CNR. Les coûts du transport routier de voyageurs, bilan 2024 et perspectives 2025

CNR. Les coûts du transport routier de voyageurs, bilan 2024 et perspectives 2025

Le Comité National Routier (CNR) vient de publier son bilan pour l’année 2024 des évolutions de coûts dans ce secteur.

Selon le CNR donc, les entreprises de transports routiers de voyageurs (TRV) demeurent toujours confrontées à une inflation de leurs coûts en 2024. Les coûts du TRV, hors carburant, enregistre ainsi une inflation moyenne annuelle de +5,4% en 2024.

Parmi les hausses, le CNR pointe du doigt les coûts du conducteur (salaires et charges : +8,8%), les coûts de maintenance (+5%), de structure (+2,9%) ou bien encore ceux de détention de matériel (+1,9%).

En matière de prévisions, autre spécialité du CNR, ce dernier constate que le contexte législatif complexifie l’exercice, plus particulièrement pour les charges de personnel. En effet, le projet de financement pour la sécurité sociale pour 2025 (PLFSS 2025) modifie les formules de calcul de réduction générale de cotisations employeurs (couramment appelée allègement « Fillon »).

Si cette réforme est adoptée, les transporteurs enregistreront une inflation supérieure de leurs coûts sociaux. Le CNR envisage alors deux scénarios de prévision, selon la prise en compte ou non des effets du PLFSS 2025.

La prévision 2025 d’inflation du coût de revient hors carburant d’un autocar scolaire atteint en moyenne annuelle :

. +3,3%, en ne tenant pas compte des mesures prévues dans le PLFSS pour 2025, toujours en examen parlementaire.

. +3,8 %, en intégrant les projets initiaux du PLFSS pour 2025.

 

Les hypothèses pour 2025

 

Le CNR fonde ses prévisions pour 2025 sur des hypothèses issues principalement de sources officielles et faisant référence : Insee, Banque de France, etc. En l’absence d’information sur certaines composantes de coûts, le CNR retient des hypothèses conservatoires.

Concernant les frais de personnel, et à défaut d’information spécifique, le CNR prend en compte une hypothèse d’augmentation de +1,8% des salaires en 2025, équivalente au taux d’inflation prévu dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025 (PLF 2025).

Le décompte des taux de cotisations employeurs obligatoires en vigueur en 2024 est maintenu pour 2025, mais de nombreux paramètres n’étant pas encore définitivement connus pour 2025.

Les hypothèsesretenues impactent plus particulièrement les composantes de coûts de personnel TRV suivantes : conduite et maintenance.

Ainsi, dans sa version initiale, le projet de financement pour la sécurité sociale pour 2025 (PLFSS 2025) modifie la formule de calcul de la réduction générale de cotisations employeurs (couramment appelée allègement « Fillon »).

Si cette réforme est adoptée, les transporteurs enregistreront une inflation importante de leurs coûts sociaux. Compte tenu du contexte législatif incertain, le CNR envisage alors deux scénarios de prévision.

Ainsi, en cas de réforme des allègements « Fillon » prévue dans le PLFSS 2025 dans sa version initiale, le taux maximum d’allègement « Fillon », correspondant au coefficient « T » de la formule, diminue de -2 points à compter du 1er janvier 2025.

Le bénéfice des réductions de charges diminurait pour les entreprises ayant versé des primes de partage de la valeur (dite PPV) après le 10 octobre 2024.

Selon les hypothèses retenues, le CNR retient une augmentation pour 2025 de + 3,2 % des coûts indirects de structure, correspondant à la prévision calculée par l’Insee d’inflation sous-jacente des services.

 

Matériel et maintenance

 

Concernant le matériel, pour 2024, l’indice TRV scolaire augmente de +1,9% en moyenne annuelle, les prix de véhicules ayant déjà enregistré une inflation annuelle de +6 % en 2023.

Pour 2025, le CNR constate que la réglementation européenne GSR2 sur les équipements obligatoires d’assistance à la conduite et le renouvellement des gammes entraînent une inflation des prix de véhicules.

