Busworld 2023 : surprises au fil des stands

Busworld 2023 : surprises au fil des stands

Car & Bus News, sans vouloir être exhaustif pour un salon de cette importance, présentera dans les journées et semaines à venir, une série de reportages thématiques sur ce salon et ce que les visiteurs ont pu y découvrir. Nous entamons cette série avec les « surprises » rencontrées au fil des stands des constructeurs qui sont présents sur le marché français, ou pourraient l’être prochainement.

Le groupe Iveco et Hyundai Motor Company ont dévoilé à Busworld le premier autobus E-Way H2.Ce véhicule de 12m est à plancher surbaissé équipé d’un moteur électrique de 310 kW et d’un système de pile à combustible fourni par HTWO, une marque commerciale à hydrogène basée sur des systèmes de pile à combustible du groupe Hyundai Motor. Il dispose de quatre réservoirs offrant un stockage combiné de 7,8 kg d’hydrogène et une batterie de 69 kWh de FPT Industrial, la marque du groupe Iveco spécialisée dans les technologies de transmission, le véhicule est donné avec une autonomie de 450 km dans des conditions normales d’exploitation.Parallèlement, Iveco Bus a aussi présenté son nouveau e-Daily, une base avec les batteries incorporées dans le châssis qui devrait faire la joie des carrossiers désireux de passer à l’électrique.

L’ e-Daily est équipé de 3 batteries de 37 kWh chacune, pour une capacité totale de 111 kWh placées à l’intérieur du châssis, minimisant l’impact sur la carrosserie. Les packs de batteries FPT Industrial de 37 kWh intègrent des cellules dotées de la technologie unique lithium-ion et offrent une densité d’énergie de haut niveau (265 Wh/kg au niveau des cellules). Le moteur électrique synchrone alimente la chaîne cinématique électrique FPT Industrial. Il est installé à l’arrière  et délivre une puissance constante (puissance maximale de 140 kW, couple maximal de 400 Nm).

Iveco Bus E-Way H2.

Iveco Bus e-Daily.

Otokar, qui exposait sept véhicules, a dévoilé à Busworld le premier bus électrique à pile à combustible de sa gamme, un Kent Hydrogen, mais aussi une autocar interurbain électrique de 13 mètres e-Territo. Autre surprise chez ce constructeur turc, un nouveau design pour la star de la gamme Otokar, le Navigo. Enfin, si l’annonce de la présence du e-Centro autonome avait déjà été faite, Otokar a aussi son nouveau système télématique BusMonitor et ses solutions de chargeur EV.

Le Kent C Hydrogen.

Karsan, autre constructeur turc bien implanté sur le marché français à travers sa distribution par HCI, a lui aussi créé la surprise en présentant son e-ATA hydrogène.

Le e-ATA Hydrogen de Karsan.

Chez BYD, c’est l’eBus de 12 m qui était au centre de la présentation de ce constructeur chinois, avec l’emploi, pour la première fois, du nouveau châssis équipé des batteries Blade (lithium fer phosphate) développées par BYD et intégrés dans le châssis. Ce châssis utilise un nouveau contrôleur 6-en-1 doté de la technologie au carbure de silicium, ainsi que des moteurs en épingle à cheveux dans les moyeux de roue. Autre nouveau venu, le BYD-UNVI DD13, un ebus à double étages de 13 mètres aux couleurs du réseau Zou ! de PACA.

Le stand BYD.

Le constructeur italien Rampini, qui participait pour la première fois à Busworld Europe, a présenté un nouveau midibus Hydrogen Range Extender Hydron, qui entrera en production en 2024, mais aussi l’essentiel de sa gamme (Eltron, Sixtron) électrifiée.

Le minibus Rampini Hydron H2.

Scania, qui a modifié récemment sa stratégie produit en abandonnant sa production de véhicules complets, était très attendu. Il a donc présenté un nouvel autocar GNL conçu avec son partenaire Irizar (donné avec une autonomie de 1200 km).

