Interview. HCI, la quarantaine électrique !

Interview. HCI, la quarantaine électrique !

Pour HCI, qui distribue la gamme Karsan dans l’Hexagone, mais aussi en Belgique, au Luxembourg et en Suisse, l’année 2024 est à marquer d’une pierre blanche. En effet, l’entreprise de Loire-Atlantique fête ses 40 ans d‘existence et, le 22 février dernier, a reçu 2 trophées lors de la Convention des Dealers Karsan : celui du meilleur vendeur Karsan pour 2023 et celui récompensant la plus grosse flotte électrique Karsan vendue de 2019 à aujourd’hui. Rencontre avec Lionel Poch, PDG de HCI.

 

Remise des prix à Lionel Poche lors de la Convention des Dealers Karsan le 22 février.

 

Car & Bus News : HCI vient d’être doublement récompensé en tant que distributeur de Karsan, quel bilan tirez-vous de cette année 2023 ?

Lionel Poch : Depuis 2019, nous enregistrions une forte croissance chaque année, pour arriver à la commercialisation d’une bonne centaine de véhicules à chaque exercice. En 2023, nous avons toutefois dû constater un léger recul des commandes. En revanche, nous sommes particulièrement confiants, quant aux résultats à venir pour l’année en cours, puisque, sur le marché suisse, nous pensons enregistrer une quarantaine de commandes, notamment avec notre e-Jest. Globalement, chaque année, nous tablons toujours sur un volume de commandes plus ou moins identique pour la France, et ce sont ensuite les marchés luxembourgeois ou suisse qui viennent compléter nos résultats.

 

Le e-Jest de Karsan, distribué par HCI.

 

CBN : Quels sont les véhicules phares de votre gamme ?

LP : Nos deux modèles les plus demandés sont actuellement les e-Jest et e-ATAK, qu’il s’agisse de réseaux ou d’indépendants. En tant que distributeurs de véhicules purement électriques, nous avons par ailleurs choisi de proposer un système complet comprenant non seulement le véhicule, mais aussi le dispositif de recharge et un contrat « full maintenance » complètement sur mesure, aujourd’hui fortement prisé des clients, qui a l’avantage de rassurer ceux qui découvrent l’électrique et permet à tous de prendre le temps de former leurs équipes à cette nouvelle énergie, sans attendre pour la mise en service de leurs nouveaux véhicules propres.

 

CBN : Votre gamme ne se limite pas à ces deux modèles, qu’en est-il des autres véhicules ?

LP : Premièrement, nous répondons actuellement à de nombreux appels d’offres avec nos différents modèles. Dans le même registre, nous sommes en train de nous faire référencer dans les centrales d’achat. Enfin, nous avons été sollicités pour des e-ATA 10 m, ainsi que pour des e-ATA hydrogène : toute la gamme devrait donc participer à terme à notre développement.

 

 

Un Karsan e-ATAK autonome.

 

CBN : Vous avez à ce propos présenté l’an dernier un e-ATAK autonome, comment ce modèle particulier a-t-il été accueilli ?

LP : Je crois beaucoup à ce véhicule, qui est le seul à ce jour à proposer un système d’exploitation autonome pour une capacité de 52 places. Pour l’instant, nous avons eu des prises de contacts et des demandes d’offres, mais nous pâtissons d’un vrai retard en matière de réglementation, comme dans le domaine des assurances. Pour le développement de ces véhicules, qui seraient idéaux pour « les derniers kilomètres » de certains services, il manque encore une véritable volonté politique d’accélérer les choses, et il est donc souvent complexe de procéder à des essais. Pour l’instant, le gouvernement a nommé une commission sur le sujet, nous verrons bien comment, et à quelle vitesse les choses avanceront… De toute façon, il convient de reconnaître qu’il s’agira d’un marché complexe, notamment à cause du prix de ce type de véhicule.

 

Karsan e-ATA Hydrogen.

 

CBN : Souffrez-vous, comme la plupart des industriels du secteur, d’un problème de délais dans vos livraisons ?

LP : Oui et non. Certes, ces dernières années, nous avons souffert de retards, qu’il nous était parfois difficile d’anticiper. Mais aujourd’hui, nous constatons que cette période est en train de se résorber, et si nous étions passés de délais de livraison de 4 mois avant la crise Covid à des délais de près de 9 mois fin 2022-début 2023, nous sommes maintenant revenus à une visibilité à 5 ou 6 mois, ce qui rassure la clientèle. C’est une raison de plus pour nous d’être plutôt optimistes pour cette année 2024, qui commence avec notre 40e anniversaire, qui confirme une fiabilité et une durabilité, que sauront apprécier nos clients.