Toutefois, selon de nombreux experts, cette inflation devrait être nettement plus mesurée que celles observées depuis quelques années. Sous ces conditions, le CNR retient une hypothèse conservatoire d’évolution des prix de véhicules pour 2025, similaire au taux d’inflation prévue dans le cadre du PLF pour 2025 (+1,8%).

Concernant les taux d’intérêt, le CNR retient dans ces prévisions les scénarios publiés par la Banque de France. Les taux moyens annuels utilisés dans les calculs sont stables en 2025. Enfin, la composante assurances augmenterait de +3,2%.

Concernant la maintenance, le CNR constate une inflation moyenne annuelle de +5% en 2024 de son indice. Pour 2025, l’organisme juge le contexte très incertain sur le marché des matières premières, ce qui rend difficilement prévisibles les variations futures des prix des pièces et des pneumatiques.

Sous ces conditions, le CNR retient une hypothèse minimale d’augmentation de +1,8% des coûts d’entretien (hors personnel d’atelier) et de pneumatiques, similaire à la hausse de l’indice des prix à la consommation prévue dans le cadre du PLF pour 2025.

 

 

Daimler Buses présente son futur eIntouro

Daimler Buses présente son futur eIntouro

Dans le cadre du eMobility Days 2024 qui se déroulait à Berlin, Daimler Buses a mis en vedette une future star de sa gamme, un exemplaire de pré-série du Mercedes-Benz eIntouro 100% électrique.

Le véhicule présenté le 18 novembre à l’ensemble de la presse spécialisée européenne est donc la version électrifiée du très connu autocar Intouro  à plancher surélevé, désormais équipé d’un entraînement électrique à batterie.

Il sera commercialisé au premier trimestre 2025, présenté lors du prochain Busworld et commencera à être livré en 2026. Deux longueurs seront disponibles : en 12,18 m et en 13,09 m, avec des capacités allant de 50 à 63 sièges maximum. Selon les finitions et configurations, il sera adapté aux transports scolaires, interurbains, voire tourisme.

L’eIntouro sera disponible avec un ou deux packs de batteries LFP (lithium fer phosphate) NMC4 de dernière génération, chacun d’une capacité de 207 kWh, et fournissant une tension de fonctionnement de 800 volts.

 

Le premier pack de batteries est installé derrière l’essieu arrière.

 

Le premier pack de batteries est situé dans l’espace derrière l’essieu avant pour garantir une répartition optimale du poids, et le deuxième optionnel est installé dans l’ancien compartiment moteur à l’arrière. Ces batteries et un certain nombre de composants sont d’ailleurs issus du camion Mercedes Benz eActros.

Dans sa version « Scolaire » standard, c’est-à-dire avec un seul pack et en 13m, l’eIntouro est donné avec une autonomie comprise entre 180 et 255 km (selon la température). Dans les versions « Interurbain » et « Tourisme » et en 13m, il affiche une autonomie de 400 à 460 km, et de 390 à 510 km en 12m.

 

Le deuxième pack de batteries est logé à l’ancien emplacement du bloc moteur thermique.

 

Les batteries peuvent être chargées sur des bornes de recharge équipées de connecteurs CCS de type 2 d’une capacité de charge allant jusqu’à 300 kW. Les clients peuvent choisir parmi quatre positions différentes pour les prises de recharge sur l’eIntouro : à l’avant ou à l’arrière, ou à droite ou à gauche derrière l’essieu avant, à concurrence toutefois d’un maximum de deux prises de recharge.

L’entraînement central Cetrax de ZF, d’une puissance continue de 320 kW, est utilisé comme moteur électrique, et la puissance motrice est transférée à l’essieu moteur Mercedes Benz RO 440 via une transmission à trois vitesses entièrement automatique intégrée à l’unité d’entraînement.