Parallèlement, l’industriel suédois a présenté une nouvelle plateforme de bus électrique, low entry, à Busworld, équipée de de 520 kWh de batteries Northvolt, et cette fois carrossée par Castrosua. Le constructeur a toutefois annoncé que d’autres carrossiers pourraient avoir accès à cette nouvelle plateforme.

Le e-bus Scania-Castrosua.

Chez Irizar justement, la grande surprise restera la présentation du prototype de l’Irizar i6S Efficient Hydrogène, premier autocar H2 zéro émission en Europe. Développé exclusivement par Irizar, l’Irizar i6S Efficient Hydrogène devrait avoir une autonomie de 1000 km avec un temps de recharge minimum d’environ 20 minutes.

Selon le constructeur, les batteries accompagneront le véhicule tout au long de sa vie utile, et la pile à combustible nécessitera un entretien, sans remplacement de composants, seulement après environ 30 000 heures de fonctionnement, en fonction du type d’itinéraires et d’utilisations.

Irizar a par ailleurs annoncé que la gamme hydrogène devrait être étendue au Irizar i4.

Irizar i6 Efficient H2.

C’est l’absence de Volvo qui était en soi la surprise concernant ce constructeur suédois à Busworld, uniquement représenté par le carrossier égyptien MCV qui présentait son autobus à batteries de 12m.

Le e-bus MCV sur châssis Volvo.

CaetanoBus et Temsa avaient annoncé récemment qu’ils allaient lancer en 2024 un autocar à pile à combustible. Surprise, le véhicule, basé sur le Temsa HD12 électrique à batteries, avec une technologie de pile à combustible provenant de Toyota, était bien présent sur le stand.

L’autocar Temsa HD 12 H2 conçu avec CaetanosBus.

Hydrogène : visite de l’université Belfort Montbéliard

Hydrogène : visite de l’université Belfort Montbéliard

En marge du Forum Hydrogen Business for Climate, qui s’est déroulé à Belfort les 3 et 4 octobre derniers, était organisée une visite d’un lieu unique en Europe : la Plateforme Hydrogène Energie de l’université de Belfort Montbéliard.

Née de l’investissement de la région Bourgogne Franche-Comté dans l’écosystème hydrogène en 2017 à hauteur de 100 M€, cette institution publique est composée du FEMTO- ST dédié à la recherche, et du FCLAB, qui se consacre à des tests destinés à l’industrialisation.

David Bouguain, vice président de l’université de Belfort Montbéliard.

Concrètement, comme l’explique David Bouguain, vice-président de l’université, le site dispose de &6 bancs d’essai qui ont la capacité de tester aussi les piles à combustible, les électrolyseurs et l’ensemble des systèmes de stockage.

« Notre raison d’être est en fait d’accompagner les entreprises dans le transfert du fruit de leur recherche & développement vers l’industrialisation, explique-t-il, nous les accompagnons à travers des tests spécifiques et de longue durée… ».

C’est donc ici que de nombreux composants retrouvés ultérieurement sur les bus à hydrogène qui foisonnent aujourd’hui dans les catalogues des constructeurs sont testés sur banc. Il s’agit par exemple de vérifier leur durée de vie, en les soumettant à des vibrations, des changements de température, etc.

Le banc de vibration.

Le point de vue d’un expert

Au cœur de toutes les avancées du moment concernant l’hydrogène énergie, les chercheurs et experts de l’université de Belfort Montbéliard.

Interrogé par exemple sur la validité d’utiliser l’hydrogène dans des moteurs thermiques, David Bouguain développe un raisonnement non dénué d’intérêt. Il ne se montre guère convaincu par un procédé « qui ne produit un rendement que de 20 à 25% alors qu’une pile à combustible atteint 55%… ».

Il reconnait toutefois que si cette technologie manque de cohérence d’un point de vue purement scientifique, son développement pourrait s’avérer économiquement intelligent en terme de transition écologique, notamment à travers un grand plan de retrofit.

« Cette solution technologique permettrait aux industriels et aux entreprises de s’adapter progressivement aux nouvelles contraintes de l’hydrogène, qui est pour nous une solution d’avenir incontournable… », analyse-t-il.

