par Pierre Cossard | Nov 28, 2023 | Autobus, Autocar, Entreprise, Equipement, Les dossiers, Réseau
Dans le cadre du salon Solutrans, qui s’est déroulé à Lyon du 21 au 25 novembre derniers, Neste a signé deux partenariats avec Altens et Bolloré Energy pour la distribution du Neste MY Renewable Diesel sur le marché français à partir de 2024.
Neste, Altens et Bolloré Energy insistent d’ailleurs sur le fait que si la France veut atteindre les objectifs fixés par le gouvernement dans le cadre de la loi Énergie-Climat et de la Stratégie Nationale Bas Carbone, tout en respectant les objectifs européens, elle doit prendre en considération toutes les solutions disponibles pour lutter contre le dérèglement climatique. Cela nécessite de renforcer sa stratégie pour l’énergie électrique et hydrogène, mais aussi d’adopter les biocarburants et carburants liquides bas carbone.
Neste produit ainsi du diesel renouvelable à partir de matières premières 100% renouvelables, dont plus de 90% étaient en 2022 issues de déchets et de résidus.
Le Neste MY Renewable Diesel contribue à réduire les émissions de gaz à effet de serre jusqu’à 90%, lorsque les émissions du carburant sont comparées à du diesel fossile sur l’ensemble de leur cycle de vie.
Rencontre avec Johannes Hartig, directeur des ventes marché européen.

Johannes Hartig, directeur des ventes Europe de Neste.
Car & Bus News : Pouvez-vous nous présenter l’entreprise Neste, peut-être méconnue des professionnels français ?
JH : Nous sommes une société finlandaise et le premier producteur mondial de diesel renouvelable destiné aux transports terrestres et aériens. Notre procédé NEX BTL consiste en un hydrotraitement de déchets, de résidus et de graisses d’origine naturelle. Nous possédons des raffineries en Finlande, à Rotterdam, Singapour et en Californie. En 2022, le chiffre d’affaires de Neste a atteint 25,7 Mds€. Et nous avons calculé que nous aiderons nos clients à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) d’au moins 20 millions de tonnes par an d’ici à 2030.
La capacité actuelle de production de produits renouvelables de Neste est de 3,3 millions de tonnes par an. L’opération conjointe de Neste et de Marathon Petroleum à Martinez, en Californie, portera la capacité totale de production de produits renouvelables à 5,5 millions de tonnes au début de l’année 2024. Une fois achevé, le projet d’expansion de la raffinerie de Rotterdam de Neste augmentera encore la capacité totale de production de produits renouvelables de l’entreprise à 6,8 millions de tonnes d’ici la fin de 2026.
Enfin, nous avons calculé que nous aiderons nos clients à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) d’au moins 20 millions de tonnes par an d’ici à 2030.
CBN : Comment organisez-vous la distribution de votre diesel renouvelable sur le marché français ?
JH : Nous sommes présents dans l’Hexagone depuis une dizaine d’année, même si nous n’avons pas de réseau de distribution en propre et que nous nous appuyons sur des distributeurs locaux. C’est dans ce cadre que se situe notre nouveau partenariat avec Altens et Bolloré Energy, qui consistera en une mise en commun de la distribution de notre carburant en France. Nous sommes convaincus que notre carburant Neste MY répond aux ambitions des autorités organisatrices de transport et des opérateurs de transport, qui pourront décarboner leurs flottes sans investissements trop lourds et sans modification des véhicules du parc ou de leurs structures d’exploitation. Nous estimons d’ailleurs que le marché français pour ce type de carburant représente plus ou moins 5 millions de m3.
CBN : Quel est le surcoût de votre Neste MY ?
JH : Le surcoût doit être calculé en termes de coût total de la décarbonation. Et au final, celui-ci s’avère tout à fait supportable, notamment grâce à l’absence de surcoût en matière d’infrastructure. Autres points qui jouent en la faveur du Neste MY : sa haute performance grâce à un indice de cétane élevé, sa résistance aux températures extrêmes et sa remarquable tenue dans le temps, nos laboratoires ayant déjà pu constater qu’il n’y avait aucune altération du carburant 10 ans après sa production et son stockage. Preuve des qualités de notre diesel renouvelable, les armées commencent d’ailleurs à s’y intéresser.