Autre nouveauté, moins visible mais d’une certaine importance, l’eIntouro est compatible avec les mises à jour en direct. Ces dernières, contrôlées via le portail numérique Omniplus On, sont transmises au véhicule via le réseau de téléphonie mobile, mettant à jour le système sans qu’il soit nécessaire de passer par un atelier comme c’était le cas auparavant.

En termes de configurations et d’aménagements, le nouveau modèle ne diffère guère de son prédécesseur thermique. On note tout de même que pour les excursions et les courts trajets, la version de 13 m peut être équipée d’un WC devant l’entrée arrière, tandis qu’un élévateur pour fauteuil roulant (côté droit) est disponible en option pour les deux variantes de longueur.

Enfin, le Mercedes Benz eIntouro est disponible avec la gamme complète de services Omniplus pour exploiter au mieux le potentiel technologique du bus. Des services qui comprennent des contrats eBasic et ePremium eService spécialement conçus pour les bus électriques.

A noter que ce véhicule devrait être produit à termes à Ligny-en-Barrois, mais aussi en Turquie, et qu’en matière tarifaire, Daimler Buses l’annonce à un tarif correspondant à plus ou moins 1,5 fois celui d’un Intouro classique.

 

Le savoir-faire électrique en exposition

 

Parallèlement à cette présentation, Daimler Buses a aussi profité de la manifestation pour mettre en valeur plusieurs de ces véhicules : le 70 000e Citaro, le eCitaro G fuel cell articulé de 18 m de l’agglomération de Stuttgart, et le eCitaro K, dernier-né de la gamme.

Enfin, lors des diverses présentations, les responsables de la marque ont annoncé qu’en 2030, les gammes de véhicules de grand tourisme, Setra autant que Mercedes-Benz, seront, elles aussi, complétées de versions électrifiées, vraisemblablement sous la forme d’autocars à batteries avec prolongateurs à hydrogène. A suivre donc.

 

Le 70 000e Citaro, le eCitaro G Fuel cell et le eCitaro K, autres vedettes du Mobility Days de Daimler Buses à Berlin.

 

Tribune. Les moteurs à hydrogène sont-ils vraiment à zéro émission ?

Tribune. Les moteurs à hydrogène sont-ils vraiment à zéro émission ?

Des moteurs à combustion interne (ICE) mais sans les émissions. L’idée est certainement séduisante. Conserver les mêmes moteurs à combustion interne (ICE) qui alimentent les voitures, les bus et les camions depuis plus d’un siècle, mais éliminer les émissions nocives et affectant le climat qui s’échappent du pot d’échappement. Actuellement, l’électrification est la principale voie vers la décarbonisation des transports, mais les solutions électriques à batterie posent de nombreux défis, ce qui signifie que l’adoption risque d’être un processus lent, IDTechEx estime que 11% de toutes les ventes de voitures en 2023 étaient entièrement électriques. 

Les moteurs fonctionnant à l’hydrogène pourraient-ils conserver le meilleur des deux mondes, à savoir une technologie ICE familière et mature avec zéro émission ? Le rapport d’IDTechEx, «Hydrogen Internal Combustion Engines 2025-2045: Applications, Technologies, Market Status and Forecasts», explore les atouts de cette technologie potentiellement disruptive en matière d’émissions.

 

Aperçu des réactions chimiques impliquées dans un moteur à essence/diesel, un moteur à hydrogène et une pile à combustible à hydrogène. L’absence de carbone dans la combustion des moteurs à hydrogène élimine les émissions de CO2 (à l’exception des traces provenant de l’huile moteur). Source : IDTechEx.

 

Un carburant sans carbone, donc pas de carbone dans l’échappement ?