Enfin, concernant le développement des e-fuel, sur lesquels il avoue ne pas avoir encore travaillé, il met avant tout en garde sur les ressources en eau, dont les besoins pourraient s’avérer colossaux…

Un groupe électrogène H2 en cours de test.

Reportage. VDL mise sur le Citea, dans l’attente d’un Futura meilleur…

Reportage. VDL mise sur le Citea, dans l’attente d’un Futura meilleur…

Le constructeur néerlandais VDL fait sa rentrée en misant sur le succès de son autobus Citea New Generation et sur une nouvelle version de l’autocar Futura, prévue toutefois pour 2024.

Au sein de VDL Group, la branche Bus & Coach, malmenée depuis la crise covid et toutes les conséquences que l’on connait, veut croire à la fin de la parenthèse. « Le marché ne pourra plus être le même qu’il y a quatre ans », explique toutefois Pieter Gerdingh, Business Manager Coach, devant la presse spécialisée européenne, invitée à Eindhoven en préambule des salons à venir.

Il est vrai que le constructeur avait lancé le New Generation Citea électrique, son cheval de bataille sur le marché des autobus exactement en 2020, au pire moment. Une situation dommageable pour un des pionniers européens de l’électrification, puisque le premier Citea Elec datait de 2013, suivi en 2016 de la version articulée de 18m.

Malgré les difficultés, les livraisons ont démarré début 2023, et, selon l’industriel, quelque 750 véhicules seraient d’ores et déjà inscrits dans les carnets de commandes, dont une quarantaine pour la France.

C’est donc bien le New Generation Citea LE 122 (le 12m pour simplifier) qui sera à l’honneur sur le stand VDL de Busworld, dans une version équipée de batteries d’une capacité de 490 kWh.

En termes de plan produit, l’industriel envisage de présenter avant la fin du trimestre la version LE 135, c’est-à-dire en 13,50 m, avant une version LF 181 (un 18 m articulé) dans la première moitié 2024, et un LE 149 (14,90 m et trois essieux) par la suite.

De quoi répondre à toutes les demandes possibles en matière d’autobus à batteries sur le marché des transports collectifs européens. Et VDL peut répondre, puisqu’il dispose désormais de deux usines, pour une capacité de production maximum de 1000 bus par an…

 

Si Rolf-Jan Zweep, CEO de VDL Bus & Coach, se veut confiant dans les capacités de son groupe à s’adapter aux nouvelles demandes avec ce modèle, il n’en demeure pas moins réaliste.

« Le marché du véhicule urbain entre dans une zone de fortes turbulences, explique-t-il. D’un côté, nous sommes pris entre une réglementation européenne, qui pèse de plus en plus lourd, notamment en imposant des délais trop courts, et des problématiques de disponibilités de composants, d’inflation, et tout simplement de concurrence. Et de l’autre, nous nous trouvons de plus en plus face à des clients qui ne peuvent, ou ne veulent, plus payer le juste prix du produit qu’ils nous avaient pourtant demandé de créer. C’est une situation qui va vite poser problème… ».

La preuve par Maxilife ?

A défaut de pouvoir présenter une véritable nouveauté, VDL devrait mettre en avant lors des événements à venir le résultat d’un test grandeur nature baptisé Maxilife, et réalisé sur le réseau de Eindhoven par un de ses bus LE 122 New Citea, justement avec 490 kWh de batteries.

Le test a simplement consisté en l’utilisation d’un bus électrique standard aux batteries chargées à 100%, équipé de mannequins à concurrence de 6,5 tonnes (répartis équitablement dans le compartiment passagers), et affecté à une des lignes du réseau.

 

Des conducteurs se sont relayés à son bord pour effectuer un service en continue pendant l’été (donc avec des températures diurnes de l’ordre de 30 C° et l’utilisation de la climatisation), le tout en respectant les arrêts prévus sur la ligne sélectionnée.

C’est donc avec une certaine fierté que VDL Bus & Coach annonce que son véhicule, avant de rentrer au dépôt avec 3% de charge affiché au compteur, a circulé pendant 26 h et 30 mn, parcouru 546,7 km à une vitesse moyenne oscillant entre 18 et 21 km/h, non sans avoir effectué 1,4 stop par kilomètre parcouru. Des résultats dont le constructeur pourra se prévaloir auprès de ses futurs clients.

