins nombreuses aujourd’hui, se sont positionnées dans une logique de marché, ce qui, toujours selon Alexandre Delvallez, leur permet d’établir une grille de prix plus juste, et donc de consolider leurs marges.

Bien entendu, cette activité pâtit elle aussi des problèmes de pénurie de conducteurs qui sévit dans tout le transport routier de voyageurs, mais aussi des délais de livraison de nouveaux véhicules. De nombreuses commandes d’autocars de tourisme enregistrées cette années sont par exemple prévues à la livraison pour 2025… Une situation qui pénalise clairement les opérateurs dans leur volonté de renouvellement du parc. Mais ils qui aussi à définir correctement le prix de leurs prestations, ce qui ne permet pas à leurs clients d’avoir une claire visibilité. Pour autant, l’année qui vient devrait être encore marquée par des records dans ce secteur (congrès, commémorations et, bien sûr, JO), avant une forme de retour à la normale.

 

Vers un imbroglio réglementaire européen ?

 

Au chapitre des éléments inquiétants pour ce métier reste le problème posé par la transition énergétique du secteur. Si la profession autocariste milite (comme presque tous les acteurs du transport collectif) pour un mix-énergétique incorporant notamment le diesel ou le gaz, à condition qu’ils soient « bio » à termes, l’Etat (sauf peut-être, le ministre des Transports Clément Beaune) campe encore sur la position européenne clairement orientée vers le tout électrique, notamment à travers le règlement CO2Transports adopté le 21 novembre dernier. « Concernant notre profession, constate à cet égard Jean-Sébastien Barrault, président de la FNTV, les textes européens restent pour nous inquiétants, car le tout électrique est pour nous impossible. Nous aurons sur ce sujet délicat besoin d’un vrai soutien économique des pouvoirs publics, ainsi que d’une feuille de route claire et réaliste… ». En ce sens, on notera les interrogations qui existent encore sur la pertinence du concept de rétrofit (électrique ou hydrogène) appliqué aux autocars. Une nouvelle possibilité de « verdissement » des flottes existantes dont on mesure encore mal l’ampleur et les implications sur l’évolution des entreprises.

 

Un autocar Yutong électrique, longtemps seul autocar de ce type sur le marché français.

 

Autre point réglementaire qui ajoute à l’inquiétude ambiante, la proposition CountEmissions EU qui a été présentée par la Commission européenne plus tôt cette année dans le cadre du Greening Freight Package. Ce nouveau règlement viserait à mettre en œuvre un cadre commun européen pour le calcul et la divulgation des émissions de GES (gaz à effet de serre) provenant des services de transport de passagers et de marchandises. Le Conseil a soutenu l’approche de la Commission et a aligné la proposition CountEmissions EU sur la norme ISO 14083 qui est déjà utilisée et fournit une méthodologie pour calculer et divulguer les émissions de GES en utilisant une approche du puits à la roue.

Le Conseil souhaiterait que les « grands opérateurs de transport » soient obligés de comptabiliser leurs émissions pour leurs opérations nationales sur la base de l’activité de leur flotte et de leurs opérations réelles. Elles doivent déjà déclarer leurs émissions conformément à la directive européenne sur les rapports sur le développement durable (CSRD). Un des problèmes identifiés est que pour le CountEmissions EU, le Conseil n’utilise pas comme définition d’une « grande entreprise » celle utilisée dans le CSRD, d’où un manque de cohérence possible. Le Conseil oblige également la Commission européenne à fournir un outil en ligne pour calculer les émissions de GES. Restera à définir la nature du traitement des sous-traitants, pas toujours à même de fournir ce type de données (un point fondamental pour le secteur des voyageurs). Par ailleurs, la vérification des données de sortie est aussi un élément supplémentaire qui n’a pas été correctement pris en compte. Une fois que les opérateurs auront calculé leurs émissions de GES, celles-ci devront en effet être vérifiées par un organisme d’évaluation de la conformité pour garantir qu’elles répondent aux exigences. Or, les règles de vérification n’ont pas encore été précisément définies…