 

 

La combustion est une réaction chimique à haute température entre un carburant et un oxydant (dans le cas des moteurs, il s’agit de l’oxygène atmosphérique). Dans un moteur à combustion interne classique alimenté à l’essence ou au diesel, l’hydrocarbure réagit avec l’oxygène et l’azote de l’air à haute température pour produire de la chaleur, de la vapeur d’eau, du dioxyde de carbone et des oxydes nitreux. Aucun carbone n’est présent dans la réaction chimique lors du passage à un carburant à hydrogène pur ; par conséquent, aucun CO2 n’est formé et émis dans l’atmosphère. Il y a cependant une légère réserve à ce zéro CO2. Les recherches d’IDTechEx indiquent qu’une petite quantité d’huile moteur sera brûlée dans un moteur à combustion interne. L’huile moteur est essentielle pour lubrifier les pièces mobiles complexes et éviter les dommages causés par le contact métal-métal. La plupart des moteurs brûlent une petite quantité d’huile en raison de fuites ou de retours de flamme dans le système, et comme toutes les huiles moteur actuellement utilisées sont à base d’hydrocarbures, cela entraîne la production d’une petite quantité de CO2. Cependant, comparée à la quantité deCO2émise par un moteur à combustion interne classique, cette quantité est négligeable. IDTechEx estime que la combustion d’huile moteur dans un véhicule H2ICE produirait moins de 1 kg de CO2par 1 600 km, contre 272 kg dans un véhicule ICE classique. Ainsi, un H2ICE produirait environ 99,7% d’émissions de CO2 en moins qu’un ICE classique.

 

Les recherches d’IDTechEx décrivent les paramètres clés du moteur et leurs impacts en aval sur la formation de NOx thermique. Le NOx est un polluant clé préoccupant pour le H2ICE, et les émissions d’échappement doivent être maintenues aussi basses que possible pour que le H2ICE offre des réductions d’émissions crédibles. Source : IDTechEx.

 

Les oxydes d’azote représentent le plus grand défi

 

Bien que le carburant ne contienne pas de carbone, la combustion de l’hydrogène provoque des températures très élevées dans la chambre de combustion, ce qui entraîne la formation d’oxyde nitrique. Les oxydes d’azote (NOx) sont reconnus depuis des décennies comme des gaz à effet de serre (GES) et nocifs pour la qualité de l’air. Des réglementations de plus en plus strictes sur les émissions autorisées de NOx au niveau des pots d’échappement ont été mises en œuvre à l’échelle mondiale, car les effets nocifs du NOx sont devenus plus évidents. Pour que le H2ICE ait des réductions d’émissions crédibles, il doit également montrer qu’il peut réduire considérablement les émissions de NOx. La formation de NOx thermiques (NOx formés lors de combustions à haute température) est une interaction très complexe de facteurs et de paramètres moteur.

IDTechEx décompose chacun de ces facteurs à tour de rôle dans le rapport, en examinant les dernières recherches universitaires et les tendances de l’industrie telles que :

  • Influence du rapport air-carburant sur la formation de NOx et raison pour laquelle l’industrie tend vers des conceptions d’allumage par étincelle à combustion pauvre (SI).
  • Impact du régime moteur sur la formation de NOx en raison de la pression et du temps de réaction.
  • Applicabilité du post-traitement des gaz d’échappement à allumage par compression (CI) et SI existants aux moteurs à hydrogène.
  • Principes de performance et de fonctionnement des convertisseurs catalytiques à 2 et 3 voies, de la réduction catalytique sélective, des pièges à NOx pauvres et de la recirculation des gaz d’échappement (EGR).
  • Données de performances réelles pour les véhicules H2ICE existants.
  • Contextualisation des émissions de NOx du H2ICE avec les limites d’échappement historiques et actuelles (g/km et g/kWh) dans les régions clés.
  • Discussion sur les émissions pour les secteurs au-delà du transport routier, y compris l’aviation.

 

Aperçu des couleurs de l’hydrogène. L’hydrogène n’est pas facilement disponible dans la nature, il doit donc être produit, et la méthode de production est essentielle pour déterminer les émissions du cycle de vie d’un moteur à combustion interne à hydrogène. Seul l’hydrogène vert ou jaune offre des émissions de CO2 proches de zéro tout au long de sa production. Source : IDTechEx.