Interview du mois. Le marché du VO retrouve-t-il ses couleurs ? Teamnegoce nous répond

Interview du mois. Le marché du VO retrouve-t-il ses couleurs ? Teamnegoce nous répond

Teamnegoce est une institution dans le secteur du marché des autocars et autobus d’occasion. Créée en 1998, l’entreprise installée en région lyonnaise est aujourd’hui dirigée par Alain Stanis, fils du créateur. Fin-connaisseur de cette activité, le spécialiste répond aux questions de Car & Bus News.

 

Teamnegoce, spécialiste des VO est installé en région Rhône-Alpes.

 

Car & Bus News : A combien de véhicules estimez-vous le marché annuel des autocars et autobus d’occasion ? Et quels sont les modèles les plus demandés ?

Alain Stanis : Globalement, on peut estimer ce marché à quelque 1000 véhicules chaque année, un volume qui reste assez stable. Au niveau de la demande, il s’agit, à notre niveau, surtout d’autocars de tourisme. On nous demande par exemple beaucoup de Setra ou de Mercedes-Benz. Il est vrai que plus ou moins 30% de nos transactions se font à l’exportation, notamment vers la Pologne et les Balkans. Pour ces acheteurs, ces deux marques représentent des valeurs sûres et ils peuvent s’appuyer sur des réseaux de concessionnaires bien implantés et une grande facilité à obtenir les pièces détachées. Autre tendance marquante ces dernières années, on nous demande des véhicules plus récents, et uniquement des Euro VI pour le marché français. Globalement, nous sommes face à une forte demande de véhicules de 22 places, d’autocars scolaires en France, et de véhicules de tourisme pour l’étranger, le tout d’un âge de 10 à 15 ans.

 

CBN : Quel est votre volume de transactions annuel, et comment trouvez-vous les VO que vous commercialisez ?

AS : Avant la crise du Covid, nous réalisions plus ou moins 120 transactions chaque année. Aujourd’hui, nous sommes descendus à une soixantaine faute d’acheteurs, ce qui nous a obligé à réduire notre équipe de cinq à deux personnes. En revanche, la tendance est redevenue positive et nous retrouvons nos clients. Enfin, concernant notre capacité à trouver les véhicules demandés par le marché, nous travaillons essentiellement par connaissance, ce qui n’est pas toujours facile, car beaucoup de grosses entreprises ne souhaitent pas avoir recours à d’autres négociants que ceux auxquels ils sont habitués.

 

CBN : Existe-t-il en France des cycles de ventes pour les VO d’autocars et d’autobus en France ?

AS : Il n’y a pas de cycles évidents, les ventes correspondent plutôt aux rythmes des appels d’offres. Pour notre part, nous allons chercher les véhicules directement afin de pouvoir les essayer lorsque nous les amenons jusqu’à notre atelier. Cet essai nous permet de faire la révision, soit dans notre atelier, soit chez un de nos partenaires. Lorsqu’il est vendu, nous le livrons aussi nous-même.

 

CBN : Comment devrait évoluer le marché français des VO dans les années à venir ?

AS : Le marché retrouve ses couleurs, mais il y a encore quelques zones d’ombre. Par exemple, les délais de livraison très longs pour les véhicules neufs repoussent d’autant les ventes de VO par les entreprises. Autant de phénomènes qui ne me font pas entrevoir la normalisation de ce marché avant 2025. Par ailleurs, l’offre et la demande du moment rendent les VO plutôt chers, notamment à l’étranger.

 

CBN : Comment vous êtes-vous adaptés à cette nouvelle situation ?

AS : Par exemple, nous avons développé la location de véhicules. A dire vrai, nous en avions fait beaucoup il y a une dizaine d’années. Aujourd’hui, comme il est plus difficile de trouver des VO, nous avons réactivé cette offre, car il vaut mieux pour nous les garder et les louer sur deux ou trois mois en période de suractivité. J’ai ainsi aujourd’hui une quinzaine de véhicules Euro VI qui sont destinés à la location.