Enfin, telle une épée de Damoclès toujours suspendue au-dessus de la tête des opérateurs du TRV, reste le problème posé par les ZFE (zones à faible émission), voire les ZTL (zone à trafic limité) comme à Paris, dont les conditions de mise en œuvre sont désormais du ressort des collectivités concernées (cinq métropoles françaises sont aujourd’hui confrontées à cette obligation). Si les opérateurs ont évité une mesure couperet à l’échelle nationale, ils sont maintenant confrontés à la disparité des stratégies locales mise en œuvre, avec tout ce que cette situation comporte d’insécurité lorsqu’il s’agit d’organiser un service de transport, notamment touristique…

 

Une situation économique fragile

 

Une situation réglementaire instable qui s’ajoute à une situation économique fragile, notamment parce que la réalité des entreprises face, par exemple, à la nécessité de rembourser les PGE (prêts garantis par l’Etat) contractés pendant la crise Covid est particulièrement contrastée. Ainsi en est-il aussi de l’inflation des coûts régulièrement pointée du doigt par le Conseil National Routier (CNR). A titre d’exemple, après avoir progressé de +7,3% en moyenne annuelle sur 2022, le coût de revient total d’un autocar scolaire a enregistré une inflation de +5,3% en 2023. Depuis deux ans, l’augmentation des coûts atteint donc +13%. Parmi les facteurs explicatifs de ces hausses, le CNR met en lumière le poste conducteur, composante prépondérante, qui enregistre une inflation de +15,8% depuis deux ans (+12,4% sur la seule année 2023). Le CNR constate en revanche que le chiffre d’affaires des entreprises du transport routier de voyageurs (transport régulier et à la demande) se redresse progressivement au cours du premier semestre 2023 pour retrouver son niveau d’avant crise Covid, et ce malgré la pénurie persistante de conducteurs.

Ajoutez à cela le renchérissement des coûts du crédit et… les délais de livraison des véhicules qui se sont fortement rallongés, et vous avez là un cocktail qui complique singulièrement la gestion d’une entreprise du TRV.

Heureusement peut-être, les AOM semblent jouer le jeu, notamment face aux demandes de la profession. Outre leur présence aux côtés des entreprises pendant la crise sanitaire, elles ont globalement modifié positivement l’indexation, tandis que les aspects qualitatifs prennent plus d’importance dans les critères d’attribution des contrats, eux-mêmes d’une durée généralement plus longue que précédemment. « En ce qui concerne cet aspect de l’activité de nos entreprises, les conditions s’améliorent, conclut Jean-Sébastien Barrault, et nous pouvons aussi compter sur l’écoute du ministre des Transports ».

 

La livrée des futurs Cars express d’IDFM.

 

Enfin, en termes d’image comme de nouveaux marchés potentiels, l’autocar aura, en cette fin 2023, retrouvé des lettres de noblesse à travers par exemple le projet francilien de lignes de Car express (45 nouvelles lignes express, complétée par le renfort à court terme de 9 lignes déjà existantes, soit un total de 200 nouveaux véhicules à mettre en service) dont la mise en œuvre sera certainement scrutée avec attention dans tout l’Hexagone.

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Le transport urbain sous pression

 

Si les acteurs du TRV sont, pour certains, confrontés au « mur de la dette », les transports publics urbains semblent eux confrontés à un véritable mur de l’investissement. En cause : la transition énergétique et le développement du report modal. Comme le révèlent les chiffres du parc d’autobus français évoqué précédemment, le verdissement des flottes de bus, fort d’une offre industrielle aujourd’hui abondante et très diversifiée, est désormais bien avancée. Pour autant, le surcoût des véhicules dits propres pèse très clairement sur les finances de collectivités, confrontées qu’elles sont à des exercices budgétaires compliqués par la situation économique du moment et l’inflation.

Dans ce cadre, le temps des grands discours vantant l’avenir radieux d’une transition énergétique rapide semble plutôt (même si discrètement) mis de côté. Si l’objectif reste le même, faire du transport public le bon élève de cette transition, les limites de l’exercice sont désormais évidentes pour la majorité des responsables. D’autant que les collectivités sont aussi comptables de la mise en œuvre du Plan vélo, parfois fort dommageable pour la bonne tenue des services de bus, mais aussi de « l’accessibilité » voir de « l’inclusivité », de ces mêmes « transports du quotidien », etc. Plus que la vertu appliquée aux réseaux, sont donc plutôt mis en avant la nécessité d’un report modal massif et donc d’un choc d’offre propre à séduire les clients, les deux nouveaux « maître-mots » du secteur. Selon certains, « trop de textes s’accumulent et se superposent, au niveau de l’Union européenne comme de la France ». Tous les acteurs ont donc eux aussi besoin de visibilité à plus longs termes.