 

En matière d’hydrogène, la couleur est essentielle

 

Bien que l’hydrogène injecté dans le moteur puisse être sans carbone, ses émissions globales tout au long de son cycle de vie dépendent grandement de son origine. Dans l’industrie de l’hydrogène, la « couleur » de l’hydrogène est utilisée pour désigner la méthode de production. Parmi l’arc-en-ciel de couleurs disponibles, l’hydrogène vert et jaune sont les seules sources véritablement renouvelables. Cependant, ces dernières sont actuellement à la fois difficiles à acquérir et excessivement chères, en partie à cause des faibles taux de conversion en efficacité énergétique. 3 kWh d’électricité renouvelable produisent environ 1 kWh d’hydrogène utilisable. Pour être injecté dans un moteur, il doit ensuite être comprimé, transporté, stocké, distribué et enfin brûlé dans un moteur thermique à efficacité thermique limitée. Il en résulte de nombreuses inefficacités énergétiques, qui amplifient les émissions liées à la production. Si les émissions produites pour l’hydrogène vert sont minimes, cela devient un facteur majeur pour les autres couleurs d’hydrogène.

Dans le rapport « Hydrogen Internal Combustion Engines 2025-2045 : Applications, Technologies, Market Status and Forecasts », IDTechEx évalue les émissions globales du cycle de vie d’un véhicule H2ICE, notamment :

  • Émissions estimées de CO2 de l’hydrogène vert, bleu et gris (en g/km).
  • Comparaison avec un véhicule électrique à pile à combustible (FCEV, véhicule électrique à hydrogène) sur les mêmes couleurs d’hydrogène.
  • Comparaisons de référence entre un véhicule diesel/essence et un véhicule électrique à batterie chargé dans le cadre d’une gamme de scénarios de réseau.

 

 

Congrès de la FNTV. La transition énergétique toujours questionnée

Congrès de la FNTV. La transition énergétique toujours questionnée

On en parle depuis bientôt dix ans, et la transition énergétique des transports reste toujours un sujet qui agite « les cœurs et les esprits » du secteur des transport routiers de voyageurs. Le congrès de la FNTV version 2024 n’a pas dérogé à la règle, une bonne partie des débats ont en effet porté sur ce sujet.

En préambule des différents échanges, la parole fut laissée à François Gemenne, président de l’Alliance pour la décarbonation de la route, qui a développé une analyse pragmatique de la situation, en rappelant par exemple que la France ne produit que 1% des rejets mondiaux de gaz à effet de serre.

« Nous militons pour la multimodalité, explique-t-il, et considérons que la stratégie de restriction qui est aujourd’hui mise en œuvre est avant tout une restriction de liberté ». Pour lui, les solutions de transport en commun doivent se multiplier et fournir des alternatives séduisantes, « sans être imposées contre le gré des clients ».

 

François Gemenne, président de l’Alliance pour la décarbonation de la route.

 

« Il ne s’agit pas de rendre cette transition acceptable, a conclu François Gemenne, il faut la rendre désirable ».

 

Le dilemme des financements

 

C’est Solène Grange, DG d’Iveco France, qui a ouvert le débat portant cette fois sur le financement de cette transition. Elle a d’abord rappelé de façon très claire la liste (à la Prévert) des réglementations qui vont courir jusqu’à 2040. Elle a aussi fait la liste des investissements nécessaires à cette transition : véhicules et infrastructures. « Ces infrastructures représentent un coût énorme, explique-t-elle, et pour bien les dimensionner, il faut réaliser un vrai travail en amont, afin de cerner les justes besoins par rapport aux services qui devront être réalisés ».

 

Solène Grange, DG d’Iveco France.

 

Non sans rappeler qu’Iveco Bus misait sur un mix-énergétique dans sa stratégie commerciale, Solène Grange a aussi révélé que le TCO (Coût Total de Possession, ou coût du cycle de vie d’un produit) d’un véhicule électrique à batteries ne serait pas forcément plus élevé que celui d’un véhicule diesel sur 15 ans, grâce notamment aux économies d’entretien.