Un nouveau Futura en gestation

Il ne sera physiquement pas présent au salon Busworld, mais son prototype roule, nous l’avons vu (photos interdites toutefois…), et l’ensemble de son design extérieur a été validé. Le nouvel autocar Futura de VDL devrait donc être officiellement lancé au troisième trimestre 2024 dans une version 13m, et d’ici là, VDL fera doucement monter la pression, ce qui est de bonne guerre.

Si le nez bombé d’origine Bova a définitivement disparu sur cette nouvelle version, l’accent devrait être mis sur l’allégement et la rationalisation des modèles de la gamme proposée. « Devant la complexité de ce marché, qui ne remonte toujours que très doucement la pente, nous répondrons par une offre plus restreinte en nombre de modèles », explique Pieter Gerdinh. Prudence oblige.

D’autant que l’industriel, qui travaille toujours étroitement avec DAF (dont il a par exemple électrifié la gamme camion…), ne s’interdit en revanche rien en matière de motorisation. Si le premier modèle présenté l’an prochain roulera au diesel, VDL reconnait travailler sur des versions électriques comme hydrogène de sa nouvelle plateforme. Concernant le recours à cette énergie, pile à combustible ou combustion ? Les responsables de VDL Group resteront toutefois muets sur ce sujet. Le teasing a bel et bien commencé…

Vidéo. Retrouvez La minute VDL Bus & Coach, un résumé de cette présentation.

Reportage. Iveco France ouvre les portes de son E-Bench

Reportage. Iveco France ouvre les portes de son E-Bench

Iveco Bus a officiellement inauguré le 22 septembre dernier une nouvelle structure de recherche et développement baptisée E-Bench à Vénissieux.

Si cette infrastructure unique en Europe est en réalité fonctionnelle depuis juillet, l’industriel a profité de la présence d’élus locaux, de représentants de la profession, de la presse locale et de la presse spécialisée pour en expliquer le fonctionnement dans le détail.

Les 6,2 M€ investis, cofinancés par l’Etat dans le cadre du programme France 2030 opéré par l’Ademe, permettent désormais à l’industriel de disposer, entre autres, d’un outil susceptible de tester des composants, voire des ensembles complets de composants, sans être pour autant obligé de construire un véhicule prototype.

 

A côté d’un atelier assez classique de tests de solutions technologique, la cellule principale est capable de simuler la dynamique d’un véhicule via deux machines, tout en reproduisant des conditions climatiques extrêmes (entre -15°C et +55°C en toutes saisons). Au fond du banc climatique (à droite), se trouve d’ailleurs un ensemble climatisation/chauffage correspondant à un bus de 18m électrique.

Pour les néophytes, disons que des maquettes fonctionnelles, baptisées Skate, permettent de mettre en situation tous les éléments constitutifs d’un véhicule (comme par exemple la chaîne de traction ou les systèmes de chauffage/climatisation) sans avoir à les relier les uns aux autres en construisant un prototype.

Toutes les cellules étant interconnectées informatiquement, il est possible aux équipes d’analyser leurs réactions face aux diverses contraintes que E-Bench peut reproduire : banc climatique, banc pour composants individuels, banc de tests en boucle en fermée…

Selon les équipes d’Iveco Bus, la mise en regard des diverses analyses obtenue, compatibles d’ailleurs avec toutes les énergies actuellement disponibles dans la gamme du constructeur (dont l’hydrogène, NDLR), permettrait de réduire d’environ 12 mois la conception d’un véhicule, son double virtuel ayant subi tous les tests nécessaires à Vénissieux.

 

 

 

Ceci n’est pas un bus, et pourtant… Tous les composants d’un bus électrique sont ici présents et peuvent être testés de façon interconnectée, recréant de fait un véhicule virtuel.

Pour autant, E-Bench dispose aussi d’un banc à rouleau, intégré au sein de la cellule de test climatique, qui permettra de valider en final, et cette fois sur un véhicule complet, les choix techniques effectués au long du processus.