Le report récent, de 2030 à 2035, par le Conseil européen, de l’obligation d’acheter 100% de bus zéro émission est considéré avec un certain soulagement. Mais l’ensemble des professionnels du transport public martèle aussi qu’ils ont besoin d’accompagnement et de financement de la part des pouvoirs publics. Est par ailleurs pointé du doigt la volonté d’imposer à grande vitesse le seul mode électrique comme alternative écologique, alors que de nombreux experts jugent toujours le GNV, évidemment dans sa composante bio issue de la méthanisation, comme une alternative digne d’intérêt, notamment en termes d’indépendance et de développement des tissus industriels locaux… Le travail de « pédagogie » auprès des pouvoirs publics a donc commencé (peut-être un peu tardivement), comme le prouve la récente visite de Valérie Pécresse, présidente d’Ile-de-France Mobilités, sur le site Iveco Bus d’Annonay. Un événement où fut clairement mis en avant les qualités du bio-GNV comme outil économiquement viable (et fiable) de décarbonation des transports collectifs urbains. On l’aura compris, l’ensemble du secteur se réveille aujourd’hui en prônant lui aussi un réel (ou simplement réaliste ?) mix-énergétique.

 

Le Heuliez GX137L ELEC.

 

Toujours concernant ce fameux nerf de la guerre, un cri d’alarme n’aura cesser de retentir tout au long de l’année, notamment aux Rencontres Nationales du Transport Public qui se déroulaient à Clermont-Ferrand. Les AOM ont désormais compris qu’il existe un coût acceptable pour chaque prestation de transport. D’autre part, tout le monde a aussi compris que les moyens à disposition ne sont plus extensibles. « Sans aides pour faire cette transition, nous risquons d’être obligés de diminuer l’offre », menacent-ils donc régulièrement. Un résultat qui serait totalement contre-productif, puisqu’il s’agit avant tout pour les transports collectifs de séduire les automobilistes. Les acteurs réclament donc une massification de l’aide à l’achat des véhicules, du même niveau que celui appliqué aujourd’hui aux vélos ou au covoiturage… Tous s’accordent aussi sur la nécessité de sanctuariser le versement transport comme source de ressources pour le transport de voyageurs. Pour résumer, ils réclament désormais une transition « soutenable économiquement » pour les collectivités, et prônent l’adaptation de l’offre des transports publics aux besoins, aux finances et aux contraintes locales.

La question qui reste aujourd’hui en suspens est donc simple et participe d’un certain principe de réalité : n’est-il pas déjà trop tard pour que cette transition se déroule dans la douceur ? Monsieur Mezghani, de l’UITP ne disait-il pas, lors de la conférence TTDC 23 : « je préfère avoir un bus diesel sur une voie de bus plutôt qu’un bus électrique coincé dans les embouteillages. Car les gens se moquent de savoir si le bus est électrique ou diesel, polluant ou non polluant, ils veulent aller d’un point à un autre ». Une façon claire de dire que le bus est en lui-même (comme l’autocar d’ailleurs) écologiquement vertueux, qu’il soit thermique ou électrique, puisqu’il transporte une masse de passagers qui ne sera pas obligée de recourir à la voiture pour ses déplacements quotidiens.

 

Le transport public urbain, terrain d’expérimentation

 

Comme le démontrent depuis quelques années les différents salons dans lesquels les industriels du transport collectif mettent en valeur leur production d’autobus, c’est en effet dans ce secteur d’activité que les nouvelles énergies trouvent leur meilleur terrain de développement et d’expérimentation, réglementation européenne et subventions massives obligent. Ce sont donc bien les autobus qui ont été les premiers à avoir été proposés en GNV, mais aussi en version électrique à batteries, et désormais à l’hydrogène. Là encore, les chiffres du SDES évoqués plus haut sont révélateurs. Au 1er janvier 2023, presque 5000 bus fonctionnaient au GNV, presque 2000 étaient à propulsion électrique, et 27 fonctionnaient à l’hydrogène. La transition énergétique des transports collectifs urbains est donc bien en marche, voire même très avancée. En creux, et compte tenu de la durée de vie de ces matériels, du surcoût important des nouvelles technologies, de la raréfaction des ressources des collectivités et des nécessaires investissements massifs qu’ils impliquent dans les infrastructures ad-hoc, on mesure que le chemin qui mènera au zéro émission risque d’être encore long, peut-être même au-delà de la date de 2050 professée par l’UE et tant d’autres… Très concrètement, en dehors des grandes (et riches) agglomérations, les alternatives au thermique restent encore plus ou moins réservées à des lignes « emblématiques », souvent qualifiées de « structurantes ». Il en va clairement ainsi de l’hydrogène, le plus coûteux aujourd’hui, qui reste plus ou moins encore à l’état d’expérimentation.