CBN : Quelle place pourra jouer votre carburant dans le cadre de la politique de verdissement des transports menée à l’échelle européenne ?
JH : Nous sommes bien sûr des adeptes du mix-énergétique, car nous pensons qu’en 2040, le développement de véhicules électriques ne permettra de décarboner concrètement qu’un quart du transport européen. L’utilisation d’un carburant comme le nôtre participe donc d’un ensemble de solutions. Nous pensons par ailleurs qu’il ne faut surtout pas attendre 2035, et la fin du moteur thermique, pour recourir au Neste MY. Preuve que nous commençons à être entendus, notre marque connait un véritable essor et est présent dans de nombreux pays de l’Union européenne, la Finlande bien sûr, mais aussi aux Pays-Bas, en Belgique, Allemagne, etc.
par Pierre Cossard | Nov 17, 2023 | Autocar, Entreprise, Les dossiers
Dernier débat, et non des moindres, du congrès de la FNTV, celui intitulé « mix énergétique, clé de la décarbonation des autocars » aura permis de faire le point, mais aussi de lister les attentes du secteur, en matière de transition énergétique des TRV.
L’intitulé avait le mérite d’être claire quant à la position de la profession sur le désormais nécessaire verdissement des flottes d’autocars : ce processus passera par le mix-énergétique.
Problème, l’introduction du sujet, portée par Antoine Comte-Bellot, directeur de projet au secrétariat général à la planification écologique, a clairement mis en lumière le « blocage » mental dans lequel se trouve aujourd’hui l’Etat, qui ne semble concevoir cette transition que sous le seul angle de l’électrification.
Passés les éléments de langage habituels indiquant que le transport restait le seul secteur d’activité à n’avoir pas baissé ses émissions de CO2, et que l’Etat vise pour lui à une diminution de 35 000 tonnes d’émissions d’ici à 2030, Antoine Comte-Bellot a toutefois reconnu que « l’autocar sera certainement le plus difficile à électrifier… ». Quant au problème du coût de cette transition, le planificateur restera plutôt disert.
Un sujet, majeur, sur lequel rebondit rapidement Edouard Hénaut, DG France du groupe Transdev. « Il y aura obligation d’intégrer le surcoût de cette transition dans la commande publique », explique-t-il. Et d’enchaîner sur le mix-énergétique, « qui est la solution la plus sérieuse, notamment parce qu’elle est intimement liée à la nature des territoires… ».
« Nous sommes des apôtres du mix-énergétique, renchérit Stéphane Espinasse, président d’Iveco France, mais chaque type d’énergie a d’abord besoin d’un écosystème viable. Pour le gaz par exemple, nous constatons que 23% du parc français d’autocars utilise désormais cette ressource. Pour l’électrique (20% de la capacité de production car et bus est aujourd’hui électrique en Europe, NDLR), si l’écosystème existe dans l’urbain, il n’est pas encore développé dans l’interurbain. Lorsque les infrastructures et les financements seront au rendez-vous, les industriels le seront aussi ».
En matière de financements justement, Jean-Pierre Serrus, vice-président en charge des transports et de la mobilité durable de la région Sud, a donné quelques pistes retenues par sa région. « Nous avons fait le choix politique d’inscrire toutes nos décisions budgétaires dans le cadre du Plan Climat, et ce jusqu’en 2028, explique-t-il. Concernant par exemple les transports, nous escomptons que les orientations « vertes » augmenteront le coût de nos DSP d’environ 10%. Auquel cas, ce surcoût sera inscrit dans le budget général de la région ».
Un panel d’alternatives
Puisque la profession mise sur le mix-énergétique, le plateau se devait d’être représentatif de la diversité des solutions énergétiques mise à disposition des acteurs du TRV.
Laurence Poirier-Dietz, DG de GRDF, a donc tenu à préciser que « le biogaz est désormais une solution mature, plus de 2000 autcoars et quelque 6000 autobus roulent aujourd’hui en France grâce à ce carburant ». Selon elle, le biogaz pourrait représenter 20% de la consommation de gaz de l’Hexagone en 2030.
Même satisfecit pour Claire Duhamel, directrice d’Oleo 100, qui rappelle que la France peut produire beaucoup de bio-carburant, « un sous-produit liquide de la culture du Colza par exemple », et que cette filière pourrait à la même échéance, décarboner 10% du parc de véhicules lourds français. « Il ne faut surtout pas se focaliser sur une opposition thermique ou non thermique, précise-t-elle, ce sont les diminutions des émissions de CO2 qui comptent ».