 

CBN : Enfin, comment percevez-vous l’arrivée sur le marché des véhicules électriques à batteries par rapport à votre activité ?

AS : Comme toujours, nous saurons nous adapter, mais pour l’instant je préfère ne pas m’aventurer sur ce terrain car il y a à mon sens encore trop d’inconnus avec l’électrique, notamment au niveau de l’état des batteries ou de leur évolution d’une génération à l’autre.

Les cars Express : nouvel eldorado pour l’autocar ?

Les cars Express : nouvel eldorado pour l’autocar ?

Mis sur le devant de la scène, les liaisons et projets d’autocars express se multiplient ces derniers temps. Car & Bus News se penche sur le concept.

Sujet relancé sur le devant de la scène, notamment avec la loi sur les Services Express Régionaux Métropolitains (SERM) ayant inclus des liaisons de cars express dans le concept, les projets de liaisons d’autocars express se sont multipliés ces derniers temps. C’est l’occasion de mieux connaître ce qu’est un car express.

Une ligne de car express est d’abord « un nouveau réseau de transport utilisant la route, indique ainsi François Durovray, président du conseil départemental de l’Essonne, administrateur d’Ile-de-France-Mobilités (IdFM) et auteur du schéma directeur des cars express en Ile-de-France. Ce réseau propose à ses usagers un transport garanti en temps et confortable, afin que le voyageur abandonne l’usage de sa voiture particulière et se reporte sur les transports en commun ».

 

François Durovray.

 

Le choix du car comme véhicule traduit d’abord une volonté de confort du service, avec une « garantie de place assise à bord pour tous les voyageurs », annonce d’emblée François Durovray. Les véhicules, qui seront à un ou deux niveaux en fonction des lignes, offriront divers services à bord : Wifi, ports USB, liseuses individuelles, voire des espaces pour la tenue de réunions. L’objectif est que le temps contraint passé par l’usager au volant de sa voiture devienne un temps de transport utile. Et ce pour lui permettre de travailler, se divertir ou se reposer. Afin d’être facilement identifiable, les véhicules porteront une livrée spécifique reprenant le numéro et les arrêts de la ligne, ainsi que la mention « Express ». On se souvient par exemple qu’à la création du réseau Seine & Marne Express en 2006, les cars affectés disposaient d’une livrée spécifiquement conçue pour ce réseau. Les arrêts de ces lignes seront réduits, afin de maximiser la vitesse commerciale, ce d’autant plus que les flux domicile-travail sont la cible de trafic des cars express. Le temps de trajet entre les deux terminus de la ligne ne devra pas excéder de 50% la durée du même parcours en voiture. Les fréquences devront être très élevées, toujours dans l’objectif de capter les flux domicile-travail. S’il est impossible de fixer un seuil, François Durovray prend l’exemple de la ligne 91.03 reliant Dourdan à Massy RER, offrant une fréquence de 5 minutes en heure de pointe. Le président de l’Essonne indique également que les heures de pointe pourront varier en fonction des lignes. Les pointes des lignes vers les aéroports (Orly et Roissy notamment) pourront avoir leur pointe le soir lors de la prise de service des travailleurs de ces plateformes.

 

La ligne express A14, entre Mante la Jolie et La Défense.

 

Les gares routières, point-clé pour les cars express

 

Les autocars express peuvent être lancés rapidement sans modifications importantes d’infrastructures. Cependant, les gares routières nécessiteront rapidement de nouveaux investissmeents, « car les lignes devront bénéficier de gares routières confortables avec des services pour les voyageurs », éclaire François Durovray. Sur le modèle des gares ferroviaires, elles seront des Pôles d’Echanges Routiers Multimodaux (PERM). Celles-ci devront être chauffées et disposer de salles d’attentes avec des commerces de première nécessité ou encore des conciergeries. La gare routière devra être un pôle multimodal d’où l’on arrive en bus urbain, en voiture particulière, covoiturage ou via un mode actif. De par leur coût, les gares routières ne pourront pas être multipliées à l’infini et devront nécessairement être circonscrites aux plus importants pôles. Elles sont également limitées afin de ne pas pénaliser la vitesse commerciale des cars, toujours pour inciter au maximum au report modal depuis la voiture particulière. Cependant, certaines gares sont déjà saturées et doivent nécessiter des investissements. C’est par exemple le cas des gares de Massy (dont les travaux sont en cours) ou Evry. Dans ce dernier cas, plusieurs lignes en projet aboutissent à la gare, nécessitant son agrandissement. Afin de faciliter leur déploiement, une phase transitoire peut être acceptée en éloignant légèrement le point de départ, mais la situation doit être temporaire.