 

Le Solaris Urbino 18 H2 a fait son entrée sur le marché européen cette année.

 

Le cas de la communauté d’agglo Pau Béarn Pyrénées est exemplaire en ce sens. Le réseau Fébus de Pau faisait en 2019 figure de pionnier en matière d’hydrogène, puisqu’il avait mis cette année-là en service 8 autobus BHNS Van Hool H2, complétés ensuite par 4 véhicules supplémentaires, eux aussi fournis par le constructeur belge. Si ces véhicules semblent avoir donné globalement satisfaction, confrontée en cette fin d’année à une baisse significative des subventions en provenance de l’Etat français et de l’UE, et à un coût de production élevé de l’hydrogène vert nécessaire au fonctionnement « vertueux » de ces véhicules, l’agglomération a fait le choix d’orienter ses futurs achats de bus standards vers l’électrique à batteries, moins onéreux.

 

Le e-Jest de Karsan, distribué par HCI.

 

Dans une autre logique d’adaptation aux réalités économiques, l’observateur attentif ne peut que remarquer l’augmentation des commandes de minibus et midibus, majoritairement électriques. Les catalogues des industriels s’enrichissent donc au rythme des demandes de collectivités, généralement de taille moyenne, qui trouvent avec ces matériels le moyen d’irriguer leur centre-ville et de faire œuvre de transition, et ce à moindre coût. Dans la même logique peut-être, on aura remarqué cette année l’arrivée chez les constructeurs de nouvelles générations de véhicules autonomes. Des modèles qui, pour l’instant du moins, ne semblent pas avoir encore trouvé leur marché.

Dernier cas sur lequel il est peut-être nécessaire de s’interroger concernant le développement du parc roulant des transports collectifs urbains « propres », celui du trolleybus. Précieusement conservé et renouvelés par les agglomérations qui n’ont pas démonter les infrastructures nécessaires dans les années 70/80, les trolleybus seraient, de l’avis de la plupart des experts, la meilleure solution « électrique », compte tenu du ratio coût d’achat/volume de batteries embarqué/capacité d’emport/durée de vie. Sans doute le retour des câbles d’alimentation dans les rues est-il souvent jugé inesthétique par certains édiles ? Les mêmes toutefois qui ont laissé proliférer en périphérie de leurs communes des « zones d’activités » désormais clairement ressenties comme une atteinte au bon goût… Peut-être les réalités économiques du moment et à venir redonneront-elles à ce mode quelques lettres de noblesse ?

 

Un Crealis d’Iveco Bus. Le trolleybus est-il le meilleur type de bus électrique ?

 

Dans cette logique, pour l’ensemble des transports collectifs, 2024 qui arrive se devra d’être une année de transition… positive.

Interview. Neste, Altens et Bolloré Energy s’allient pour le diesel renouvelable

Interview. Neste, Altens et Bolloré Energy s’allient pour le diesel renouvelable

Dans le cadre du salon Solutrans, qui s’est déroulé à Lyon du 21 au 25 novembre derniers, Neste a signé deux partenariats avec Altens et Bolloré Energy pour la distribution du Neste MY Renewable Diesel sur le marché français à partir de 2024.

Neste, Altens et Bolloré Energy insistent d’ailleurs sur le fait que si la France veut atteindre les objectifs fixés par le gouvernement dans le cadre de la loi Énergie-Climat et de la Stratégie Nationale Bas Carbone, tout en respectant les objectifs européens, elle doit prendre en considération toutes les solutions disponibles pour lutter contre le dérèglement climatique. Cela nécessite de renforcer sa stratégie pour l’énergie électrique et hydrogène, mais aussi d’adopter les biocarburants et carburants liquides bas carbone.