Elle s’est en revanche interrogée sur le problème de la valeur de reprise de ces nouveaux véhicules, et notamment sur le problème posé par les batteries, et a réclamé « des aides plus simples et ouvertes à toutes les entreprises ».

Une interrogation sur laquelle a bien sûr rebondi Cindy Baesen, directrice du financement de l’équipement chez Bpi France. « Les banques ont besoin d’être rassurées, explique-t-elle, car sur les énergies alternatives, nous manquons totalement de visibilité ». Et de pointer du doigt une technologie encore très jeune, un business model totalement nouveau, et un marché VO encore inexistant.

 

Cindy Baesen, directrice du financement de l’équipement chez Bpi France.

 

Cindy Baesen considère donc, pour stabiliser ce marché, qu’il est possible de jouer sur la durée des contrats et que, concernant le problème de la valeur de reprise (VR), il sera nécessaire « de se mettre autour de la table pour que chacun prenne sa part de risque ».

Pour Daniel Kunegel, président du groupe éponyme, « les entreprises ne pourront effectivement pas porter seules l’intégralité des risques de cette transition, et nous devrons passer par l’allongement de la durée des marchés ».

Un point de vue soutenu par Philippe Fournié, vice-président de la région Centre-Val de Loire : « Il faut arrêter les politiques d’échantillon, mettre en œuvre des engagements pluriannuels et développer une vision à l’échelle des territoires en travaillant à la fois sur les services, les infrastructures et le bon mix-énergétique »…

 

Daimler rappelle ses fondamentaux

 

Pour en terminer avec le chapitre sur la transition énergétique du TRV, la FNTV avait organisée un face à face entre Henri Paccalin, président de Daimler Buses France, et Jean-Luc Gibelin, vice-président de la région Occitanie sur le thème du « tout électrique ».

Ce dernier attaque d’ailleurs ce débat sans tourner autour du sujet. « Nous avons trop entendu l’idée que nous pourrions sans problème passer du tout diesel au tout électrique avant d’évoluer vers le tout hydrogène, explique-t-il. Il faut plutôt viser une transition s’appuyant sur un mix-énergétique en lien avec une cohérence géographique en circuit court ».

Attendu comme ardent défenseur du tout électrique la stratégie prônée par Daimler depuis maintenant quelques années), Henri Paccalin a finalement surpris son auditoire. « Nous pensons que c’est le mix-énergétique qui mènera à termes au tout électrique, a-t-il développé. Et concernant nos marques, il faut savoir qu’en septembre dernier, 94% de nos immatriculations n’étaient pas électriques. Certes, nous visons toujours une gamme entièrement électrique ou hydrogène d’ici à 2039, car les industriels ont besoin d’un vrai retour sur les colossaux investissements qu’ils ont consentis dans cette transition, mais nous avons toujours des offres pour chaque segment ».

Annonçant en conclusion que Mercedes-Benz présenterait bien  un e-Intouro en 2026, Henri Paccalin a finalement rappelé un des fondamentaux de l’économie : « nous avons juste besoin de visibilité ».

 

EuMo 2024. Les services express routiers à l’honneur

EuMo 2024. Les services express routiers à l’honneur

Pendant que le nouveau Premier Ministre prononçait son discours de politique général et faisait part de son intention « d’investir en priorité dans les transports du quotidien », notamment dans les zones périurbaines et rurales, une table ronde se distinguait justement sur ce thème lors de l’événement strasbourgeois.

En substance,Thomas Matagne, fondateur et président d’Ecov, aux côtés de Sylvain Laval, président du SMMAG et vice-président de Grenoble Alpes Métropole ; Anne-Céline Imbaud-de Trogoff, directrice exécutive du développement des transports territoriaux à la Société des Grands Projets ; Edouard Henaut, DG de Transdev France ; et Jean-Christophe Combe, directeur Marketing, Innovation, RSE du Groupe Keolis ont longuement débattu sur ce sujet.