Autre point fort de ce concept E-Bench, la possibilité de modéliser les structures d’usage de chaque client, et ce, ligne par ligne. Iveco Bus serait donc logiquement susceptible de voir comment réagissent aux contraintes tous les système et équipements de ses véhicules, avant même de répondre aux appels d’offres.

 

 

 

Toutes les données collectées à travers les différents skates permettent d’analyser les réactions d’un véhicule virtuel dans de multiples conditions, notamment celles qui correspondront aux contraintes rencontrées sur les lignes des futurs clients d’Iveco France.

Un avantage qui devrait par exemple donner quelques longueurs d’avance à l’industriel dans le cadre de son programme Energy Mobility Solutions, qui se propose de fournir aux réseaux de transport public un ensemble de solutions électriques clefs en mains, et de fait, théoriquement adapté à leurs besoins propres…

En préambule de la visite organisée, Stéphane Espinasse, président d’Iveco France, a toutefois tenu à rappeler que la marque misait plus que jamais sur un mix-énergétique le plus complet possible.

Il a rappelé, comme le fit aussi Solène Grange, directrice générale d’Iveco France, que ce « mix » était encore plus que pertinent dans l’Hexagone. Elle a d’ailleurs tenu à mettre l’accent sur la baisse du marché des autobus électriques à la mi année 2023, notamment du fait de la disparition des aides.

Solène Grange a enfin rappelé que dans le secteur de l’interurbain, sur lequel Iveco détient 58,2% de part de marché, les trois quarts des livraisons concernaient aujourd’hui des autocars roulant au gaz ou au bio-gaz.

« Si, dans le domaine des autobus urbain, le 100% électrique est peut-être atteignable en 2030, a conclu Stéphane Espinasse, il ne faut pas sous-estimer la vulnérabilité économique actuelle du transport public et ne pas négliger certaines des contraintes qui pèsent sur d’autres acteurs du transport collectif. Il serait donc souhaitable, tout en maintenant des objectifs ambitieux, qu’ils soient plus réalistes… ».

Tribune. Le biométhane pour décarboner les transports, la solution providentielle ?

Tribune. Le biométhane pour décarboner les transports, la solution providentielle ?

Avec 31% des émissions de GES et en constante augmentation depuis 30 ans, le transport est l’activité la plus polluante en France, en plus d’être très énergivore. Le décarboner est une nécessité pressante. Si l’électrification et l’hydrogène sont mis en avant, l’importance du biométhane est à considérer sérieusement. 

S’il tient ses promesses, 10% de la demande du secteur du transport en 2030 et 25% en 2050 pourraient être couverts par le biométhane ! Économiquement attractif et réduisant de 50% à 70% les GES par rapport à un carburant fossile, ce biocarburant apporterait d’autres bénéfices collatéraux. Mais est-ce vraiment la solution providentielle ? Décryptage.

Le transport, un secteur très gourmand en énergie

Depuis 1965, la consommation finale d’énergie dans le secteur du transport en France a été multiplié par 3, passant de 174 TWh à 525 TWh [1]. En 2019, près de 85% de cette consommation énergétique est attribuable aux énergies fossiles dans le transport routier, responsable de 29 % des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) en France.

Depuis le Protocole de Kyoto, qui visait à réduire les émissions de GES de 5,2% d’ici 2020 par rapport à 1990, seule la Covid a permis d’atteindre l’objectif uniquement par la diminution significative des déplacements !

Car les émissions du transport stagnent à 10% au-dessus du niveau depuis 1990, en contradiction totale avec ce Protocole et désormais avec Fit for 55. En effet, l’objectif de Fit for 55 est de baisser les émissions de GES de l’Union Européenne de 55% d’ici 2030 par rapport à 2005.

La nécessité de décarbonation du secteur est donc pressante et quatre alternatives aux énergies fossiles existent à ce jour : l’électrification, les batteries, l’hydrogène et les biocarburants.

Les biocarburants, solution majeure de décarbonation ?

Cette dernière alternative, bien que peu médiatisée, offre un fort potentiel facilement déployable : du biogazole produit par exemple avec des huiles de cuisson usagées émet 84% d’émissions de GES en moins par rapport à l’essence [3].