Restait à envisager les capacités de la filière du rétrofit, notamment électrique, représentée ici par Emmanuel Flahaut, PDG de Retrofleet qui en a vanté les mérites. « Notre premier autocar rétrofité (un Crossway, NDLR) affiche une autonomie de 200 km, explique-t-il, la transformation peut s’effectuer en deux ou trois semaines, il coûte deux fois moins cher qu’un électrique, et il nécessite un chargeur dont le prix ne dépasse pas 2000 €, autant d’éléments qui rendent cette option économiquement viable ». Ce véhicule étant désormais homologué, Retrofleet table sur 10 autocars rétrofités cette année, et sur une centaine l’an prochain. « Une réflexion doit être menée sur la taille des packs de batteries en fonction des usages, conclue-t-il, et le rétrofit s’inscrit bien dans cette démarche ».
Transdev étant partenaire de cette initiative, Edouard Hénaut précise que son groupe « a en effet focalisé l’expérience sur le transport scolaire qui fait peu de kilomètres au quotidien. Avec le rétrofit, on peut rallonger la vie des véhicules pour que cet investissement soit rationnel économiquement… ».
Finalement, la conclusion viendra de Stéphane Espinasse. « Il faut que tous les acteurs s’organisent en filières, explique-t-il, mais nous avons d’abord besoin d’une stabilisation réglementaire, notamment au niveau des institutions européennes ».
En ouverture, de gauche à droite : Florence Duprat ; Antoine Comte-Bellot, directeur de projet au secrétariat général à la planification écologique ; Claire Duhamel, directrice d’Oléo 100 ; Stéphane Espinasse, président d’Iveco France ; Emmanuel Flahaut, PDG de Retrofleet ; Edouard Hénaut, DG France du groupe Transdev ; Laurence Poirier-Dietz, DG de GRDF ; Jean-Pierre Serrus, vice-président en charge des transports et de la mobilité durable de la région Sud.
par Pierre Cossard | Nov 16, 2023 | Autocar, Entreprise, Les dossiers
Sujet d’inquiétude majeure pour nombre d’autocaristes, le déploiement dans un certain nombre d’agglomérations des zones à faible émission (ZFE) et, à Paris, d’une zone à trafic limitée (ZTL) a logiquement fait l’objet d’un débat lors du congrès de la FNTV.
Face à un public loin d’être acquis, l’honneur d’expliquer l’état d’avancement de ces nouvelles réglementations revenait à Claude Renard, coordinateur ministériel aux ZFE.
Avec calme, Claude Renard a d’abord tenu à rappeler que la mise en œuvre des ZFE « était avant tout un problème sanitaire auquel nous souhaitions (l’Etat, NDLR) répondre ». « Nous avons fixé un cadre, a t-il poursuivi, et une certaine liberté de mise en application. Aujourd’hui, sur 43 agglomérations initialement concernées par les ZFE, il n’en reste que 5 pour lesquelles elles sont devenues obligatoires. Pour les autres, il faudra qu’à fin 2024 soit exclus les véhicules particuliers Crit’Air 3. Pour le reste, il s’agit de décisions locales, que nous tentons d’harmoniser… ».
Christine Français, présidente de la commission tourisme au sein de la FNTV, ne manque pas alors de rebondir sur cette dernière affirmation en affirmant que la profession qu’elle représente a avant tout besoin d’un calendrier cohérent et de règles claires et harmonisées, rappelant au passage qu’un autocar permet de supprimer de la route une moyenne de 30 automobiles, ce qui contribue tout autant à résoudre le problème sanitaire précédemment évoqué…
« Le problème, reconnait Claude Renard, c’est que certaines collectivités ont déjà programmé la fin des Crit’Air 2, donc l’interdiction des autocars roulant au diesel… ».
Une forme de fatalisme qui fait bondir François Durovray, président du conseil départemental de l’Essonne : « une fois de plus, on lutte contre une pollution en créant une usine à gaz avec des règles quasi impossibles à appliquer ! ». Et de s’interroger, à l’évocation du projet de ZTL parisien : « les élus de Paris ont-ils conscience d’avoir une responsabilité au-delà du périphérique ? ».
A chaque problème ses solutions ?