 

Les voies réservées, bienvenues mais pas indispensables

 

La présence de voies réservées pour les lignes est « mieux, mais pas nécessaire ». Sur les 1200 kilomètres de lignes projetées par exemple en Ile-de-France, seuls 10% s’avèrent être des voies réservées. Celles-ci sont essentiellement concentrées dans l’hypercentre, à l’approche du pôle multimodal connecté au réseau ferré. Dans le reste de la France, plusieurs lignes n’en sont pas équipées sur la totalité du trajet. Lorsqu’une voie doit être installée, celle-ci peut être prise sur la circulation routière ou être spécialement construite. Dans ce dernier cas, l’investissement est plus lourd, de par la réglementation associée (notamment le respect de la loi sur l’eau).

 

Les cars express en IDF.

 

Mais un moyen de déployer des voies réservées à investissement quasi-nul existe : la Bande d’Arrêt d’Urgence (BAU). Moyennant une révision de la philosophie étatique, François Durovray estime que cet équipement peut être très rapidement utilisé pour devenir une voie réservée pour des autocars express.

Le projet francilien

 

En Ile-de- France, le 30 novembre 2023, le schéma directeur des cars express a été présenté. Celui-ci a identifié environ 10 corridors pouvant recevoir ces liaisons. En vertu de cela, les services d’IdFM ont établi un schéma de 45 lignes pouvant voir le jour dans un horizon temporel de quatre ans. Les premières vont être lancées dès l’automne 2024 et sont celles sans aucune contrainte technique ardue. Sont inclus notamment le renfort de neuf liaisons existantes, dont le corridor sur l’A10 et l’A14. La seconde phase de déploiement de lignes est planifiée pour 2026-2027. Quelque 70 M€ devront être investis pour l’achat des véhicules. Le cout d’exploitation des lignes est planifié à un cout de 4€/kilomètre commerciaux parcourus, soit environ 70 M€ de frais annuels. Les 1200 kilomètres envisagés en IdF représentent un investissement de près d’un milliard d’euro, 100 M€ étant prévus dans le CPER (Contrat de Plan Etat-Région).

 

Les provinces s’y mettent aussi

 

Dans les territoires, certaines liaisons sont déjà présentes depuis de nombreuses années. En particulier sur le corridor de l’A48 entre Voiron et Grenoble ou sur l’A51 entre Marseille et Aix-en-Provence, avec la ligne 50, comptant quatre arrêts et transportant 13000 voyageurs par jour. Mais un exemple a récemment fait parler de lui : la ligne 430 connectant Bordeaux et Blaye. La Région Nouvelle-Aquitaine, Bordeaux Métropole et Nouvelle-Aquitaine Mobilités, avec le soutien du Département de la Gironde sur les aspects liés aux infrastructures routières, ont lancé le 8 janvier dernier la ligne 430.

 

Le car express Blaye-Bordeaux.

 

Opérée par Transdev, cette ligne dispose d’une forte fréquence (20 minutes en heures de pointe, à l’heure le restant de la journée) et offre de nombreuses correspondances avec le réseau existant (réseau urbain de Bordeaux, lignes de car régionales et TER à St-André-de-Cubzac). Les véhicules, dont certains fonctionnent au Biogaz et biocarburant, disposent du Wifi et de ports USB. Mais les projets vont se multiplier dans les prochains mois, avec le déploiement des Services Express Régionaux Métropolitains (SERM). De quoi faire naître de nombreux projets…

 

L’inclusion des cars express dans les SERM

 

La loi n°2023-1269 régissant les SERM indique qu’un tel service « est une offre multimodale de services de transports collectifs publics qui s’appuie prioritairement sur un renforcement de la desserte ferroviaire. Cette offre intègre la mise en place de services de transport routier à haut niveau de service ». La loi indique également qu’il « est intégré aux autres réseaux de transports sur les territoires concernés, notamment aux réseaux de transports urbains et routiers » et qu’il doit lutter contre l’autosolisme. Si besoin, les gestionnaires d’autoroutes et de voies routières express du périmètre concerné doivent être inclus dans la concertation du projet. Les projets comprennent, sur chacun des axes routiers concernés, « une trajectoire possible de réduction du trafic routier cohérente avec les objectifs de décarbonation ». Lorsqu’une section d’autoroute ou de voie express est concernée par un projet de SERM et comporte au moins trois voies, « la faisabilité et l’opportunité de la conversion d’une voie en voie réservée au covoiturage et aux transports collectifs [est] examinée au regard de la prévision de trafic routier établie », stipule enfin la loi.