Les biocarburants ont cependant mauvaise presse. Ils sont en effet associés à une accaparation de terres cultivables au détriment de l’alimentation.

Cette affirmation est en partie vraie pour les biocarburants de 1ère génération avec  notamment le bioéthanol nécessitant 3% des surfaces agricoles françaises [4]. Il existe pourtant un contre-exemple, le biodiesel B100 d’Oleo100, produit à partir de graines de colza françaises, n’entrant pas en compétition avec l’alimentation vu que seul un tiers de la production nationale suffit à saturer le marché français.

L’autre point noir des biocarburants de 1ère génération réside dans leur retour sur investissement énergétique, l’EROI, ratio de l’énergie produite sur l’énergie dépensée sur l’ensemble du cycle de vie. Pour que l’exploitation d’un gisement d’énergie ne soit pas une aberration, l’EROI doit être supérieur à 3 [5]. Or, les biocarburants de 1ère génération ont souvent des EROI compris entre 0,7 et 1,3 : autrement dit, ils consomment souvent plus qu’ils ne produisent !

Les biocarburants de 2e génération, constitués à partir de déchets, permettent de résoudre plusieurs problèmes posés par la 1ère génération. N’entrant pas en concurrence avec l’alimentation, ils valorisent des déchets non-exploités jusque-là et ont des EROI plus élevés allant de 2 à 11.

A l’heure actuelle, seul le biométhane, biocarburant de 2e génération, est commercialisé.

Potentiels de production de biométhane en France

En combinant l’ensemble des potentiels de production de biométhane et en prenant en compte les rendements de conversion selon le type de production, le potentiel de gaz injectable en France serait de 460 TWh PCS. Mais ce potentiel de production n’est pas réparti de manière homogène.

Ainsi, les départements bretons concentrent les plus forts potentiels (~10 TWh chacun). Mais, à l’échelle régionale, la Nouvelle Aquitaine et l’Auvergne Rhône Alpes ont les gisements les plus importants. Dans le cadre d’Appels à Projets, l’échelle administrative va donc avoir un poids important pour un projet de production de méthane.

De plus, d’après Emmanuel Uwandu, fondateur de Gas360, le développement du biométhane par les régions ou municipalités apporteront de nombreux bénéfices collatéraux :  source de revenus pour les collectivités (ventes des déchets municipaux aux producteurs de biométhane, taxes), création d’emplois locaux, aide à l’atteinte des objectifs de réduction des GES, promotion d’une économie circulaire et dans certains cas, indépendance énergétique.

Néanmoins, GRDF, GRTgaz et Teréga s’accordent à dire qu’une production réaliste de biométhane en 2050 serait plutôt de 320 TWh [6]. D’après Teréga, le gaz fournirait 10% de la demande énergétique du transport en 2030 et au moins un tiers en 2050, sachant que la consommation énergétique du transport routier diminuerait (-32% d’ici 2030 [7]). Ainsi, si les véhicules hydrogènes sont beaucoup évoqués dans l’actualité, en réalité, dans le tiers des véhicules roulant au gaz en 2050, plus de 75% rouleront au biométhane !

A l’heure actuelle, la capacité de production et d’injection française de biométhane est de 10,05 TWh répartie entre 565 sites de méthanisation [8], et le nombre de véhicules GNV en circulation est d’environ 32 000 [9]. Le chemin sera long avant d’atteindre les 320 TWh de production et les 5 à 10 millions de véhicules GNV en 2050.

D’autres moyens de production aidant au développement de la filière sont cependant étudiés : les biocarburants de 3e génération, basés sur la culture de microorganismes (algues, levures ou bactéries). Tant au niveau de la décarbonation du secteur du transport, que pour le chauffage urbain ou la production d’électricité dans les centrales à gaz, le biométhane a ainsi de belles perspectives de développement devant lui.

Sources

[1]     Commissariat général au développement durable, « Bilan énergétique de la France pour 2020 », Service des données et études statistiques (SDES), 27 janvier 2022.

[2]     Commissariat général au développement durable, « Émissions de gaz à effet de serre du transport », Chiffres clés transports 2022, mars 2022.