Ces derniers ont donc partagé leur vision de la mise en application des Services Express Routiers (S.E.R), alliance de lignes de car express et de lignes de covoiturage express, qui constituent la composante routière des SERM, en complément des RER métropolitains.

Plusieurs initiatives ont ainsi été mise en lumière pour densifier et coordonner un maillage territorial, et ainsi fournir des solutions de mobilités stables, plus durables, cadencées et peu onéreuses aux habitants des zones urbaines, périurbaines et rurales.

En introduction, Thomas Matagne a rappelé que « 67% des Français qui pratiquent l’autosolisme aimeraient pouvoir se passer de la voiture dans leurs trajets du quotidien, mais n’ont pas le choix. La France qui conduit, c’est celle qui est assignée soit au volant, soit à résidence ».

Pour lui, l’hypermobilité que nous connaissons depuis la fin du XXe siècle avec l’usage démocratisé de la voiture, se traduit aussi « par une extraordinaire inefficacité ». En effet, le taux d’occupation moyen d’une voiture sur toute sa durée de vie est de 1,6, et 81% des km parcourus par les Français le sont en voiture.

Ces chiffres sont corroborés par l’étude réalisée par Transdev, Régions de France et Ipsos : 83% des Français utilisent leur voiture pour aller travailler, et 40% des actifs qui entrent dans un centre-ville n’ont d’autre solution à disposition qu’une voiture.

Dès, se posait la question de savoir quelles solutions de mobilité existent et comment lutter contre la dépendance à la voiture, et incidemment, répondre aux enjeux de décarbonation tout en offrant une meilleure mobilité à l’ensemble de la population sur tous les territoires, parfois très inégaux ?

Thomas Matagne a présenté les avantages des lignes de covoiturage express (permettre un système fréquent – avec un temps d’attente moyen de moins de 4min sur les lignes, soit une fréquence de métro – en zone peu dense, et une démotorisation à hauteur de 20% sur les réseaux les plus matures tout en garantissant la liberté et l’indépendance offertes par la voiture).

Edouard Henaut a rappelé la flexibilité du car express. Il permet notamment de répondre à un besoin de mobilité de manière simple et rapide en ouvrant une ligne en moins de six mois, alors que résoudre une étoile ferroviaire peut prendre 5 à 10 ans. Pour un train par heure, le car express permet quatre fois plus de fréquence et un coût deux fois moins élevé, présentant un potentiel significatif de résolution des problèmes des villes moyennes et des intercités entre ces dernières.

Edouard Henaut est par ailleurs revenu sur l’intégration dans les SER/SERM du car express – dont la première ligne a été ouverte à Bordeaux en 2019. Pour lui, la création d’une ligne de car express devient nécessaire pour un trajet emprunté par 2 à 3 000 personnes, seuil en-deçà duquel les lignes de covoiturage peuvent prendre le relais, tandis qu’au-delà, le RER est le moyen de transport le plus pertinent.

Pour les différents intervenants, multimodalité et complémentarité entre les moyens de transports collectifs sont les notions centrales pour répondre aux problématiques de mobilité en zones peu dense, périurbaines et rurales.

Jean-Christophe Combe a expliqué que Keolis a récemment mené une étude à Grenoble avec Ecov afin de travailler au rapprochement entre les lignes de covoiturage et les lignes de car express. Pour Jean-Christophe Combe, les complémentarités entre ces services sur un même corridor permettent de produire une offre de mobilité attractive, cadencée, fiable et résiliente.

Les services sont complémentaires dans l’espace et dans le temps (renfort de fréquence, absorption des heures d’hyper pointe…). Alors que ces 20 dernières années les trajets longs du quotidien ont augmenté de 20%, et que 53% des émissions de gaz à effet de serre sont issues de la voiture, penser la multimodalité s’impose face à l’impératif de décarboner et à l’enjeu social de rendre cette mobilité plus accessible à l’ensemble de la population.