Neste produit ainsi du diesel renouvelable à partir de matières premières 100% renouvelables, dont plus de 90% étaient en 2022 issues de déchets et de résidus.

Le Neste MY Renewable Diesel contribue à réduire les émissions de gaz à effet de serre jusqu’à 90%, lorsque les émissions du carburant sont comparées à du diesel fossile sur l’ensemble de leur cycle de vie.

Rencontre avec Johannes Hartig, directeur des ventes marché européen.

 

Johannes Hartig, directeur des ventes Europe de Neste.

 

Car & Bus News : Pouvez-vous nous présenter l’entreprise Neste, peut-être méconnue des professionnels français ?

JH : Nous sommes une société finlandaise et le premier producteur mondial de diesel renouvelable destiné aux transports terrestres et aériens. Notre procédé NEX BTL consiste en un hydrotraitement de déchets, de résidus et de graisses d’origine naturelle. Nous possédons des raffineries en Finlande, à Rotterdam, Singapour et en Californie. En 2022, le chiffre d’affaires de Neste a atteint 25,7 Mds€. Et nous avons calculé que nous aiderons nos clients à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) d’au moins 20 millions de tonnes par an d’ici à 2030.

La capacité actuelle de production de produits renouvelables de Neste est de 3,3 millions de tonnes par an. L’opération conjointe de Neste et de Marathon Petroleum à Martinez, en Californie, portera la capacité totale de production de produits renouvelables à 5,5 millions de tonnes au début de l’année 2024. Une fois achevé, le projet d’expansion de la raffinerie de Rotterdam de Neste augmentera encore la capacité totale de production de produits renouvelables de l’entreprise à 6,8 millions de tonnes d’ici la fin de 2026.

Enfin, nous avons calculé que nous aiderons nos clients à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) d’au moins 20 millions de tonnes par an d’ici à 2030.

 

CBN : Comment organisez-vous la distribution de votre diesel renouvelable sur le marché français ?

JH : Nous sommes présents dans l’Hexagone depuis une dizaine d’année, même si nous n’avons pas de réseau de distribution en propre et que nous nous appuyons sur des distributeurs locaux. C’est dans ce cadre que se situe notre nouveau partenariat avec Altens et Bolloré Energy, qui consistera en une mise en commun de la distribution de notre carburant en France. Nous sommes convaincus que notre carburant Neste MY répond aux ambitions des autorités organisatrices de transport et des opérateurs de transport, qui pourront décarboner leurs flottes sans investissements trop lourds et sans modification des véhicules du parc ou de leurs structures d’exploitation. Nous estimons d’ailleurs que le marché français pour ce type de carburant représente plus ou moins 5 millions de m3.

CBN : Quel est le surcoût de votre Neste MY ?

JH : Le surcoût doit être calculé en termes de coût total de la décarbonation. Et au final, celui-ci s’avère tout à fait supportable, notamment grâce à l’absence de surcoût en matière d’infrastructure. Autres points qui jouent en la faveur du Neste MY : sa haute performance grâce à un indice de cétane élevé, sa résistance aux températures extrêmes et sa remarquable tenue dans le temps, nos laboratoires ayant déjà pu constater qu’il n’y avait aucune altération du carburant 10 ans après sa production et son stockage. Preuve des qualités de notre diesel renouvelable, les armées commencent d’ailleurs à s’y intéresser.

CBN : Quelle place pourra jouer votre carburant dans le cadre de la politique de verdissement des transports menée à l’échelle européenne ?

JH : Nous sommes bien sûr des adeptes du mix-énergétique, car nous pensons qu’en 2040, le développement de véhicules électriques ne permettra de décarboner concrètement qu’un quart du transport européen. L’utilisation d’un carburant comme le nôtre participe donc d’un ensemble de solutions. Nous pensons par ailleurs qu’il ne faut surtout pas attendre 2035, et la fin du moteur thermique, pour recourir au Neste MY. Preuve que nous commençons à être entendus, notre marque connait un véritable essor et est présent dans de nombreux pays de l’Union européenne, la Finlande bien sûr, mais aussi aux Pays-Bas, en Belgique, Allemagne, etc.