[3]     Parlement Européen et Conseil de l’Union Européenne, « Directive (UE) 2018/2001 du Parlement Européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables ». 21 décembre 2018.

[4]     Ministères Écologie Énergie Territoires, « Biocarburants ». https://www.ecologie.gouv.fr/

[5]     C. A.S. Hall, S. Balogh, et D. J.R. Murphy, « What is the Minimum EROI that a Sustainable Society Must Have ? », Energies, 23 janvier 2009.

[6]     Teréga, GRDF, GRTgaz, et SPEGNN, « Perspectives Gaz : Vers un territoire national neutre en carbone en 2050 avec 100 % de gaz renouvelables et bas-carbone ». 2022.

[7]     E-Cube Strategy Consultants, « Marché français des biocarburants ». février 2019.

[8]     Open Data Réseaux Énergies (ODRÉ), « Observatoire de la filière biométhane ».

[9]     Association Française du Gaz Naturel Véhicules, « Véhicules GNV en circulation en France ».

Tribune. Les voies d’amélioration des batteries de véhicules électriques

Tribune. Les voies d’amélioration des batteries de véhicules électriques

Le marché mondial des batteries Li-ion pour véhicules électriques devrait atteindre plus de 380 Mds$ US d’ici 2034, tiré principalement par la demande de voitures électriques à batterie, mais avec une croissance rapide dans d’autres secteurs, y compris les fourgonnettes électriques, les camions, les bus, les deux-roues et les véhicules tout-terrain.

Les objectifs en matière d’électrification et d’émissions, l’amélioration des performances des batteries et un coût total de possession de plus en plus attractif pour certains segments de véhicules sont à l’origine de cette croissance de la demande de véhicules électriques à batterie (VE).

Néanmoins, l’amélioration des performances et du coût des batteries est recherchée et, bien que les développements puissent devenir de plus en plus progressifs, il existe plusieurs voies pour l’amélioration continue de la technologie des batteries Li-ion.

Le nouveau rapport de recherche d’IDTechEx,  » Blocs De Batteries Li-Ion Et Systèmes De Gestion De Batteries Pour Véhicules Électriques 2024-2034« , propose une analyse des technologies, des conceptions et des tendances entourant les cellules, les packs et les systèmes de gestion de batterie (BMS) Li-ion, y compris des prévisions de la demande en Li-ion par application EV.

Les cellules 

À court terme, les cellules de batteries pour véhicules électriques devraient continuer à suivre les tendances actuelles. Par exemple, la teneur moyenne en nickel des produits chimiques NMC et NCA continue d’augmenter afin d’accroître la densité énergétique et de réduire la teneur en cobalt. La tendance la plus importante est peut-être l’évolution générale vers le LFP, une option moins chère et plus sûre que le NMC et le NCA (bien qu’elle ne soit pas intrinsèquement sûre). Bien que la densité énergétique du LFP puisse être inférieure de 30 à 40% à celle du NMC ou du NCA, les avantages de son coût inférieur sont devenus incontournables au cours des dernières années.

Ainsi, la part de la fibre optique légère dans les voitures électriques a augmenté, bien qu’il faille noter que la grande majorité de cette évolution est due à la ré-adoption de la fibre optique légère en Chine. Les NMC et les NCA sont toujours privilégiés en Europe et en Amérique du Nord, bien que les LFP aient commencé à pénétrer le marché. Les produits chimiques NMC restent également privilégiés dans les packs clés en main pour d’autres segments de véhicules. Néanmoins, les pressions exercées sur les coûts et l’approvisionnement en matériaux, ainsi que les améliorations technologiques, signifient que le LFP devrait accroître sa part du marché des VE.

D’autres développements transformateurs se profilent également à l’horizon. Les annonces de développement de batteries à l’état solide se poursuivent, tandis que les premières commercialisations ont déjà lieu, par exemple, grâce aux batteries à l’état solide de type polymère de Blue Solutions. L’utilisation de matériaux d’anode en silicium devrait augmenter avec le développement de solutions d’anode en silicium plus avancées et de produits commercialement prêts, promettant des améliorations de la densité énergétique et de la charge rapide.