Sylvain Laval a évoqué l’impératif, partagé par de nombreuses collectivités, de répondre aux besoins des habitants de la grande périphérie et des zones peu denses et rurales en matière de connexion aux zones denses. C’est notamment la priorité pour la décongestion de celles-ci, alors que plupart des grandes villes sont très bien dotés en transports urbains. Pour lui, la logique de complémentarité entre les modes de transports est la réponse la plus efficace, peu coûteuse, avec des solutions quasi immédiates sans attendre le déploiement des RER métropolitains.

Il a également rappelé l’importance, pour les opérateurs, de garantir l’attractivité et la simplicité des services. Les AOM (Autorités Organisatrices de Mobilités) jouent alors un rôle de coordination pour rendre la solution finale utilisée par les citoyens cohérente, facile et attractive et faire en sorte que les acteurs travaillent en complémentarité. Avec un cadre réglementaire simplifié, l’engagement des opérateurs et une volonté collective, et dans la logique des SERM, cette multimodalité représente la solution aux problématiques de mobilité en zones peu denses.

Enfin, Anne-Céline Imbaud-de Trogoff a rappelé l’orientation multimodale, ferrée et routière, et l’approche servicielle de la SGP dans l’application des SERM. Afin de rendre les offres de mobilité plus accessibles et stables, motivée par l’impératif d’améliorer la mobilité du quotidien des personnes vivant autour des métropoles en leur permettant de se déplacer moins cher et plus vert, la SGP apporte une vision multimodale à tous les acteurs des SERM. Les SER, qui peuvent compléter des modes transports lourds comme le ferroviaire, doivent être complémentaires du train et non pensés comme transitoires.

 

 

EuMo 2024. Quand Solaris voit la vie en vert

EuMo 2024. Quand Solaris voit la vie en vert

Solaris Bus & Coach a profité du salon EuMo 2024 pour dresser un bilan de la période. Fort de son titre de Bus of the Year 2025 obtenu par son Urbino 18 H2, l’industriel polonais envisage l’avenir avec un certain optimisme, comme le précise Olivier Michard, vice-président ventes internationales.

Premier constructeur récompensé de ce titre pour un véhicule fonctionnant à l’hydrogène, l’industriel voit l’événement comme une consécration de sa stratégie du travail effectué dans le domaine du transport durable. Une stratégie qui lui vaut sur dix ans une part de marché de 14,5% à l’échelle européenne sur les créneaux des autobus électriques ou H2.

Mieux, en 2023, Solaris a engrangé 70% des commandes d’hydrogène passées en Europe. Une évolution, portée notamment par le retour des pays nordiques vers des productions européennes après avoir testé différents constructeurs chinois, qui devrait lui permettre en 2024 de consacrer 85% de sa production aux bus zéro émission, avec pour objectif d’atteindre 1750 à 1800 véhicules sortis d’usine.

 

Olivier Michard, vice-président ventes internationales de Solaris.

 

« La dynamique est bien là, estime Olivier Michard, et nous constatons avec satisfaction que certains clients achètent désormais des autobus Solaris pour la 2e ou 3e fois… ». Pour appuyer cette dynamique, l’industriel entend d’ailleurs développer les contrats de services, qui répondent aux attentes des opérateurs ou des réseaux confrontés aux changement induis par le passage aux mobilités zéro émission.

Si Solaris travaille d’abord au maintien de sa position en Europe en s’appuyant sur sa gamme d’autobus, son plan-produits contient, pour les années à venir, un projet d’autocar, lui aussi zéro émission. En substance, Solaris travaille au développement d’un interurbain dont le prototype devrait voir le jour en 2025, être présenté début 2026 pour des livraisons en 2027. « Il s’agira d’un modèle totalement nouveau, explique Olivier Michard, conçu dès le départ comme un véhicule zéro émission et disponible dans plusieurs longueurs et hauteurs, même si nous mettrons d’abord l’accent sur la version low entry ».

Enfin, Solaris travaille à la mise en production vers 2027 en Amérique du nord d’une plateforme conçue en Europe spécifiquement pour ce marché.