Au chapitre des solutions, c’est encore Claude Renard qui a ouvert le bal. « Il est évident que la mise en œuvre des ZFE implique d’abord la mise en place d’un panel d’offres alternatives à la voiture individuelle », a-t-il convenu.
Si le plaidoyer de Thomas Matagne, président d’ECOV, pour le développement de lignes de covoiturage, fut écouter poliment, c’est bien une fois de plus – et fort logiquement – François Durovray qui s’attirera la sympathie de la salle, puisqu’il milite activement pour la création d’un véritable réseau d’autocars express. « Toutes les métropoles sont concernées, explique-t-il. Nous avons dépensé des milliards d’euros dans le mass transit, mais il faut relier tous les pôles entre eux, notamment en grande couronne. Pourquoi ne pas profiter des infrastructures routières qui existent ? En Ile-de-France, nous pourrions créer en 9 mois rien moins que 1500 km de ligne de car à haut niveau de service, soit quelque 50 lignes. Et tout cela pour un investissement de départ de seulement un milliard d’euros et quelque 150 M€ chaque année pour l’exploitation ».
Tout espoir n’est donc par perdu.
En ouverture, de gauche à droite : Florence Duprat ; Claude Renard, coordinateur ministériel aux ZFE ; Thomas Matagne, président d’ECOV ; François Durovray, président du conseil départemental de l’Essonne ; Christine Français, présidente de la commission tourisme de la FNTV.
par Pierre Cossard | Nov 16, 2023 | Autocar, Entreprise, Les dossiers
Le 15 novembre dernier, à la Maison de la Chimie à Paris, la Fédération National des Transports de Voyageurs a tenu son congrès annuel.
Au menu de la séquence rituelle, les problématiques de recrutement, la place de l’autocar dans les JO 2024, mais aussi l’autocar face aux ZFE et autres ZTL. Enfin, les congressistes ont fait le point sur la décarbonation des véhicules. Le premier sujet a occupé toute la matinée de débat.
Passé le discours de bienvenue de Jean-Sébastien Barrault, président de la FNTV, c’est Antoine Foucher, président de Quintet, qui, en préambule des échanges à venir sur le recrutement, a partagé son analyse concernant le rapport des jeunes générations au travail.

Antoine Fouchet, Quintet.
Selon lui, ces dernières ont parfaitement intégré le fait que le travail ne leur permettra plus d’augmenter leur niveau de vie, qu’elles ne bénéficieront pas dans l’avenir d’une diminution du temps de travail, et que, dans ces conditions, le travail en lui-même doit avoir un sens. Ajoutez à cela une baisse « du stock » de population active liée au vieillissement de la population, et voilà la profession autocariste en concurrence directe avec tous les autres secteurs pour séduire de nouvelles recrues !
Selon Antoine Fouchet, il leur faut impérativement donner du sens à ces métier en mettant en avant les notions de service public mais aussi de transition énergétique. Enfin, il leur faudra aussi maîtriser toute la chaîne de formation…
Les réponses d’une profession
Si l’on ne s’attarde qu’au problème de recrutement concernant les conducteurs (6000 postes non pourvus cette année, contre 8000 en 2022), et passé le constat inquiétant présenté par Antoine Fouchet, les congressistes se sont rassurés en découvrant Quentin Girard, conducteur chez Viabus et lauréat du challenge conducteur de car dans le cadre des Worldskills 2023. Peut-être est-il une exception, mais le jeune homme a fait part de sa passion de la conduite, de son sens du service et de son intérêt pour les échanges avec la clientèle.
Un état d’esprit que Loïc Charbonnier, président délégué général de l’AFTRAL, ne pouvait que saluer, tout en rappelant que les métiers de la conduite n’étaient pas assez connus de la jeunesse actuelle, même si cette année, « 30% de conducteurs supplémentaires ont pu être formés ».
Ingrid Mareschal, déléguée générale de la FNTV, a rappelé, pour aller dans ce sens, que la FNTV avait œuvré avec les syndicats du secteur à la création du CAP personnel de conduite et abouti à sa création en avril dernier. Jean-Paul Schutz, proviseur du lycée Les Catalins de Montélimar, a d’ailleurs fait part de son expérience quant à la création d’une première session de 8 CAP à la dernière rentrée.