De nouvelles chimies cathodiques continuent également d’être explorées. Par exemple, le phosphate de lithium manganèse fer (LMFP) constitue une alternative intéressante, susceptible d’offrir bon nombre des avantages du LFP tout en augmentant la densité énergétique pour la rapprocher de celle des batteries de type NMC, bien que le déploiement commercial soit encore limité.

La conception de L’emballage

Compte tenu de l’adoption croissante de la technologie LFP dans les véhicules électriques, la conception des batteries cellule-emballage revêt une importance accrue. Ces conceptions permettent d’améliorer l’efficacité de l’emballage, augmentant ainsi la densité énergétique et contribuant à réduire l’un des principaux inconvénients de l’utilisation des batteries LFP par rapport aux batteries de type NMC ou NCA. CATL et BYD ont mis en œuvre des conceptions CTP aux côtés de Tesla, Stellantis et de divers autres fabricants. Pour améliorer la densité énergétique gravimétrique, les boîtiers de batterie en polymère léger sont proposés comme alternative aux boîtiers en acier et en aluminium existants.

Les conceptions à double chimie sont également explorées par des entreprises telles que CATL, NIO et Our Next Energy. Our Next Energy présente l’exemple le plus extrême avec des plans visant à coupler une chimie à haute densité énergétique mais à faible durée de vie pour en faire un LFP à autonomie étendue.

En fin de compte, les combinaisons de différentes chimies Li-ion, ou même la combinaison de Li-ion et de Na-ion, pourraient contribuer à optimiser les compromis inévitables entre la puissance, la densité énergétique, la durée de vie et les performances à basse température.

La gestion thermique

La gestion thermique et la protection contre les incendies sont devenues des considérations essentielles pour les batteries des véhicules électriques, compte tenu des problèmes de sécurité, des incendies très médiatisés et des rappels de batteries. Alors que les premiers modèles de véhicules électriques utilisaient un refroidissement passif par air, le refroidissement par liquide est devenu plus important dans divers segments de véhicules au cours des dernières années. Selon les données d’IDTechEx, les modèles à refroidissement liquide actif représentaient 90 % du marché des voitures électriques, contre un peu plus de 50 % en 2015. Cette tendance ne s’applique pas seulement aux voitures électriques.

La plupart des batteries clés en main destinées aux véhicules utilitaires sont également proposées avec un système de refroidissement liquide. À mesure que les progrès de la technologie des cellules deviennent de plus en plus incrémentiels, les développements dans des aspects tels que la gestion thermique deviennent de plus en plus importants non seulement pour maintenir un fonctionnement sûr, mais aussi pour maximiser les performances disponibles des batteries Li-ion.

Les systèmes de gestion des batteries

Le système de gestion de la batterie (BMS) joue un rôle essentiel dans le fonctionnement sûr et fiable de toute batterie Li-ion. Si la fonctionnalité principale d’un système de gestion de batterie est relativement bien définie, elle offre également la possibilité d’élargir l’enveloppe de performance des batteries Li-ion.

Des améliorations au niveau de la sécurité, de la durée de vie, de la charge rapide et même de la densité énergétique sont possibles grâce aux développements du BMS et, surtout, avec un besoin minimal de sacrifier l’un pour l’autre.

Le développement et la mise en œuvre d’une estimation plus précise de l’état de la batterie et des cellules (par exemple, état de charge, état de santé, état de puissance) sont essentiels pour permettre l’amélioration des performances, ce qui permet d’extraire en toute sécurité les performances maximales d’une batterie.

Au-delà des développements de logiciels et d’algorithmes de BMS, des solutions de BMS sans fil sont également en cours de commercialisation. En mettant en œuvre des solutions sans fil, une grande partie du câblage peut être supprimée, ce qui permet de réduire le poids et d’éliminer les modes de défaillance potentiels. Bien que le déploiement soit relativement lent, avec l’annonce initiale par GM de son BMS sans fil en 2020, les fabricants de semi-conducteurs pour BMS proposent désormais des solutions pour les conceptions de BMS sans fil.