 

Une duplication de l’exemple madrilène ?

 

Le réseau d’autocars express de Madrid est assurément un exemple intéressant de lignes express et a été étudié de près. Les cars viennent se connecter à la couronne formée par le métro (en particulier la ligne n°6, circulaire) dans des pôles d’échanges où les correspondances entre tous les modes sont fluides et rapides. Le président de l’Essonne explique que son projet de liaisons express par cars reprend l’intégralité du concept à l’exception de trois items. Les cars madrilènes bénéficient sur les accès aux pôles d’échanges multimodaux de voies réservées « réversibles », circulées dans le sens de la pointe, ce que le président ne souhaite pas déployer.

 

Autocar express de Madrid.

 

Avant de s’élancer sur les autoroutes, les lignes madrilènes effectuent une desserte fine des villages en périphérie, ce qui ne sera pas le cas des lignes franciliennes. Enfin, l’arrivée des liaisons dans les pôles multimodaux nécessiterait des améliorations. A ces réserves près, François Durovray ne cache d’ailleurs pas s’être grandement inspiré de la capitale Espagnole, mettant en avant la conception du réseau de lignes Express menés en même temps que celle du métro, contrairement à la région parisienne, où il sera requis de revenir sur le sujet.

Interview : ABC Informatique et le retour de la croissance

Interview : ABC Informatique et le retour de la croissance

ABC Informatique, créée en 1988, est éditeur de logiciels, spécialisé dans les métiers du transport de personnes et dans le tourisme. Incontournable en France sur la première activité, il connait une croissance importante dans la seconde. Rencontre avec Nicolas Bertolami, PDG d’ABC Informatique.

 

Car & Bus News : En cette année 2024 qui commence, votre activité a-t-elle retrouvé un développement normal après les crises à répétition ?

Nicolas Bertolami : De fait, nous avons beaucoup de travail et notre niveau d’activité est meilleur que lors de la période avant Covid. A cause de cette crise, nos clients, nouveaux ou pas, avaient retardé certains investissements, cette période-là est révolue. En 2023 par exemple, 60% de nos ventes correspondent à de nouveaux clients qui sont venus vers nous, car nous ne démarchons pas. A titre d’exemple, nous avons gagné le marché du nouveau BRT de Dakar. Cette bonne orientation du marché nous a d’ailleurs permis de réaliser un chiffre d’affaires de 4,6 M€, le record dans l’histoire d’ABC Informatique.

 

Les nouveaux locaux d’ABC Informatique sont énergétiquement neutres.

 

CBN : Quel est le temps nécessaire entre la prise de contact et la mise en œuvre de vos solutions dans une entreprise ?

NB : Tout dépend bien entendu de la taille de l’entreprise. Globalement, lorsqu’il s’agit d’AbcCar, la suite modulaire qui constitue la base de données unique d’une entreprise de transport de personnes, il faut compter un mois entre le démarrage de nos actions et la mise en œuvre de notre solution au niveau de l’exploitation, un petit délai supplémentaire sera alors nécessaire pour la mise en place de la prépaie.

 

CBN : Avez-vous développé des nouveaux produits ?

NB : A proprement parler, non, nous nous appuyons toujours sur AbcCar et AbcTourisme. En revanche, nous sommes avant tout des techniciens de l’informatique et ces deux produits sont en évolution permanente. A titre d’exemple, notre portail conducteur connecté (lancé en 2012) n’a cessé d’évoluer. Il s’est aujourd’hui enrichi d’un système d’inspection des véhicules par QR Code. Ce système permet que vérifier que le conducteur prévu a bien fait le tour du véhicule qui lui était affecté, au moment prévu et pour la course prévue. Dans des registres proches, les conducteurs peuvent aussi recevoir des notifications sur Androïd comme IOS. Nous proposons aussi un système de connexion avec les boîtiers embarqués qui permettent de vider le chronotachygraphe à distance, ce qui permet de préparer la prépaie au fil de l’eau, etc. Enfin, nous avons beaucoup travaillé sur les interfaces, notamment pour répondre aux attentes de certaines AOM qui souhaitent recevoir en temps réel les informations sur l’exploitation. C’est un gros travail, car toutes les AOM n’ont pas les mêmes SAE.