Chose importante, concernant le déficit d’embauche dans le secteur de la maintenance, il milite lui pour la mise à disposition d’autocars pour les ateliers des filières de formation technique, afin que les jeunes lycées puissent se familiariser avec ces matériels, mais aussi avec les nouvelles motorisations à venir.
Concernant ce sujet spécifique, Ingrid Mareschal, comme Loïc Charbonnier, envisage la création d’un Bac +1 Maintenance autocar. « Un chantier qui débute, précise-t-elle, mais qui demandera entre 12 et 18 mois ». Une évolution saluée par le désormais sénateur du Nord, Franck Dershin, qui a tout de même tenu à rappeler que « la fin des motorisations thermique devait effectivement se préparer dès maintenant, au risque de se retrouver face à un mur de difficultés le moment venu »…
Lors du second débat de la matinée a été explorée une autre piste, qui consisterait cette fois à un retour à l’emploi partiel de jeunes retraités. Une expérimentation déjà menée dans certaines régions par la FNTV avec Pôle Emploi.
En ouverture, de gauche à droite : Florence Duprat, journaliste et animatrice du congrès ; Quentin Girard, conducteur chez Viabus et lauréat du challenge conducteur de car aux Worldskills 2023 ; Ingrid Mareschal, déléguée générale de la FNTV ; Loïc Charbonnier, président délégué général de l’AFTRAL ; Jean-Paul Schutz, proviseur du lycée Les Catalins de Montélimar ; Franck Dhersin, vice-président Transport des Hauts de France, désormais sénateur du Nord.
par Pierre Cossard | Nov 16, 2023 | Autocar, Entreprise, Les dossiers
La tradition a été respectée lors de la visite de Clément Beaune, ministre délégué aux Transport, lors du congrès de la Fédération Nationale des Transports de Voyageurs (FNTV) qui s’est tenu le 15 novembre à Paris. Le président de la fédération, Jean-Sébastien Barrault, a fait part des doléances de la profession au ministre, et Clément Beaune a fourni des éléments de réponse… non sans avoir loué le dialogue permanent, et constructif, existant entre l’Etat et cette profession.
Cahier de doléances
Le président de la FNTV donc, reprenant d’ailleurs le déroulé programmé pour le congrès, a listé les attentes de la profession à l’endroit des pouvoirs publics. Jean-Sébastien Barrault a d’abord fustigé les délais de délivrance des documents de conduite pour les nouveaux recrutés (on parle de 3 à 9 mois selon les préfectures, NDLR) et demandé la création d’une attestation provisoire de conduite pour pouvoir mettre plus rapidement derrière un volant les nouveaux conducteurs, si difficile à recruter.

Jean-Sébastien Barrault, président de la FNTV.
En matière de transition énergétique, il a aussi milité pour la promotion du mix-énergétique et la préservation des HVO, B100 et autres biogaz, précisant que « tout miser sur l’électrique serait une erreur », l’offre industrielle peinant à suivre. Il a par ailleurs tenu à rappeler que, du moins pour les longues distances, le diesel resterait « encore longtemps nécessaire ». Enfin, il a aussi fait appel aux subventions de l’Etat pour que le secteur puisse supporter le coût de cette transition, chiffrée à quelque 3 Mds€ d’ici à 2035.
Dernier point évoqué par Jean-Sébastien Barrault, celui de Paris, qui semble avoir choisi de chasser l’autocar hors du Périphérique avec la fermeture programmée de la gare de Bercy, la mise en œuvre de la ZFE (zone à faible émission) et d’une ZTL (zone à trafic limité). Le président a clairement fait appel à l’aide de l’Etat pour qu’un véritable dialogue soit enclenché…
Clément Beaune a son propre agenda…
Comme attendu, le ministre des Transports n’a évidemment pas donner toute satisfaction face aux attentes de la profession exprimées par le président de la FNTV. Mais il en va presque toujours ainsi du jeu entre une profession et son ministère de tutelle.
Ainsi, sur les délais d’obtention des documents administratifs, Clément Beaune a-t-il convenu : « on peut faire mieux sans changer le cadre des procédures »… Il en a d’ailleurs profité pour rappeler sa volonté de tendre vers la mise en place d’un guichet unique concernant la profession, et pour annoncer que le principe d’une attestation provisoire de conduite pouvait… être mise à l’étude.

Clément Beaune, ministre délégué aux Transports.