Global Mobility Call 2023, réflexions tous azimuts

Global Mobility Call 2023, réflexions tous azimuts

Le Global Mobility Call (GMC), organisé par Ifema Madrid et Smobhub, a été organisé du 24 au 26 octobre derniers. Selon ces organisateurs, quelque 8 000 professionnels du monde entier ont répondu présent à ce deuxième rendez-vous du genre, ainsi que près de 500 intervenants et 104 entreprises investies dans le développement de la mobilité et qui exposaient leurs solutions.

C’est la ministre espagnole des Transports, de la Mobilité et de l’Agenda Urbain, Raquel Sánchez, qui a présidé à l’ouverture des portes du congrès et de l’exposition.

 

Le rôle de l’électrification et d’autres carburants alternatifs dans la décarbonisation, la multimodalité des transports, les nouvelles infrastructures, ainsi que l’innovation, la numérisation et les nouvelles technologies ont été quelques-uns des sujets les plus mentionnés.

 

Le premier jour, ont été présentées un grand nombre de nouveautés comme la nouvelle voiture des 24H du Mans, propulsée à l’hydrogène-électricité, le premier taxi aérien espagnol propulsé par des drones, le bus autonome de CTAG par PwC, un gyrocoptère avec le drone de la Police, et le bus autonome e-ATAK de Karsan.

 

En parallèle des diverses table-rondes organisées, notamment sur la transition dans l’aérien, ou sur les « nouveaux paradigmes pour l’avenir », le visiteur a pu assister à la table ronde intitulée « le secteur public comme moteur de la collaboration public-privé pour relever les nouveaux défis de la mobilité » qui réunissait María José Rallo del Olmo, secrétaire générale des transports et de la mobilité de Mitma ; Raül Blanco Díaz, président de RENFE ; Sergio Vázquez Torrón, président d’INECO ; María Luisa Domínguez González, présidente de l’ADIF ; et Álvaro Rodríguez Dapena, président de Puertos del Estado.

 

Conférence au GMC 2023

 

Parallèlement, la conférence européenne « Safe, Inclusive and Accessible Mobility in Smart Cities », organisée par AccessibleEU, a permis de brosser le tableau de différents scénarios et bonnes pratiques en matière de mobilité accessible sous trois angles : le rôle du handicap, la visite globale de la ville et quelques exemples de réussite déjà réalisés.

 

Au chapitre des conférences qui pouvaient retenir l’attention des acteurs du transport public, GMC avait organisé des rencontres sur des sujets aussi divers que le rôle de l’électrification et d’autres carburants alternatifs dans la décarbonation, la multimodalité des transports, les nouvelles infrastructures, ainsi que l’innovation, la numérisation et les nouvelles technologies, etc.

 

La multimodalité dans le transport de passagers fut aussi l’un des thèmes de cette édition, où les experts ont développé l’idée d’une collaboration public-privé. Les participants ont insisté sur la nécessité de tenir compte de la situation des environnements urbains et ruraux, et ont également invité à prendre en compte le rôle de la micromobilité pour les trajets du dernier kilomètre au-delà du transport collectif.

 

Il a aussi été question du développement des services multimodaux de mobilité numérique (SMMN), un sujet sur lequel la Commission européenne prépare un texte dans le but « de protéger la vie privée des consommateurs, d’adopter les technologies les plus récentes et de placer le citoyen au centre de la stratégie ».

 

Fait révélateur enfin, Peggy Liu, de la JUCCCE (Joint US China Collaboration on Clean Energy), a défendu le rôle que la Chine peut jouer en tant que « partenaire d’infrastructure fondamental » vers une mobilité à empreinte nette zéro, elle a expliqué comment l’avenir des macro-villes chinoises se forge avec une approche environnementale, pour faire face à la croissance de la population dans ces espaces et à une gestion plus efficace de la mobilité.

 

Le dernier jour du congrès a par ailleurs été consacré à une conférence exhaustive sur les « Corridors 360º : Atlantique et Méditerranée ». Des corridors qui seront présentés comme une infrastructure multimodale clé pour le développement économique et social, ainsi que pour les connexions au sein de l’Europe et pour la décarbonation du transport de marchandises et de passagers. Selon les intervenants, ces infrastructures seront le levier qui permettra une meilleure efficacité pour les entreprises et une meilleure connectivité pour les citoyens.

 

Le Global Mobility Call a finalement annoncé qu’une troisième édition aurait lieu en 2024, du 19 au 21 novembre.