 

…Ils sont aussi éco-conçus.

 

CBN : Quel est l’impact sur votre activité de la transition énergétique en cours dans l’ensemble des secteurs du transport de personnes ?

NB : Notre intervention se situe par exemple au niveau de la gestion de l’atelier, au sein duquel doivent désormais coexister plusieurs énergies. Nous avons par exemple été récemment sollicité pour la mise au point d’une API (Application programming Interface, ou interface de programmation d’application, NDLR) que nous testons pour interfacer des logiciels de charge intelligent. En substance, le logiciel va optimiser la recharge en fonction des contraintes d’exploitations du lendemain. L’objectif étant là d’optimiser la mise à disposition des véhicules, le coût de la recharge et la durée de vie des batteries de traction.

 

CBN : On parle beaucoup de cyber-sécurité aujourd’hui. A quel niveau ABC Informatique peut-elle intervenir sur ce sujet au profit des entreprises du TRV ?

NB : Les entreprises de ce secteur ne sont pas plus les cibles de ce type d’attaque que n’importe quelle autre. Il est toutefois important aujourd’hui de réduire la surface d’attaque possible et de se donner les moyens de revenir le plus rapidement possible à un fonctionnement normal. La vraie question posée est celle de la mise à disposition des données. Il est donc nécessaire de réfléchir à l’architecture informatique de l’entreprise, à la gestion des droits d’accès, aux plans de réaction pour mesurer l’impact d’une attaque et en réduire les conséquences. On peut même envisager des moyens « offline » au cas où l’intégralité du système d’information est touché… Il s’agit en fait de mettre au point des Plans de continuité d’activité, et des Plans de reprise d’activité. Nous participons à la mise au point de ce type de plans, et lorsque des clients nous confient leurs données, nous réalisons nous même ce type d’exercices.

 

CBN : On parle d’un retour du tourisme de groupe, l’avez-vous vérifié au niveau de votre activité ?

NB : Nous assistons en effet à un retour de cette activité, même si nous n’avons pas retrouvé le même niveau qu’avant le Covid. Cependant, nous avons noté un retour des investissements dans les outils de productivité dans ce secteur, quand certains acteurs déjà implantés ne veulent plus attendre pour modifier ou moderniser leurs systèmes informatiques.

 

CBN : Quels sont les défis qu’ils vous faudra relever dans les mois et années qui viennent ?

NB : Le plus grand défi à venir sera certainement le projet de facturation électronique, même si sa mise en application a été repoussée au 1er septembre 2026. Cette évolution sera bien entendu intégrée dans nos logiciels et nous sommes en période de test. Nous attendons cependant que le gouvernement fige enfin les spécifications, notamment sur la partie tourisme, pour laquelle nous manquons encore de vision avec les problématiques de la TVA sur marge et des commissions…

Premières Journées Car & Bus News : le rétrofit à l’honneur

Premières Journées Car & Bus News : le rétrofit à l’honneur

Car & Bus News et ses six partenaires (Aftral, Belgian Bus Sales, EA autocars, Finkbeiner, Perinfo et Safra) ont réuni quinze dirigeants d’entreprises de transport de voyageurs à Cahors du 1er au 3 février.

 

Invités et participants aux premières Journées Car & Bus News.

 

Cet événement était organisé pour répondre à une question simple : «  Le rétrofit est-il LA solution de décarbonation de l’autocar ? ». Les débats ont été animés par Florence Duffour, cheffe de projet Mobilité bas carbone chez IFP Energies nouvelles (IFPEN). Cette structure est un organisme public de recherche et d’innovation, un centre de formation et un groupe industriel dans le domaine de l’environnement de l’énergie et des transports. L’IFPEN se positionne comme un tiers de confiance.

 

Le château de Mercuès, écrin des premières Journées Car & Bus News.

 

Cap sur la réduction des émissions de CO2

 

L’experte de l’IFPEN a indiqué que 31% des émissions des CO2 sont dues au transport, dont 75% issues des véhicules terrestres, mais les cars et bus ne représentent que 2% des émissions liées au transport (source : Carbone4 en 2022) et 0,7% des émissions de CO2 en France.