Concernant la transition énergétique, le ministre a rappelé le credo gouvernemental qui fixe l’électrification des transports comme l’objectif incontournable à atteindre. Exit donc le mix-énergétique, même s’il reconnait « la nécessité d’une période de transition calée dans un bon rythme ». Une manière de dire que, pour l’autocar, les dates actuellement fixées par l’Union européenne ne correspondent pas réellement à la réalité des possibilités.
Enfin, il a vanté les mérites du rétrofit et, mesure concrète cette fois, annoncé que le gouvernement « engageait le suramortissement pour les véhicules ayant fait l’objet d’un rétrofit ».
Enfin, au chapitre des rapports à venir, Clément Beaune a annoncé en avoir commandé un pour le début 2024 sur la pertinence du développement des services de cars express, mais aussi avoir demandé un éclairage à l’ART (Agence de Régulation des Transports) sur la problématique des gares routières.
On remarquera l’absence de réponse véritable quant à la problématique parisienne…
par Pierre Cossard | Nov 9, 2023 | Autobus, Autocar, Entreprise, Les dossiers
Les industriels de l’autocar et de l’autobus vivent depuis quelques années une véritable révolution. L’accumulation des lois et règlements liée à la transition écologique voulue par les instances européennes et françaises leur impose de revoir toute leur stratégie. Dans ce contexte, l’avis d’une des figures du secteur peut prendre valeur d’analyse. Entretien avec Heinz Kiess, directeur Marketing produit chez MAN Bus.
Car & Bus News : Pouvez-vous nous définir en quelques mots la situation dans laquelle se trouvent les constructeurs de véhicules de transport collectifs actuellement ?
Heinz Kiess : Nous sommes tous clairement sous pression de la réglementation et sous celle de l’obligation de revoir et d’intégrer un nouvel environnement électronique. Pour nous la prochaine étape consiste à répondre au défi de la norme Euro 7 en 2027.
CBN : MAN va donc relever ce pari ?
HK : Oui, en 2027, MAN sortira une motorisation thermique conforme aux normes Euro 7, car nous pensons que l’avenir de l’autocar passera par un mix-énergétique susceptible de répondre aux divers cas d’usage de ce type de véhicules. Dans cette logique, nous présenterons aussi en 2025 un autocar électrique afin de tester le concept, avant, en 2028 ou 2029 de proposer une nouvelle plateforme électrique MAN pour notre gamme d’autocars. Elle intégrera d’ailleurs les batteries que MAN a commencé à produire dans notre usine de Nuremberg.
CBN : L’usage de l’hydrogène semble aussi faire une percée dans le secteur des transports collectifs, quel est le point de vue de MAN sur cette évolution technologique ?
HK : Nous avons passé beaucoup de temps à analyser dans le détail le cycle de l’hydrogène vert. Nous allons concentrer nos recherches sur l’usage des piles à combustible, mais aussi sur le moteur thermique H2. Mais pour bien saisir l’importance de cette évolution et savoir quelle place nous pouvons y tenir, il faut développer une vision du puit à la roue pour faire les bons calculs. Nous nous devons donc d’être pragmatiques car, pour développer l’hydrogène, il faudra disposer d’infrastructures qui restent encore en grande partie à créer.
CBN : Quelle est votre vision du marché européen aujourd’hui ?
HK : MAN mène des enquêtes permanentes auprès de ses clients, et nous ne pouvons que constater qu’ils subissent par exemple aujourd’hui des pénuries de conducteurs, une inflation importante, une concurrence exacerbée, etc. Il est difficile de développer une stratégie produit sans tenir compte du fait que c’est toujours le client final qui décide, et ce en fonction de l’ensemble des facteurs évoqués précédemment. Tant que nos clients ne franchissent pas certains caps, nous ne pouvons pas faire le pari de leur proposer des produits inadaptés à leur demande.
CBN : Diriez-vous par exemple que le véhicule autonome, pourtant de plus en plus présent dans certains catalogues chez vos concurrents, ne correspond pas encore aux attentes de votre clientèle ?
HK : Même si MAN travaille sur plusieurs projets de véhicules autonomes dont les premiers résultats devraient apparaître dans cinq ans, ce qui n’est pas si lointain, l’autonomie ne me paraît pas être une solution adaptée à la grande majorité des besoins du transport collectif.