Pour le transport routier, des énergies alternatives au gazole existent (bioGNV, biocarburants, électricité…) mais, au 1er janvier 2023, le diesel représente 97% du parc d’autocars quand, en revanche, la part du diesel est plus faible pour les autobus.

L’Europe s’est fixé de forts objectifs en matière de réduction des émissions de CO2, avec notamment la future norme Euro 7 pour les véhicules lourds et l’interdiction de la vente des véhicules thermiques à partir de 2035. Mais c’est principalement le développement des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) qui va avoir un impact sur les flottes.

 

Florence Duffour, intervenante de l’IFP Energies Nouvelles.

 

Les solutions permettant de décarboner les flottes n’ont pas toutes le même bilan environnemental. Le véhicule électrique à batterie (BEV) a par exemple un rendement de l’ordre de 90%, un couple élevé à bas régime, 0 émission, mais son autonomie est limitée, le temps de recharge élevé et les batteries doivent encore s’améliorer (densité énergétique, durabilité et sécurité).

Concernant les véhicules à hydrogène (H2), le rendement inférieur est à un BEV. Il en existe deux types, les FCEV (équipés d’une pile à combustible) et ceux avec un moteur à combustion interne d’hydrogène. Ces derniers émettent un peu de CO2 en raison de la lubrification du moteur et nécessitent un système pour limiter les émissions d’oxydes d’azote. Un besoin de clarification législatif sera donc nécessaire pour savoir si les véhicules à moteur à combustion d’hydrogène ont le label « 0 émission ».

Autre alternative, les carburants de synthèse (e-fuels) ont un bon bilan carbone s’ils sont produits à partir d’H2 décarboné. Enfin, le bioGNV permet de réduire de 80% les émission de CO2 par rapport au diesel.

L’IFPEN a mené une analyse cycle de vie pour l’ensemble de ces technologies, de la production du carburant au recyclage du véhicule.

 

Rétrofit : une solution de transition

 

Après une définition du cadre juridique encadrant le rétrofit (l’arrêté du 13 mars 2020), l’experte a indiqué que le rétrofit permet d’obtenir une meilleure vignette Crit’air pour un coût deux à trois fois moins élevé qu’un véhicule neuf.

Plusieurs industriels proposent des solutions permettant de transformer un autocar diesel en un autocar fonctionnant au bioGNV, à l’électricité (avec des batteries ou une pile à combustible) ou avec un moteur à combustion d’hydrogène.

L’industriel Safra, partenaire de cet événement Car & Bus News, annonce un tarif autour de 320 000 € pour le rétrofit d’un autocar Mercedes-Benz Intouro ME en autocar à hydrogène avec une pile à combustible. L’homologation de ce modèle est prévue pour mars.

 

Les débats ne cessent jamais…

 

La filière du rétrofit hydrogène est en train de se structurer avec la création en janvier dernier de la « Coalition Rétrofit H2 » mais celle-ci est principalement tournée vers les camions.

L’IFPEN a mené des études pour calculer le TCO (coût total de possession) des différentes solutions. Le prix de l’hydrogène a une tendance à la baisse à moyen terme. Il devra descendre à 3 ou 4 euros le kilo pour être compétitif avec le diesel.

Le rétrofit sera donc une petite partie de la solution pour décarboner les flottes. L’ampleur de son développement dépend directement du contenu des cahiers des charges d’exploitation de services de transport public (lignes régulières ou services de transport scolaire) rédigés par les collectivités autorités organisatrices.

Cette technique devrait toutefois permettre d’accélérer la transition dans un contexte où l’offre en véhicules neufs reste actuellement limitée, bien qu’en développement. Le financement des opérations de rétrofit reste toutefois un sujet de difficulté pour les transporteurs. Un point sera  par ailleurs soulevé par plusieurs opérateurs, celui de la capacité de production réelle d’autocars rétrofités dans les années à venir, au regard des quelques 80 000 véhicules roulant encore au diesel à ce jour…

À noter qu’aucun transporteur présent à ces Journées Car & Bus News n’exploite actuellement des véhicules rétrofités. Un d’entre eux a toutefois indiqué avoir un projet de rétrofit vers l’électricité (batteries) dans le cadre d’un appel d’offres pour une ligne de transport de personnel (contrat de 4 ans).

Les participants soulignent également que le passage à l’électrique va avoir un fort impact sur les activités de maintenance car l’entretien de ces véhicules est bien plus réduit, alors qu’il nécessite toutefois une mise aux normes des ateliers.

Enfin, pour que la recharge en électricité soit possible dans les dépôts, la disponibilité de la puissance électrique nécessaire va devoir s’améliorer. Concernant l’hydrogène, le réseau de stations devra être fortement développé pour que cette énergie puisse être utilisée à grande échelle.

Ces sujets auront d’ailleurs l’occasion d’être développés lors de prochaines Journées Car & Bus News, qui se dérouleront à Rouen, du 30 mai au 1er juin prochains.

 

Les partenaires de la première édition des Journées Car & Bus News.

L’Anateep se penche sur les incivilités dans les transports scolaires

L’Anateep se penche sur les incivilités dans les transports scolaires

L’Association nationale pour les transports éducatifs de l’enseignement public (Anateep) a organisé le 25 janvier à Paris, son Séminaire national consacré cette année au sujet suivant : « Incivilités, conflits, harcèlement dans les transports de scolaires : que peut-on faire ? ».

 

Alors que la lutte contre le harcèlement scolaire est devenue une des priorités gouvernementales, l’Anateep a donc tenté, lors de son Séminaire national, de cerner la problématique de ce phénomène dans les transports scolaires.

 

Trois ateliers ont permis à différents acteurs ou experts de présenter leur expérience en la matière, l’idée étant d’en retirer une éventuelle ligne de conduite pour l’ensemble du secteur. Premier constat, de taille, tous les intervenants conviennent manquer de données fiables.

 

Selon Nadia Smondel, directrice Marketing, Etudes et QS, RATP Dev, « il est très complexe de détecter le harcèlement dans les transports, ne serait-ce que parce que le conducteur, seul adulte à bord, est de fait concentré sur sa conduite ». La responsable estime toutefois que, même si seulement une victime sur dix fait un signalement, il y aurait trois fois plus d’intimidations verbales que d’actes violents, et ce le plus souvent à l’arrêt.

 

Selon Nadia Smondel, le sentiment de harcèlement serait partagé par environ 20% des élèves transportés. Un chiffre non négligeable, et bien plus important que celui annoncé par Jean-Pierre Félix, Mission « Prévention des violences en milieu scolaire », DGESCO, Ministère de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports, qui l’estime à plus ou moins 7%.

 

Pour faire face, RATP Dev a mis en œuvre un module de formation pour ses agents, une campagne de sensibilisation des élèves de CM2, etc.

 

Pour Noémie Loureiro, directrice de Transdev Marne et Ourcq, à Meaux (un secteur plutôt urbanisé), passé un travail de sensibilisation auprès des élèves sur l’ensemble du territoire concerné, le recours à un programme de formation mis en place avec les formateurs de la Police Nationale porte ses fruits. « La présence de l’uniforme joue son rôle », explique-t-elle.

 

Concrètement, les conducteurs reçoivent une formation aux droits et devoirs de leur poste dans les locaux de la Police, un cours de self-défense et procèdent à des exercices dans les véhicules et les dépôts.

 

Tous les intervenants militent aussi pour le développement de la vidéo-surveillance qui, lorsqu’elle est mise en œuvre, représente un véritable facteur d’apaisement.

 

Du côté des autorités organisatrices, Michel Sauvage, directeur du transport routier de voyageurs de la Région Grand Est, met en avant la mise en place dans sa région (qui transporte chaque jour 186 700 élèves) du dispositif pHARe.

 

Celui-ci s’appuie sur un triptyque : la formation du personnel, la formation d’élèves « ambassadeurs » et la création de protocoles dans chaque établissement.

 

Parallèlement, la région lancera dès avril une campagne de communication autour d’un numéro d’appel dédié au harcèlement dans les transports scolaires. En substance, ce dernier sera affiché dans les autocars, sur les fiches horaires et sur la carte de transport individuelle des élèves.

 

Par ailleurs, un concours baptisé « non au harcèlement » sera organisé auprès des lycéens et collégiens, qui devront réaliser un clip sur le sujet.

 

Michel Sauvage conclura toutefois sur une vision de bon sens : « attention toutefois de ne pas stigmatiser l’autocar scolaire comme un lieu de harcèlement… ».